enseignants
Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la réforme de la formation des enseignants. À la suite de la réforme dite de « mastérisation » ordonnée par Nicolas Sarkozy en 2010, le métier d'enseignant a beaucoup perdu en attractivité. Non contente de supprimer les Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), cette réforme a prolongé les études de 3 à 5 ans après le baccalauréat, tout en supprimant l'année de stage. Par conséquent, de tout jeunes gens se sont retrouvés, sans expérience aucune, sommés de faire la classe à des élèves auxquels ils n'avaient jamais été confrontés, avec les difficultés que l'on peut imaginer. L'image du métier d'enseignant, déjà peu attractive par certains côtés (en France, les salaires des enseignants comptent parmi les plus faibles des pays de l'OCDE, et ils reculent même depuis 1995 !), en a pâti encore davantage. À l'heure où tout le monde s'accorde à reconnaître le rôle central de l'école dans la consolidation des valeurs de la République, il était du devoir de la gauche de redonner de l'attractivité à ce métier si essentiel. C'était l'un des buts de la Loi sur la refondation de l'école du 8 juillet 2013, qui a créé les nouvelles Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPé), lesquelles ont réintroduit une formation en alternance en deuxième année de cursus. Si l'esprit de la réforme avait été quasi-unanimement salué par la profession, cela n'a pas empêché le fait que plusieurs difficultés surviennent sur le terrain. Il avait interpellé M. Benoît Hamon, alors ministre de l'éducation nationale, au cours d'une séance de questions-cribles dans l'hémicycle en juin 2014. Le 18 mars 2015, au cours de la présentation du point d'étape du comité de suivi de la loi pour la refondation de l'école de la République sur la formation des enseignants, en commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, ces difficultés ont de nouveau été abordées. Comme le faisait remarquer M. Yves Durand, président du comité de suivi, « force est de constater que la relation avec le monde universitaire est souvent difficile et marquée par une certaine incompréhension entre présidents d'universités, présidents d'unités de formation et de recherche (UFR) et directeurs d'ESPE ». Les ESPE rencontrent d'autres problèmes, comme celui du recrutement des formateurs, ou encore du service à mi-temps des enseignants stagiaires, qui éprouvent de vraies difficultés à gérer leur emploi du temps (assumer la responsabilité d'une classe à temps partiel et rédiger un mémoire de master n'est pas de tout repos !). Les membres du comité ont également regretté que les sciences cognitives peinent à irradier les formations et les pédagogies, alors même qu'elles ont été expérimentées (comme à l'école maternelle de Gennevilliers). Mais la solution a tous ces problèmes pourrait simplement être budgétaire ; c'est en tout cas l'avis du Syndicat national de l'enseignement supérieur (SNESup), l'un des syndicats nationaux de la Fédération syndicale unitaire (FSU), qui regrette l'absence d'un budget fléché et autonome pour les 30 ESPE. Selon le syndicat, un tel cadrage budgétaire permettrait de résoudre au cas par cas nombre des problèmes évoqués (mise en place de « maquettes de master exigeantes », d'un « encadrement adapté », d'« heures de suivi de stage », etc.). Il souhaiterait ainsi connaître son avis sur les revendications du SNESup-FSU. Alors que 22 000 professeurs-stagiaires passés par les ESPE ont commencé à enseigner à la rentrée 2014, et que nous avons pu étudier et analyser les avantages et les faiblesses de ce système pendant une année entière, il souhaiterait connaître la stratégie du Gouvernement pour l'améliorer durablement.
Réponse publiée le 23 février 2016
La loi d'orientation et de programmation du 8 juillet 2013 pour la refondation de l'école de la République, en se fixant l'objectif ambitieux de réduction des déterminismes sociaux et de réussite de chacun des élèves, place la pédagogie et la qualité des enseignements au cœur des priorités éducatives. C'est dans cette perspective que la formation initiale et le recrutement des personnels enseignants et d'éducation ont été profondément repensés. La mise en place des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) répond à ces enjeux d'ampleur. Elle induit des transformations significatives quant à la façon de concevoir et d'organiser la formation, telles qu'il est impossible qu'à l'issue de deux années d'existence, les ESPE aient atteint un régime optimal. Conscients du besoin d'accompagnement fort, afin que la construction des ESPE repose sur des bases solides, les directions du ministère, le comité de suivi de la loi, les inspections générales et le comité de pilotage se sont fortement mobilisés pour effectuer un suivi régulier et fournir les appuis nécessaires aux ESPE. Au titre des maquettes et des contenus d'enseignement, les retours de l'enquête développée par le ministère ont fait émerger des marges de progrès et ont permis aux ESPE d'en prendre conscience. Ainsi, pour répondre à certaines difficultés organisationnelles et s'assurer que les choix différents réalisés dans le cadre de l'autonomie propre à chaque ESPE ne se traduisent pas in fine par une hétérogénéité de la formation initiale sur le territoire, plusieurs textes de cadrage ont été produits. Il est possible de mentionner l'instruction relative au tronc commun (30 avril 2015), celle sur les parcours adaptés (29 mai 2015), les textes réglementaires relatifs aux modalités d'évaluation et de titularisation, publiés au BO du 26 mars 2015. Dans la même logique d'appui, une instruction portant sur le mémoire est en cours de finalisation. Enfin, la question de la place de la recherche dans la formation a d'ores et déjà donné lieu à un travail collectif concret marqué notamment par un séminaire en décembre conduit conjointement par le réseau des directeurs ESPE et les directions du ministère et par l'université de printemps pilotée par le réseau ESPE. Parallèlement, pour répondre à la question du recrutement des formateurs, les missions des formateurs dans les 1er et 2nd degrés, comme les modalités de certification ont été reprises, actualisées et adaptées donnant lieu à publication de nouveaux décrets, arrêtés et circulaires en juillet 2015. Pour faciliter les relations indispensables entre présidents d'université, directeurs d'ESPE et représentants des rectorats au bon fonctionnement des Ecoles, plusieurs leviers ont été activés : - la constitution de groupes nationaux liant les différents acteurs ; - la mise en place de rencontres nationales (5 novembre 2014 et 30 juin 2015) ; - le renouvellement des dossiers d'accréditation. Par ailleurs, pour accompagner les nouveaux entrants dans les métiers de l'enseignement et de l'éducation dans une logique d'alternance intégrative et faciliter l'acquisition progressive des compétences requises, un outil d'accompagnement a été élaboré et publié en mars 2015. Ainsi, pour répondre aux différentes difficultés rencontrées logiquement dans la phase de construction des ESPE, le choix a été celui d'un accompagnement fort pour lever les freins organisationnels et accroître la lisibilité des attendus. L'enjeu est celui de contribuer à une formation de qualité telle qu'elle puisse être reconnue et constituer de ce fait un facteur d'attractivité.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement : personnel
Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Dates :
Question publiée le 18 août 2015
Réponse publiée le 23 février 2016