Question de : M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Hervé Féron attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la notion de « pays sûrs ». Introduite dans le droit communautaire par la directive dite « procédure » du 1er décembre 2005, cette notion est utilisée dans le domaine du droit de l'asile. Elle désigne les pays où les personnes ne sont pas suffisamment en danger pour que leurs demandes d'asile soient acceptées. Il existe actuellement des listes de « pays d'origine sûrs » (POS) dans plusieurs pays de l'Union européenne, mais de grandes disparités existent d'un pays à l'autre ; à titre d'exemple le Nigéria est considéré comme un pays sûr pour le Royaume-Uni, mais pas pour la France ; ou encore, le Ghana est sûr pour l'Allemagne, mais pas pour l'Autriche. En France, cette liste a été établie par l'Office français de protection des réfugiés apatrides (Ofpra), et elle est régulièrement actualisée. Le 16 décembre 2013, le conseil d'administration de l'Ofpra a ainsi ajouté l'Albanie, la Géorgie et le Kosovo à la liste des POS, portant leur nombre à 18, et faisant de la liste française l'une des plus longues après le Royaume-Uni. Cet élargissement de la liste a suscité les critiques des associations françaises de défense des réfugiés, et notamment de Forum réfugiés - Cosi. En effet, ces associations soulevaient une interrogation légitime : la France agrandirait-elle sa liste de POS aux fins de pouvoir débouter davantage de demandes d'asile, quitte à considérer comme sûrs des pays où certaines catégories de la population peuvent être exposées à des formes de violence ? Dans le contexte cacophonique actuel où chaque État dispose de sa propre liste de POS, rendant impossible la coordination des politiques de l'asile des différents États-membres, il attire son attention sur la nécessité d'établir une liste de POS commune à l'ensemble de l'Union européenne. Cette liste devra se baser sur des critères objectifs, qui pourront être fondés par exemple sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, dont l'autorité et la compétence sont reconnues sur le continent européen même si l'UE, en tant qu'organisation, n'est toujours pas signataire de la Convention européenne des droits de l'Homme (CEDH). Alors que la crise migratoire apporte chaque jour son lot de victimes humaines ayant tenté de rejoindre des rivages plus paisibles, cette réforme s'avère plus que nécessaire. Il souhaiterait donc que M. le ministre apporte tout son soutien à l'initiative du président Jean-Claude Juncker, qui a récemment annoncé que la Commission européenne proposerait d'établir une liste commune de pays d'origine sûrs.

Réponse publiée le 17 mai 2016

La législation applicable en matière d'asile prévoit, conformément à la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, dite directive « procédures », la possibilité d'examiner en procédure accélérée les demandes d'asile émanant de ressortissants de pays considérés comme des pays d'origine sûrs. La loi du 29 juillet 2015 portant réforme du droit d'asile a maintenu ce dispositif qui permet de dissuader des demandes manifestement étrangères à un besoin de protection, tout en le rénovant profondément pour en renforcer les garanties juridiques. Le placement sur la liste des « pays d'origine sûrs » est assuré par le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) dont la composition a été profondément revue par la loi portant réforme du droit d'asile. Les ressortissants de ces pays ont le droit de déposer une demande d'asile, qui est examinée par l'office en toute indépendance et avec les mêmes garanties et droits que les autres demandeurs. Depuis la réforme, l'OFPRA peut en outre reclasser des demandes en procédure normale si cela lui paraît justifié et le demandeur bénéficie, en cas de rejet, d'un recours suspensif devant la Cour nationale du droit d'asile. La loi a retenu une définition du « pays d'origine sûr » pleinement conforme à la définition de la directive « procédures ». De même, la réforme a imposé au conseil d'administration de l'OFPRA une obligation d'examen régulier des pays afin de garantir l'actualité et la pertinence des inscriptions. Par délibération du 9 octobre 2015, le conseil d'administration de l'office a procédé à une révision de la liste des pays d'origine sûrs au regard de la définition nouvelle de la loi, aux termes de laquelle seize pays ont été inscrits. Enfin, une proposition de règlement du Conseil et du Parlement européen établissant une liste commune européenne des pays d'origine sûrs a été présentée par la Commission européenne en septembre 2015 et est actuellement en discussion. Les autorités françaises sont favorables à l'établissement d'une telle liste, pourvu que ses modalités d'établissement et d'évolution garantissent la réactivité aux variations des flux et aux changements de situation et que la liste européenne continue de coexister avec des listes nationales, pour tenir compte des flux spécifiques dans certains États membres.

Données clés

Auteur : M. Hervé Féron

Type de question : Question écrite

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Affaires étrangères

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 15 septembre 2015
Réponse publiée le 17 mai 2016

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