Question de : M. Thierry Lazaro
Nord (6e circonscription) - Les Républicains

M. Thierry Lazaro attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur le rapport parlementaire fait au nom de la commission d'enquête sur l'organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe. Ce rapport relève qu'à la date du 9 mars 2015, les services de renseignement avaient recensé un total de 1 432 ressortissants français partis vers les zones de combat syro-irakiennes. Si un tel phénomène n'est pas sans précédent dans notre pays, de tels départs vers des zones de combats ayant déjà eu lieu par le passé, notamment vers la Bosnie, l'Afghanistan, la Somalie ou encore le Mali, son ampleur est, en revanche, inédite. Ce rapport formule des propositions destinées à prévenir la radicalisation, à renforcer la coordination et les prérogatives des services antiterroristes, à contrer le « djihad » médiatique, à tarir le financement du terrorisme, à mieux contrôler les frontières de l'Union européenne et à adapter la réponse pénale et carcérale. Aussi, il souhaite connaître son avis sur la proposition visant à mettre en cohérence l'infraction de recrutement terroriste avec les autres dispositifs de l'arsenal pénal antiterroriste, soit par la suppression de l'article 421-2-4 du code pénal, soit par une réécriture des articles 421-2-4 et 421-2-5.

Réponse publiée le 5 juillet 2016

L'article 421-2-4 du code pénal, issu de la loi du 21 décembre 2012, réprime le fait d'adresser à une personne des offres ou des promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, de la menacer ou d'exercer sur elle des pressions afin qu'elle participe à un groupement ou une entente prévu à l'article 421-2-1 ou qu'elle commette un des actes de terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2, même lorsqu'il n'a pas été suivi d'effet. Cette disposition, introduite dans le code pénal dans le prolongement de la décision cadre 2008/919/JAI du 28 novembre 2008, modifiant la décision cadre de 2002 relative à la lutte contre le terrorisme et comportant l'obligation pour les États membres de l'Union européenne de réprimer dans leur droit le recrutement en vue de commettre des actes de terrorisme, a uniquement pour objet de permettre de poursuivre le recruteur terroriste même quand l'individu visé pour être recruté n'a pas donné suite à la sollicitation. Le recrutement pour le terrorisme est à ce jour pour l'essentiel appréhendé dans le système judiciaire français à travers l'infraction d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste prévue par l'article 421-2-1 du code pénal. L'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste permet en effet de réprimer la participation à un groupement formé en vue de la préparation d'actes de terrorisme, ce qui vise nécessairement l'organisation ou la préparation de tels actes, mais également et plus largement tous les comportements périphériques. Sont ainsi appréhendés de manière large toutes les personnes impliquées dans une filière d'acheminement de combattants jihadistes (recruteurs, velléitaires, facilitateurs et combattants) et plus largement tous les comportements périphériques (recrutement, entraînement, endoctrinement idéologique, etc). Ainsi le champ d'application de l'infraction prévue et réprimée par l'article 421-2-4 du code pénal recoupe celui de l'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Si cette infraction est à ce jour peu utilisée par les praticiens dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, elle apparaît néanmoins pouvoir permettre de réprimer certains comportements intervenant en marge de l'infraction d'association de malfaiteurs terroriste et assure la pleine conformité du dispositif judiciaire français de lutte contre le terrorisme avec la décision-cadre 2008/919/JAI précitée. Une réécriture des articles 421-2-4 et 421-2-5 du code pénal apparaît quant à elle inopportune, ces dispositions procédant de finalités distinctes. Par ailleurs, la loi du 13 novembre 2014, afin de lutter contre le développement de la propagande terroriste, améliore l'efficacité de la répression en ce domaine, en soumettant la provocation et l'apologie au terrorisme aux règles de procédure de droit commun et à certaines règles prévues en matière de terrorisme.

Données clés

Auteur : M. Thierry Lazaro

Type de question : Question écrite

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 22 septembre 2015
Réponse publiée le 5 juillet 2016

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