policiers
Question de :
Mme Marion Maréchal-Le Pen
Vaucluse (3e circonscription) - Non inscrit
Mme Marion Maréchal-Le Pen interroge M. le ministre de l'intérieur sur la protection pénale des forces de police. Ces derniers jours, un mouvement unitaire des forces de police s'est constitué au sujet de la dégradation des conditions de travail des gardiens de la paix. En effet, les violences contre les policiers ne parviennent pas à être jugulées : sur la dernière décennie 36 policiers ont été tués en mission et plus de 52 000 blessés ont été recensés. À cela s'ajoute une baisse des effectifs de police depuis 2009 et une diminution des moyens matériels : les cartouches sont rationnées, le matériel de protection vieillissant voire obsolète comparé aux armes de guerre utilisées par le grand banditisme, les terroristes et dans certains quartiers à l'encontre des forces de l'ordre. L'année 2014 marque une recrudescence des dangers : les attentats islamistes ont accru les sollicitations des fonctionnaires de police qui travaillent à flux tendu, les attaques de commissariats se sont multipliées durant la période estivale et le nombre de policiers tués en mission a augmenté. En plaçant les policiers sous le régime de droit commun, la législation ne les préserve pas des dangers auxquels ils sont confrontés dans des situations rapides et d'émotions extrêmes. Afin de ne plus laisser les policiers dans la crainte d'un risque juridique et pour leur permettre d'assurer au mieux la sécurité des Français, elle demande s'il est envisagé d'appliquer la présomption de légitime défense pour les forces de police. La notion de légitime défense devrait intégrer la notion de globalité de l'action en prenant en compte la continuité du risque, nécessaire pour faire cesser la menace continue que représente le déplacement d'un individu armé.
Réponse publiée le 31 mai 2016
Les policiers et les gendarmes assurent, avec professionnalisme et courage, le respect de la loi républicaine et la protection de nos concitoyens, dans des conditions de plus en plus difficiles, parfois au péril de leur vie. Les atteintes graves à leur intégrité physique atteignent des niveaux inacceptables. Lors de leurs interventions sur la voie publique, ils sont également fréquemment victimes d'outrages ou confrontés à des rébellions. En 2014, plus de sept mille policiers et gendarmes ont été blessés en mission. Durant le premier semestre 2015, cinq policiers sont décédés dans l'exercice de leur métier. Le 25 août dernier, un major de gendarmerie a été assassiné dans la Somme. Le 5 octobre encore, un policier a été grièvement blessé à l'Ile-Saint-Denis alors qu'il accomplissait son devoir. Les attentats de janvier comme ceux de novembre ont une nouvelle fois démontré leur engagement total et leur professionnalisme. Ils ont aussi coûté la vie à deux policiers, ainsi qu'à une policière municipale. Ces chiffres témoignent de la réalité des violences auxquelles sont exposées, au quotidien, les forces de l'ordre. Ces actes de violence, comme toutes les atteintes aux forces de l'ordre, sont inadmissibles. L'Etat a le devoir de protéger les agents de la force publique. Le respect dû à ceux qui incarnent le principe d'autorité et le droit est essentiel. En la matière, aucun laxisme n'est acceptable, aucune excuse n'est recevable et rien ne saurait justifier, dans un Etat de droit, que quiconque porte atteinte à des représentants de l'autorité publique. La protection des policiers et des gendarmes est un souci constant et prioritaire du ministre de l'intérieur. Policiers et gendarmes exercent leurs fonctions dans un cadre légal qui leur permet d'employer, mais toujours en ultime recours, la force armée. Le cadre légal applicable aux policiers et aux gendarmes est fondé sur les règles de la légitime défense (article 122-5 du code pénal) ou de l'état de nécessité (article 122-7 du code pénal). Pour le maintien de l'ordre public, le code pénal (article 431-3) et le code de la sécurité intérieure (articles L. 211-9 et D. 211-10 et suivants) permettent par ailleurs aux représentants de la force publique appelés en vue de dissiper un attroupement de faire directement usage de la force si des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s'ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu'ils occupent. Outre les situations évoquées ci-dessus, communes aux policiers et aux gendarmes, les militaires de la gendarmerie peuvent déployer la force armée dans les cas énumérés à l'article L. 2338-3 du code de la défense (notamment pour empêcher la fuite d'une personne, après sommations faites à voix haute, et s'il n'existe pas d'autres moyens). La jurisprudence européenne et nationale a harmonisé le cadre d'emploi des armes, en conformité avec la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Quels qu'en soient les modalités et le fondement juridique, l'usage de la force est en effet soumis aux principes d'absolue nécessité et de proportionnalité exigés par la jurisprudence de la Cour de cassation comme par celle de la Cour européenne des droits de l'homme. Les débats sur ce sujet se développent toutefois et sont légitimes. A la demande du ministre de l'intérieur, un groupe de travail réunissant les inspections générales de la police et de la gendarmerie nationales et associant des parlementaires a été mis en place pour examiner les possibles évolutions des cas d'usage des armes par les forces de l'ordre en cas d'absolue nécessité et notamment face aux tueurs de masse. Ces travaux avancent rapidement et pourraient très prochainement trouver une traduction législative. Les attaques terroristes de novembre ont confirmé l'importance de ce travail de révision des conditions d'usage de l'arme. Indépendamment de ces travaux, il doit être noté que, dans le contexte de l'état d'urgence, il a été décidé la mise en place temporaire d'un régime dérogatoire permettant d'autoriser les policiers actifs à porter leur arme individuelle en dehors de leur service afin de leur permettre de faire face, à tout moment, dans le respect du droit applicable, à des individus armés. A la suite des attentats de novembre, un renforcement massif des moyens des forces de l'ordre a également été décidé. La création de 5 000 postes supplémentaires dans la police et la gendarmerie a été annoncée par le Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès le 16 novembre 2015. Cet effort exceptionnel s'ajoute aux mesures déjà engagées depuis le début du quinquennat pour renforcer les effectifs avec la création chaque année de 500 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes, alors que 13 000 postes avaient été supprimés de 2007 à 2012 en application de la révision générale des politiques publiques. Dans le cadre du renforcement du dispositif anti-terroriste annoncé en janvier dernier par la Premier ministre, le Gouvernement avait en outre décidé la création de 1 500 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes entre 2015 et 2017. Par ailleurs, la création de 500 postes supplémentaires dans la police nationale a été décidée en septembre pour faire face à la crise migratoire. Ce renforcement exceptionnel des moyens humains constitue un gage de sécurité accrue pour les personnels, notamment en intervention. Sur le plan matériel aussi, le Gouvernement est mobilisé pour que les forces de l'ordre disposent des moyens de remplir efficacement leurs missions, dans des conditions optimales de sécurité. Alors même que le projet de loi de finances pour 2016 prévoyait déjà une hausse des crédits de fonctionnement et d'investissement des forces de l'ordre, il a été décidé à la suite des attentats de novembre d'accroître encore cet effort, afin de donner aux membres des forces de l'ordre les moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs missions. La seule police nationale va par exemple bénéficier en 2016 d'une augmentation de son budget initialement prévu (hors dépenses de personnel) de plus de 100 millions d'euros. Il y a lieu également de rappeler que 5,6 millions d'euros supplémentaires ont été dégagés dès 2015 dans le cadre du plan anti-terrorisme lancé en janvier pour des dépenses d'armement et de protection. Ces dotations budgétaires auront des conséquences directes sur le terrain en matière de renouvellement du stock d'armes, d'équipement en gilets pare-balles, de véhicules, etc. En présentant les décisions du Gouvernement le 14 octobre, le Premier ministre a également annoncé des mesures qui auront un impact sur la sécurité des policiers et des gendarmes, avec la décision de réformer les modalités de sortie ponctuelle des détenus et l'annonce d'un plan national de lutte contre les armes à feu, lancé par le ministre de l'intérieur dès le mois de novembre. Le 30 octobre à Rouen, le ministre de l'intérieur a par ailleurs annoncé la mise en œuvre, dès 2016, d'un plan de renforcement des équipements des brigades anti-criminalité de la police (BAC) et des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG), fortement exposés dans la lutte contre la délinquance sur le terrain. Ce plan consiste à apporter des moyens supplémentaires à des personnels mieux formés, dans le cadre d'une doctrine d'intervention spécifique. Ce plan permettra de sécuriser davantage les interventions des policiers et des gendarmes. Plus de 6 millions d'euros seront par exemple consacrés à l'amélioration de leurs équipements (protection individuelle et balistique renforcée, modernisation de l'armement, géolocalisation des BAC…). Tout est mis en œuvre pour assurer, sur le plan humain, matériel et juridique, la protection des membres des forces de l'ordre.
Auteur : Mme Marion Maréchal-Le Pen
Type de question : Question écrite
Rubrique : Police
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Dates :
Question publiée le 27 octobre 2015
Réponse publiée le 31 mai 2016