Question de : M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Hervé Féron alerte M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget sur les conséquences de la fiscalisation des 10 % de pension de retraite supplémentaires versés aux personnes retraitées ayant eu trois enfants ou plus. Prévue dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 et combinée avec d'autres mesures de restriction budgétaire, cette décision a eu des effets catastrophiques sur le pouvoir d'achat de retraités très modestes. À titre d'exemple, une personne retraitée de la circonscription de M. Féron a vu son quotient familial augmenter, son ménage devenant imposable alors même que l'allocation aux adultes handicapés (AAH) de son épouse était supprimée, que la CSG dont ils devaient s'acquitter augmentait et que le paiement de la taxe d'habitation leur était brutalement imposé. En définitive, c'est une somme de 6 000 euros supplémentaire qu'ils sont dans l'obligation de débourser. Face à l'ampleur de la situation, plusieurs parlementaires se sont mobilisés en faveur d'un rééquilibrage fiscal pour les plus modestes, ce qui passe notamment par le rétablissement de la demi-part fiscale supplémentaire attribuée aux personnes veuves. Le Gouvernement a entendu ces demandes en acceptant de relever le seuil du revenu fiscal de référence, ce qui signifie qu'à partir de 2017 les personnes les plus modestes ne paieront pas l'impôt sur le revenu et toutes les taxes qui en découlent (redevance télé, taxe d'habitation, taxe foncière). Pour remédier immédiatement aux difficultés des personnes dont les impôts locaux ont fortement augmenté, seront exonérées totalement pour 2015 et 2016 les personnes en situation de handicap, invalides, veuves, ou âgées de plus de 60 ans, de taxe foncière et de taxe d'habitation. Enfin, un amendement de Jean-Marc Ayrault et de Pierre-Alain Muet au PLF pour 2016 aura pour effet de diminuer la charge de la CSG pesant sur les ménages les plus modestes, sous réserve de certains critères. Si ces mesures proposées par le Gouvernement étant appréciables, elles ne sauraient toutefois suffire pour corriger l'ensemble des injustices actuellement observées, notamment en ce qui concerne l'exonération des impôts locaux. En effet, une grande partie des personnes très modestes ne remplissent pas les critères leur permettant de bénéficier d'une exonération. Il est donc nécessaire que le Gouvernement concède un effort encore plus important en faveur des personnes souffrant d'une imposition trop lourde par rapport à leurs revenus. Il souhaiterait ainsi connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour rétablir davantage de justice fiscale dans le système actuel.

Réponse publiée le 10 mai 2016

L'article 5 de la loi de finances pour 2014 soumet à l'impôt sur le revenu, à compter de l'imposition des revenus de l'année 2013, les majorations de retraite ou de pension pour charges de famille, qui en étaient auparavant exonérées. Comme l'a rappelé le rapport de la commission pour l'avenir des retraites qui s'est basé sur les travaux du conseil d'orientation des retraites, cette majoration était doublement favorable aux titulaires des pensions les plus élevées, d'une part, parce qu'elle est proportionnelle à la pension (et donc plus importante au titre des pensions élevées) et, d'autre part, parce que l'exonération d'impôt sur le revenu procurait un avantage croissant avec le revenu. La suppression de cette exonération apparaît pleinement justifiée au regard des principes généraux de l'impôt sur le revenu et du caractère inéquitable de cette dépense fiscale coûteuse évaluée à 1,2 Md€ par an. Cela étant, conscient des efforts demandés à tous, et de leur poids particulier pour les plus modestes, depuis 2014, le Gouvernement a décidé de rendre aux Français une partie de leurs efforts. La priorité a été de restaurer la situation des contribuables aux revenus modestes, qui étaient entrés dans l'imposition du fait des mesures accumulées depuis 2011. Dès 2014, la réduction d'impôt exceptionnelle décidée par le Gouvernement a permis de rendre non imposables à l'impôt sur le revenu 2 millions de contribuables. Le mouvement de baisse de l'impôt sur le revenu initié en 2014 s'est poursuivi en 2015. Plus de 9 millions de ménages ont bénéficié de la suppression de la première tranche, parmi lesquels 7,8 millions de foyers ont vu leur impôt baisser d'au moins 100 €. Pour 5,8 millions de foyers fiscaux, l'économie d'impôt est supérieure à 200 €. L'article 2 de la loi de finances pour 2016 amplifie le mouvement en 2016 par une nouvelle mesure de baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes. Cette mesure, qui prend la forme d'un renforcement et d'un aménagement du mécanisme de la décote, diminue de manière pérenne l'impôt sur le revenu de 8 millions de foyers fiscaux titulaires de revenus moyens, quelle que soit leur catégorie socio-professionnelle (salariés, retraités, indépendants), pour un gain moyen de 252 € par foyer concerné. Par ailleurs, elle permettra à 1,1 million de foyers de sortir ou de ne pas entrer dans l'impôt. En outre, de même que l'an dernier en loi de finances pour 2015, les limites des tranches de revenus du barème de l'impôt sur le revenu sont revalorisées comme l'évolution de l'indice des prix hors tabac de 2015 par rapport à 2014. Ainsi, les effets de l'inflation sur le montant de l'impôt sur le revenu sont neutralisés pour l'ensemble des foyers fiscaux. Par ailleurs, s'agissant de la fiscalité directe locale, à compter de 2015, le Gouvernement a souhaité mettre en place un dispositif ambitieux, prévu à l'article 75 de la loi de finances pour 2016. D'une part, il permet aux contribuables qui franchissent le seuil de revenu fiscal de référence de conserver pendant deux ans le bénéfice de certaines exonérations d'impôts locaux. Il en va ainsi de l'exonération de taxe d'habitation (TH) prévue au I de l'article 1414 du code général des impôts (CGI) en faveur des personnes titulaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ou de l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI), des personnes de condition modeste titulaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), des personnes âgées de plus de 60 ans ou veuves et des personnes atteintes d'une infirmité ou d'une invalidité les empêchant de subvenir par leur travail aux nécessités de l'existence. Tel est le cas, également, du dégrèvement de contribution à l'audiovisuel public qui lui est attaché, de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) prévue à l'article 1390 du code général des impôts en faveur des personnes titulaires de l'ASPA, de l'ASI ou de l'AAH, et de celle prévue à l'article 1391 du même code en faveur des personnes modestes de plus de 75 ans. A l'issue de cette période, la valeur locative servant à l'établissement de la TH et de la TFPB est réduite de deux tiers la troisième année et d'un tiers la quatrième année. Ainsi, les contribuables ne perdront le bénéfice de ces avantages que s'ils franchissent de manière durable les seuils de revenu fiscal de référence. Cette mesure s'applique dès 2015 pour les contribuables qui étaient encore exonérés en 2014 ; ils bénéficieront ainsi d'un dégrèvement. D'autre part, la situation des personnes qui bénéficiaient des dispositions de l'article 28 de la loi du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014 est mieux prise en compte. Par la majoration du seuil de revenu fiscal de référence applicable à ces personnes, l'exonération d'impôts directs locaux dont elles auraient perdu le bénéfice uniquement en raison de l'évolution de la législation fiscale, alors même que leur situation n'a pas évolué, est maintenue de manière pérenne. L'ensemble de ces mesures constitue un effort budgétaire très important, qui montre, s'il en est besoin, la volonté du Gouvernement de tenir compte de la situation des contribuables modestes et tout particulièrement des retraités ainsi que son attachement aux considérations de justice en matière fiscale. Enfin, il est rappelé que dans sa décision no 2015-725 DC du 29 décembre 2015, le Conseil constitutionnel a censuré l'article 77 de la loi de finances pour 2016 prévoyant le versement d'une fraction de la prime d'activité sous la forme d'une réduction dégressive de contribution sociale généralisée (CSG). Il a considéré que l'exclusion des travailleurs modestes non salariés du dispositif était contraire au principe d'égalité : elle constituait une différence de traitement non justifiée au regard de l'objectif d'augmentation du pouvoir d'achat des foyers les plus modestes qui lui était assigné.

Données clés

Auteur : M. Hervé Féron

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Budget

Ministère répondant : Budget

Dates :
Question publiée le 24 novembre 2015
Réponse publiée le 10 mai 2016

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