carte du combattant
Question de :
M. Gilles Lurton
Ille-et-Vilaine (7e circonscription) - Les Républicains
M. Gilles Lurton appelle l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire sur la situation des militaires français ou supplétifs qui ont servi en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964. L'article 87 de la loi de finances pour 2015 a accordé la carte du combattant aux militaires ayant servi quatre mois ou plus dans les opérations extérieures. Dans le cas de l'Algérie, elle n'est attribuée qu'aux militaires ayant été sur le territoire algérien jusqu'au 2 juillet 1962. Cependant, de très nombreux militaires, français ou supplétifs, ont défendu les intérêts de la France et ont effectué des missions de sécurité dans un pays devenu indépendant, jusqu'en juillet 1964. Ces opérations ont été menées d'un commun accord, après le cessez-le-feu, selon les dispositions déterminées par les accords d'Évian. En juillet 1962, il restait 305 000 soldats français sur le territoire algérien, 103 000 en janvier 1963 et près de 50 000 en janvier 1964. Durant cette période, 535 militaires français, appelés et engagés, ont été tués ou ont disparu. À ce titre, une mention « mort pour la France » a été récemment attribuée à un militaire décédé le 5 juillet 1962. Il paraît alors évident que ces troupes doivent être considérées comme ayant été en opérations extérieures (OPEX). En outre, M. le secrétaire d'État lui avait signifié, lors de la séance des questions orales sans débat du 18 février 2016 à l'Assemblée nationale, que, concernant ces militaires durant la période du 2 juillet 1962 au 1er juillet 1964, « le facteur d'insécurité n'a jamais été retenu comme justifiant l'ouverture du droit à la carte du combattant ». M. le secrétaire d'État lui avait aussi précisé que ces soldats peuvent bénéficier du titre de reconnaissance de la Nation sur le critère d'une présence de trois mois au moins en Algérie. Or, pour obtenir le titre de reconnaissance de la Nation, la règle est d'avoir participé pendant au moins 90 jours (consécutifs ou non) à un conflit ou plusieurs conflits. Ainsi, lorsque ces anciens militaires français ou supplétifs obtiennent ce titre, l'État reconnaît qu'ils ont participé à un conflit, ainsi que l'existence du risque d'ordre militaire en Algérie jusqu'au 1er juillet 1964. Dans ce cas précis, il peut donc être considéré qu'une opération extérieure a succédé à la guerre d'Algérie, au-delà du 2 juillet 1962, jusqu'en juillet 1964. De plus, M. le secrétaire d'État l'avait informé qu'appliquer l'article 87 aux militaires français ou supplétifs présents en Algérie pendant quatre mois et plus, à partir du 2 juillet 1962 jusqu'en juillet 1964, aurait un coût très élevé, mais sans lui indiquer une valeur, même approximative, qu'une telle mesure entraînerait. Ainsi, il lui demande pourquoi l'État ne reconnaît pas que les militaires, qui ont défendu les intérêts français en Algérie, entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, ont participé à un conflit - donc relevant des OPEX - lorsqu'il s'agit de l'attribution de la carte du combattant, mais le reconnaît lorsqu'il s'agit de l'attribution du titre de reconnaissance de la Nation. Il lui demande également quel serait le coût exact de l'application de l'article 87 aux militaires français ou supplétifs présents en Algérie pendant quatre mois et plus à partir du 2 juillet 1962 jusqu'en juillet 1964.
Réponse publiée le 21 juin 2016
Aux termes des articles L. 253 bis et R. 224 D du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG), ont vocation à la qualité de combattant les militaires et les civils ayant participé à la guerre d'Algérie à partir du 31 octobre 1954 jusqu'au 2 juillet 1962 et ayant servi pendant 90 jours en unité combattante ou pris part à 9 actions de feu ou de combat collectives, ou à 5 actions de feu ou de combat individuelles. Sont toutefois exonérés de ces conditions les militaires qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en unité combattante, ainsi que ceux qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre. En outre, les dispositions de l'article 123 de la loi de finances pour 2004 permettent, depuis le 1er juillet 2004, de reconnaître la qualité de combattant aux militaires dès lors qu'ils totalisent 4 mois de présence sur le territoire concerné, sans obligation d'avoir appartenu à une unité combattante. La prise en compte d'une durée de 4 mois de présence sur ce territoire, considérée comme équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat, a été justifiée par la spécificité des conflits d'Afrique du Nord marqués par le risque diffus de l'insécurité. Un arrêté du 12 janvier 1994, publié au Journal officiel du 11 février 1994, a par ailleurs fixé la liste des opérations extérieures ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant au titre de l'article L. 253 ter du CPMIVG. A cette date, les services accomplis postérieurement au 2 juillet 1962 en Algérie n'ont pas été mentionnés dans ce texte, qui n'a par la suite été modifié que pour y faire figurer des territoires nouvellement concernés par des OPEX. De plus, l'attribution éventuelle de la carte du combattant aux militaires ayant servi en Algérie jusqu'au 1er juillet 1964 reviendrait à considérer que l'état de guerre sur ce territoire aurait continué jusqu'à cette date, ce qui est contraire à la vérité historique. Cette mesure, dont le coût annuel est estimé à 42,5 millions d'euros, auquel il convient d'ajouter le montant des dépenses fiscales afférentes à la retraite du combattant, à la rente mutualiste et aux exonérations associées, n'est pas compatible avec le nécessaire effort de redressement des finances publiques actuellement conduit par le Gouvernement. Il convient néanmoins de souligner que l'article 109 de la loi de finances pour 2014, modifiant l'article L. 253 bis du CPMIVG, a eu pour effet d'étendre le bénéfice de la carte du combattant aux militaires justifiant d'un séjour de quatre mois en Algérie entamé avant le 2 juillet 1962 et s'étant prolongé au-delà sans interruption. 9 893 personnes ont pu bénéficier de la carte du combattant dans le cadre de cette mesure. Par ailleurs, les militaires présents en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 bénéficient d'ores et déjà d'une reconnaissance particulière. Conformément aux dispositions de l'article D. 266-1 du CPMIVG, ils peuvent en effet, sous réserve de justifier des conditions requises, solliciter le titre de reconnaissance de la Nation (TRN) qui leur ouvre droit au port de la médaille de reconnaissance de la Nation, à la souscription d'une rente mutualiste et les rend ressortissants de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Enfin, il est souligné que les services effectués en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 pris en compte pour l'attribution du TRN ne relèvent pas des dispositions des articles L. 253 bis et R. 224 D du CPMIVG. A cet égard, les TRN sont délivrés avec la mention « aux opérations militaires sur le territoire de l'Algérie » et non avec une mention « guerre d'Algérie ». Deux périodes sont donc à distinguer dans la réglementation : la guerre d'Algérie du 31 octobre 1954 au 2 juillet 1962 et les opérations militaires sur le territoire de l'Algérie entre le 3 juillet 1962 et le 1er juillet 1964.
Auteur : M. Gilles Lurton
Type de question : Question écrite
Rubrique : Anciens combattants et victimes de guerre
Ministère interrogé : Anciens combattants et mémoire
Ministère répondant : Anciens combattants et mémoire
Dates :
Question publiée le 10 mai 2016
Réponse publiée le 21 juin 2016