armée
Question de :
Mme Annie Genevard
Doubs (5e circonscription) - Les Républicains
Mme Annie Genevard interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les dispositifs d'indemnisation des victimes des essais nucléaires tels qu'ils résultent du décret du 15 septembre 2014 sur l'application de la loi du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. En effet, ces textes prévoient, pour les personnes ayant séjourné dans des zones situées en Polynésie française ou en Algérie pendant des périodes déterminées et ayant contracté une maladie radio-induite, une reconnaissance de causalité par son exposition aux rayonnements ionisants dus aux effets nucléaires entraînant une indemnisation du fait de la responsabilité de l'État. Cependant, cette présomption de causalité est réfragable lorsque le risque attribuable aux essais nucléaires est « négligeable » au regard de la nature de la maladie et des conditions de l'exposition aux rayonnements ionisants. Or les mesures réglementaires apparaissent trop restrictives pour assurer une indemnisation favorable aux victimes des essais nucléaires et de nombreux rejets d'indemnisation leur sont opposés du fait de la complexité relative à la détermination du lien de causalité. En outre, les seuils concernant les doses reçues de rayonnements ionisants sont fondés sur un rapport de l'Académie de médecine du 5 mars 2004 minimisant les effets de la radioactivité sur la santé et débouchant sur des normes de radioactivité constamment révisées à la baisse. Par ailleurs, les procédures d'expertises ne sont pas satisfaisantes en ce qu'elles prévoient le règlement des honoraires d'expert à la charge des victimes des essais nucléaires et excluent dans l'évaluation des préjudices, le remboursement des frais médicaux à l'organisme de sécurité sociale. Le Président de la République a annoncé, lors de son déplacement en Polynésie française le 22 février 2016 que le décret d'application de la loi n° 2010-2 serait modifié pour préciser notamment la notion de risque négligeable afin de permettre à plus de victimes d'être indemnisées. À ce jour, aucune modification n'a été opérée. À cet égard, Il apparaît important qu'une délégation de l'Association des vétérans des essais nucléaires (AVEN) soit entendue pour débattre notamment du décret attendu. Aussi, lui demande-t-elle de bien vouloir intervenir afin d'améliorer le processus des indemnisations des victimes d'essais nucléaires.
Réponse publiée le 26 juillet 2016
Le comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a été institué par la loi no 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires. Auparavant consultatif et placé sous tutelle du ministère de la défense, le CIVEN est devenu, depuis la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013, une autorité administrative indépendante, et fonctionne sous ce nouveau statut depuis février 2015. Le système d'indemnisation repose sur une présomption de causalité entre les expositions aux rayonnements ionisants des essais nucléaires français et une maladie radio-induite. La présomption de causalité bénéficie toujours au demandeur lorsqu'il souffre ou a souffert de l'une des maladies radio-induites mentionnées en annexe du décret du 15 septembre 2014 et qu'il a résidé ou séjourné dans l'une des zones entrant dans le périmètre du décret. Les frais d'expertises, quand celles-ci sont ordonnées par le CIVEN, sont à la charge de ce comité. La présomption de causalité ne peut être écartée que si le risque attribuable aux essais nucléaires peut être considéré comme négligeable au regard de la nature de la maladie et des conditions de l'exposition aux rayonnements ionisants. Cette présomption ne joue actuellement que si la probabilité de causalité est supérieure à 1%, seuil fixé par le CIVEN. La commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires a été réunie le 13 octobre 2015, pour la première fois sous la présidence de la ministre des affaires sociales et de la santé. La ministre a fait part de sa volonté d'améliorer le dispositif d'indemnisation, en commençant par une plus grande transparence de la méthode d'indemnisation et d'appréciation du risque négligeable par le CIVEN pour identifier les leviers d'amélioration à recommander. Cette méthode a depuis été rendue publique. Sur la base des travaux engagés à la suite de cette première commission, le Président de la République a annoncé, lors de son déplacement en Polynésie française, que le décret d'application de la loi no 2010-2 serait modifié pour préciser la notion de risque négligeable afin de permettre à plus de victimes d'être indemnisées, notamment lorsque les mesures de surveillance qui auraient été nécessaires n'ont pas été mises en place. La ministre des affaires sociales et de la santé a présidé, le 6 juillet 2016, la deuxième réunion de la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires et a notamment présenté le projet de décret annoncé par le Président de la République. Avec ce projet, le gouvernement propose de fixer un seuil de probabilité plus bas, à 0,3%. Par ailleurs, le projet prévoit que le CIVEN puisse également prendre en compte d'autres éléments pour ouvrir droit à indemnisation et notamment l'incertitude liée à la sensibilité de chaque individu aux radiations et à la qualité des relevés dosimétriques. Enfin, le projet de décret précise les cas dans lesquels le risque que la maladie radio-induite dont est atteint le demandeur, soit attribuable aux essais nucléaires ne peut pas être considéré comme négligeable : lorsqu'aucune donnée dosimétrique ne peut être prise en compte et alors que des mesures de surveillance qui auraient été nécessaires n'ont pas été mises en place. Par ailleurs, le projet prévoit la mise en place de visioconférences pour que les victimes puissent se faire entendre par le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) lorsque les distances géographiques ne permettent pas un déplacement couteux. Enfin, la commission a considéré qu'il convenait d'étudier l'hypothèse d'un élargissement des maladies radio-induites listées en annexe du décret de 2014. L'ensemble des membres de la commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires a pu s'exprimer au cours de la réunion et notamment les associations dont l'AVEN.
Auteur : Mme Annie Genevard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales et santé
Dates :
Question publiée le 14 juin 2016
Réponse publiée le 26 juillet 2016