Syrie
Question de :
M. Noël Mamère
Gironde (3e circonscription) - Écologiste
Question posée en séance, et publiée le 12 septembre 2013
SYRIE
M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, pour le groupe écologiste.
M. Noël Mamère. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne la Syrie.
Il faut sans doute voir dans la décision prise par M. Poutine de contrôler les armes chimiques d'Assad un effet positif de la pression exercée par Washington et Paris. Cependant, l'espoir diplomatique que nous avons placé dès hier dans cette décision a été très vite refroidi par le rejet, exprimé par le ministre des affaires étrangères russe, du projet de résolution contraignante présenté par la France. Ma première question concerne donc ce projet de résolution : que compte faire la France, qui siège au Conseil de sécurité, sur cette résolution contraignante pour que l'ONU retrouve enfin une légitimité ? C'est un espoir, mais aussi une inquiétude puisque nous pouvons supposer qu'il s'agit d'une manœuvre dilatoire de la part du président russe pour permettre à Bachar el-Assad et à son clan de continuer à perpétrer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre. Je rappelle que ce conflit a causé 150 000 morts, 2 millions de réfugiés et 5 millions de personnes déplacées.
Ce sont les djihadistes qui profitent de ce chaos. Cette question est donc posée à la France : considérez-vous que vous devez aider l'armée syrienne libre, donc la partie démocratique de l'opposition, pour rééquilibrer les forces et permettre ainsi l'organisation d'une conférence internationale qui associerait tous les acteurs, y compris l'Iran, et qui serait un « Genève 2 » ?
Enfin, monsieur le Premier ministre, la France est-elle prête à sortir d'une forme d'indignité,…
M. Philippe Meunier. Elle est à la remorque d'Obama !
M. Noël Mamère. …puisqu'elle ne répond pas au Haut commissariat pour les réfugiés sur la question de l'installation des réfugiés syriens, dont je rappelle qu'ils sont 2 millions, alors que les autres pays de l'Union européenne ont répondu favorablement au HCR ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le député Noël Mamère, vous avez raison :…
M. Jacques Myard. Ça commence mal ! (Sourires.)
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …la France a fait preuve de la plus grande détermination. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.) C'était le cas la semaine dernière lors du débat sur la situation en Syrie dans cet hémicycle ; je remercie d'ailleurs les députés de la majorité d'avoir compris qu'il fallait, après ce que le secrétaire général des Nations unies a appelé un crime contre l'humanité, dire clairement au régime de Bachar el-Assad que l'usage des armes chimiques, qui a causé près de 1 500 morts, devait susciter la réponse la plus claire et la plus ferme. C'est la France qui a pris l'initiative d'aller jusqu'au bout dans cette fermeté. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.) C'est l'honneur de la France d'avoir tenu bon, d'avoir commencé à faire reculer le régime syrien et à faire prendre conscience à la communauté internationale de la nécessité de se mobiliser. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Sur ce sujet, c'est l'ensemble de la représentation nationale qui devrait se rassembler,…
M. Philippe Meunier. Pas avec vous !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre . …plutôt que de se laisser aller.
S'agissant de la question syrienne, la France a toujours privilégié la solution politique. À Saint-Pétersbourg, alors que l'on disait la France isolée (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP)…
Qui disait cela, sinon les membres de l'opposition (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI)…
M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …qui devraient au contraire être fiers qu'à Saint-Pétersbourg, la France ait rassemblé une majorité des membres du G20 (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP – Exclamations sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI) pour condamner le régime de Bachar el-Assad et l'usage des armes chimiques ?
François Hollande a fait preuve de patience, de pédagogie, de clarté et de détermination.
M. Philippe Meunier. Ridicule !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre . Le lendemain, à Vilnius, le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius a également pu obtenir une déclaration dans le même sens de tous les Européens. Croyez-vous que tout cela a été inutile ? (« Oui ! » sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.)
M. Philippe Vitel. Inutile et dangereux !
M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues…
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre . Cela a fait bouger les lignes.
M. François Rochebloine. Merci Poutine !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Aujourd'hui, la menace de la France est la suivante : si nécessaire, nous interviendrons avec une coalition pour poser un acte fort de dissuasion, pour que le droit international soit respecté, pour que la prolifération des armes chimiques comme de l'arme nucléaire ne soit pas la pratique quotidienne. La France a permis que les choses bougent sur le plan diplomatique. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Oui, sur le plan diplomatique !
S'agissant de la proposition russe, qui consiste à faire l'inventaire des armes chimiques,…
M. François Rochebloine. Très bien !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …je vous rappelle qu'il y a encore quelques jours, M. Bachar el-Assad niait le fait qu'il disposait de telles armes. Aujourd'hui, nul ne peut nier – lui le premier – que c'est ce pays qui dispose de l'arsenal chimique le plus important au monde : 1 000 tonnes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
M. Jacques Myard. Et les États-Unis ?
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre . Par ailleurs, la Russie propose de contrôler et démanteler : nous l'avons prise au mot. Hier, le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius a tenu une conférence de presse ; la France a pris une initiative dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations unies.
M. Philippe Meunier. La France est isolée !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Nous voulons des actes concrets. L'acte concret que nous voulons, c'est l'inventaire de l'arsenal, sa vérification et sa destruction. Voilà ce que nous attendons du Conseil de sécurité ! Dès lors, nous verrons bien la sincérité des uns et la sincérité des autres – y compris la vôtre, mesdames et messieurs les députés de l'opposition. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Enfin, monsieur le député, vous avez évoqué les réfugiés, qui sont plus de 2 millions, en particulier dans la région. La situation est terrible. La France a déjà pris ses responsabilités et commencé à accueillir des réfugiés : 95 % de ceux qui entrent dans le cadre ont été accueillis. Notre coopération avec le HCR est entière. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Auteur : M. Noël Mamère
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 septembre 2013