Question au Gouvernement n° 1298 :
transport de marchandises

14e Législature

Question de : M. François de Rugy
Loire-Atlantique (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 7 novembre 2013


SITUATION EN BRETAGNE

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe écologiste.

M. François de Rugy. Monsieur le Premier ministre, le tissu économique breton souffre. Plans sociaux après plans sociaux, les salariés sont victimes de stratégies auxquelles ils sont étrangers. Face à cette situation, qui est aussi une réalité pour toutes les régions de France, une colère s'est exprimée. Elle a pris pour cible la taxe poids lourds, qui n'est que le bouc émissaire de difficultés qui existent depuis plusieurs années.

Le Gouvernement a fait des gestes exceptionnels…

M. Jean-Luc Reitzer. Lesquels ?

M. François de Rugy. …pour créer les conditions du dialogue et de l'apaisement en suspendant la taxe poids lourds puis en faisant procéder au démontage d'un portique par les services de l'État.

Dans cette voie de l'apaisement et du dialogue, monsieur le Premier ministre, nous vous avons soutenu. Cela doit permettre de définir ensemble des solutions durables tant pour la crise bretonne que pour la mise en œuvre d'une taxe poids lourds dont tout le pays, et singulièrement la Bretagne, a besoin pour financer les infrastructures ferroviaires tant attendues.

Mais une nouvelle étape a été franchie hier avec cet ahurissant ultimatum. Le comble, c'est de voir qu'un mouvement qui se revendique comme une mobilisation de défense des contribuables se traduit par des centaines de milliers d'euros d'argent public qui partent en fumée dans des incendies de portiques. C'est insupportable. Les Français, et particulièrement les Bretons, n'acceptent pas cette dérive qui n'a plus rien à voir avec le droit de manifester. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, SRC et RRDP.)

Il est particulièrement choquant que des élus, y compris sur ces bancs, refusent de condamner de tels actes. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Porter un bonnet rouge n'autorise pas tout !

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour mettre en œuvre tout à la fois le dialogue et le respect de la loi ? (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur de Rugy, nous sommes dans une démocratie et c'est une chance, car ce n'est pas le cas partout dans le monde. Et une démocratie, cela se défend et se respecte. Le droit de manifester est un des droits fondamentaux des citoyens, mais l'application de la loi, le refus de la violence font aussi partie des principes républicains que je souhaite voir respecter par tous et partout. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Monsieur de Rugy, samedi dernier, une grande manifestation a eu lieu à Quimper.

Mme Claude Greff. Il y en aura d'autres !

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. Celle-ci représente précisément le droit des citoyens à exprimer ce qu'ils ressentent et ce qu'ils attendent. Cette manifestation, qui a rassemblé de nombreuses personnes, s'est déroulée globalement sans heurts, l'appel au calme ayant été compris par les organisateurs. Force est cependant de constater que, malgré cela, il y a eu des dégradations et que des agents de la force publique ont subi des outrages et des violences. Je dois saluer ici, et toute la représentation nationale devrait également le faire, le sang-froid, le professionnalisme des forces de l'ordre. Leur travail est difficile, ils le font dans le respect de la loi votée par le Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP ainsi que sur de nombreux bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Je sais que ces violences sont le fait d'une minorité, de groupes extrémistes. Pour autant, elles sont inacceptables. C'est pourquoi toutes les informations utiles ont été transmises au parquet. Les personnes identifiées dans le cadre de ces violences font actuellement l'objet de convocations devant le tribunal correctionnel de Quimper.

Plusieurs procédures ont également été ouvertes après des dégradations sur des biens publics, vous l'avez évoqué à l'instant, monsieur de Rugy.

M. Yves Censi. Et José Bové ?

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. Quel que soit le bien public – un portique, un radar –, que ce soit une école ou un équipement sportif, qu'il dépende d'une région, d'un département, d'une ville ou d'un quartier, ce n'est pas acceptable et c'est contraire aux lois de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) J'appelle chacun à la responsabilité.

M. Yves Censi. Et les faucheurs volontaires ?

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. Une fois encore, je fais la différence entre cette minorité et l'immense majorité des citoyens qui, en Bretagne comme ailleurs, quand ils expriment une angoisse ou une protestation, souhaitent que les choses se mettent en marche, en mouvement. Il n'y a qu'un moyen d'y parvenir : le dialogue ; telle est la volonté du Gouvernement.

M. Daniel Fasquelle. C'est vous le responsable !

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. En dépit du fait que quelques-uns expriment des ultimatums qui n'ont pas lieu d'être, au moment où je vous parle le préfet de région rencontre heure par heure, conformément à ma demande, tous les partenaires qui veulent que les choses avancent, qui veulent le dialogue : les responsables économiques, les représentants des organisations syndicales, les élus des territoires, les parlementaires. Ces rencontres ont commencé hier. Tous sont aujourd'hui au travail pour répondre à la proposition que j'ai faite au nom du Gouvernement : préparer le plan pour sauver et rénover l'agroalimentaire en Bretagne, préparer le pacte d'avenir.

M. Daniel Fasquelle. Il n'y a rien de concret !

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. Pour ma part, je suis tout à fait confiant s'agissant du pacte d'avenir, car j'ai bien vu qui venait.

Mme Claude Greff. Personne !

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. Et ceux qui ne viennent pas ont tort. Ceux qui n'étaient pas venus la semaine dernière ont compris leur erreur et sont maintenant eux aussi autour de la table. Je veux vous dire ici que le Gouvernement est prêt à aller vite. Il a pris une mesure d'apaisement courageuse : la suspension de l'écotaxe, à l'échelle non pas seulement de la Bretagne mais de toute la France. Je souhaite que d'ici à la fin du mois de novembre nous soyons en mesure de signer le pacte d'avenir,…

M. Christian Jacob. Sinon tu démissionnes ?

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. …notamment les mesures en faveur des entreprises agroalimentaires. Je souhaite que toutes les forces s'y mettent. Et si c'est le cas, alors j'irai signer ce contrat en personne avec ceux qui l'auront préparé. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

M. Jean-Louis Borloo. Très bien !

M. Jean-Marc Ayrault. Premier ministre. Telle est la volonté du Gouvernement, mesdames messieurs les députés, une volonté forte et claire : le dialogue, le respect de la loi républicaine, le refus de la violence, l'ambition partagée pour la Bretagne et pour la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Données clés

Auteur : M. François de Rugy

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Transports routiers

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 novembre 2013

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