réglementation
Question de :
Mme Danielle Auroi
Puy-de-Dôme (3e circonscription) - Écologiste
Question posée en séance, et publiée le 12 décembre 2013
DIRECTIVE SUR LES TRAVAILLEURS DÉTACHÉS
M. le président. La parole est à Mme Danielle Auroi, pour le groupe écologiste.
Mme Danielle Auroi. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse au ministre du travail et de l'emploi.
Monsieur le ministre, il nous faut saluer le travail que vous avez accompli pour moraliser la directive européenne sur le détachement des travailleurs, dont on connaît aujourd'hui les effets délétères de dumping social. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.) Je rappelle que notre commission des affaires européennes, et notamment nos collègues Guittet, Savary et Piron, avaient tiré très tôt la sonnette d'alarme.
Deux points cruciaux ont été obtenus : une liste ouverte de documents pour l'État et l'administration de contrôle qui en feront la demande, et la création d'une responsabilité conjointe et solidaire du donneur d'ordre dans le secteur du BTP pour les fraudes relevant de ses sous-traitants. C'est une réelle avancée pour une Europe plus sociale, celle que souhaitent nos concitoyens.
Cependant, il restera des pans entiers d'activité qui seront toujours exploités par des damnés de la terre, dans l'agriculture, les transports ou la restauration. La France peut aller plus loin que ce premier pas européen. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ? Comment concrétiserez-vous ces décisions, puisque vous envisagez de doter les inspecteurs du travail de moyens supplémentaires pour renforcer leurs contrôles ?
Ces abus, qui sont une nouvelle forme d'esclavage, s'exercent en France, comme au Carré Jaude à Clermont-Ferrand, où certains salariés étaient payés moins de 3 euros de l'heure, mais aussi hors d'Europe – souvenons-nous des plus de 1 100 morts du Rana Plaza !
J'ai déposé, avec Dominique Potier et Philippe Noguès, une proposition de loi sur le devoir de vigilance des sociétés-mères. Comment pensez-vous, avec vos collègues Nicole Bricq et Pascal Canfin, élargir la responsabilité des donneurs d'ordre vis-à-vis de leurs sous-traitants en Europe et à l'extérieur de l'Union ? (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, SRC et RRDP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la députée, je vous remercie d'attirer l'attention de l'Assemblée sur cette question très importante. L'Europe est un espace de libre circulation, c'est un de ses principes fondamentaux, mais ce ne doit pas être un espace de libre exploitation des salariés. L'Europe est un espace de libre concurrence, cela fait en effet aussi partie des principes fondamentaux de ce que nous avons voulu construire, mais ce ne doit pas être un espace de concurrence déloyale qui s'appuie sur le dumping social. Voilà la question qui était posée à l'ensemble des Européens.
Nous connaissons tous des exemples de dumping social sur le territoire français, mais c'est la même chose en Belgique, en Hollande, au Danemark, au Luxembourg, et également en Allemagne.
M. Marc Le Fur. En Allemagne !
M. Michel Sapin, ministre . Il y a dans tous ces pays des situations inadmissibles, intolérables, où des salariés sont exploités dans des conditions non conformes aux grands principes des droits de l'homme. Nous ne pouvons pas non plus accepter qu'à cause du dumping social, des salariés se voient privés de leur emploi en France parce que leur entreprise a perdu un marché face à un concurrent qui a proposé un prix plus faible au donneur d'ordre, un prix trop faible. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur divers bancs des groupes écologiste et RRDP.)
C'est donc pour lutter efficacement contre les fraudes qu'il y avait besoin d'un accord européen, afin que dans chaque pays d'Europe, on lutte avec les mêmes armes et avec la même détermination contre des dispositifs parfois extrêmement sophistiqués qui permettent de faire écran entre le vrai responsable, l'entreprise donneuse d'ordre, et les sous-traitants qui sont à ses ordres. C'est ce qui a été décidé. Il y aura des contrôles supplémentaires, avec des moyens accrus, dans les jours qui viennent, pour l'inspection du travail et toutes les autres inspections nécessaires à la mise en œuvre du dispositif (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), ainsi que des capacités nouvelles de mise en cause du donneur d'ordre, et aussi bien entendu une nouvelle législation en France qui vous sera proposée pour transférer ces règles très rapidement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Auteur : Mme Danielle Auroi
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 décembre 2013