Question au Gouvernement n° 1556 :
Dexia

14e Législature

Question de : M. Sébastien Pietrasanta
Hauts-de-Seine (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 23 janvier 2014


RÉMUNÉRATION DES DIRIGEANTS DE DEXIA

M. le président. La parole est à M. Sébastien Pietrasanta, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Sébastien Pietrasanta. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, dans cette période difficile pour de nombreux citoyens, nous devons être particulièrement vigilants sur les rémunérations perçues par les dirigeants de grandes entreprises. Dans le secteur public, le Gouvernement a pris, au mois de juillet 2012, un décret qui plafonne le salaire des dirigeants à vingt fois le salaire le plus faible. Dans le secteur privé, une chance a été donnée à l'autorégulation, mais celle-ci peine à se mettre en place, comme l'a montré l'affaire Varin au mois de novembre 2013. La pression populaire et médiatique avait alors conduit le dirigeant de PSA à renoncer à sa retraite chapeau.

Dans ce contexte, l'annonce de l'augmentation de 30 % de la rémunération des dirigeants de la banque Dexia à partir du 1erjanvier 2014 est une absurdité totale.

M. Guy Delcourt. Un scandale !

M. Sébastien Pietrasanta. C'est une absurdité au regard non seulement de nos valeurs et de la situation économique de notre pays mais aussi de la situation de Dexia. N'oublions pas que cette banque, par la faute de ses anciens dirigeants, a fait souscrire à des milliers de collectivités locales des milliards d'euros d'emprunts toxiques qui, aujourd'hui, mettent à mal leurs finances. Vous connaissez, d'ailleurs, mon combat contre les emprunts toxiques. N'oublions pas non plus que cette mauvaise gestion a contraint l'État français à renflouer les caisses de DEXIA à hauteur de 6,6 milliards d'euros. (« Honteux » ! sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Monsieur le ministre, alors que DEXIA est en proie à de graves difficultés, nous vous interpellons sur cette étonnante augmentation de salaire. Vous avez eu raison de la qualifier d'inappropriée. Moi-même, je la qualifierai d'augmentation chapeau, pour ne pas dire chapeau à ces artistes dirigeants qui n'hésitent pas s'octroyer 30 % de rémunération supplémentaire alors que leur établissement est dans une situation périlleuse !

Dans ce contexte, nous dénonçons cette augmentation toxique avec force et énergie. Les membres de notre majorité veulent savoir quelles initiatives le Gouvernement compte prendre pour la faire annuler et s'il souhaite engager une action contre les rémunérations abusives perçues par les anciens dirigeants de la banque Dexia. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le député, je connais bien – « hélas ! », allais-je dire – le dossier DEXIA, qui m'a beaucoup occupé beaucoup depuis que j'ai été nommé ministre de l'économie et des finances.

M. Bernard Deflesselles. Cela ne s'est pas vu !

M. Pierre Moscovici, ministre . Il a fallu, d'abord, gérer le plan de résolution du groupe. Il faut aussi traiter la question des prêts toxiques, j'y suis particulièrement sensible. Dans ces conditions, en effet, je comprends tout à fait la réprobation que vous inspire l'annonce de l'augmentation de rémunération pour des dirigeants devenus mandataires sociaux.

M. Michel Lefait. Il faut l'interdire !

M. Pierre Moscovici, ministre . Prise par le conseil d'administration de DEXIA, cette décision n'est pas le fruit d'une concertation. Évidemment, comme vous l'avez rappelé, je considère qu'il s'agit là d'une décision pour le moins inappropriée et même difficilement compréhensible. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

C'est la raison pour laquelle j'ai immédiatement pris contact avec mon homologue belge, M. Geens. Puisque l'État belge et l'État français sont l'un et l'autre actionnaires de DEXIA, nous demandons ensemble qu'une nouvelle réunion des instances de gouvernance du groupe puisse se tenir rapidement, pour revenir sur cette décision incompréhensible, et pour que s'appliquent les décisions que nous avons prises à propos des rémunérations dans le secteur public.

Certes, les représentants des deux États n'ont pas à eux seuls la majorité dans ce conseil d'administration. Mais je veux croire que, face à la réprobation qui s'exprime sur les bancs de cet hémicycle, au Parlement belge et, plus largement, dans l'opinion, on comprendra que, quand un groupe est soumis à un plan de résolution, quand il cause des problèmes, quand la collectivité est sollicitée, alors il faut revenir en arrière. Voilà quelle est la position très ferme que je défendrai, avec le Gouvernement belge, je vous l'assure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Données clés

Auteur : M. Sébastien Pietrasanta

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Banques et établissements financiers

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 janvier 2014

partager