Question au Gouvernement n° 18 :
pouvoir d'achat

14e Législature

Question de : M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste, républicain et citoyen

Question posée en séance, et publiée le 18 juillet 2012

COLLECTIF BUDGÉTAIRE

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
M. Bruno Le Roux. Monsieur le Premier ministre, depuis votre prise de fonction, vous avez engagé la France dans la voie du redressement et de la justice. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Votre tâche est rude. La dette publique a explosé, le chômage touche aujourd'hui plus de 10 % des actifs, notre industrie souffre de ne pas avoir été protégée tandis que des dossiers ont été cachés, mal évalués et mal mis en oeuvre durant de nombreux mois alors que le redressement et l'aide aux entreprises étaient nécessaires. Je pense également aux services publics qui ont aussi été très largement mis à mal, pillés, saccagés, notamment l'éducation nationale.
Aujourd'hui, ceux qui ont causé ce désastre se croient autorisés à jouer les donneurs de leçons. Nous n'acceptons pas ce rôle qui, jour après jour, fait de notre enceinte le lieu de préparation d'un congrès à l'UMP plutôt que de la participation au nécessaire redressement de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Aujourd'hui, notre seule règle d'or, c'est la justice. Votre collectif budgétaire, monsieur le Premier ministre, en est le symbole même...
M. Jean-François Lamour. Ah non !
M. Bruno Le Roux. ...avec sa mesure prioritaire : l'abrogation de la TVA sociale. Je le dis ici, ce sont 12 milliards d'euros que nous remettons aujourd'hui au service du pouvoir d'achat des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Que chacun prenne la mesure de ce qu'aurait représenté ce prélèvement : une semaine de travail effectuée pour un couple ayant un salaire moyen. C'est ce qui aurait été perçu demain s'il y avait eu cette mesure.
M. Jacques Lamblin. C'est faux !
M. Bruno Le Roux. Nous vous félicitons, monsieur le Premier ministre, de rendre aujourd'hui du pouvoir d'achat aux Français dès le début de ce collectif budgétaire (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et nous vous demandons - c'est ma question - de confirmer ici, devant la représentation nationale que la justice, le pouvoir d'achat et le respect des Français sont aujourd'hui les marqueurs différents de ce qui a été la loi TEPA voilà cinq ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le président Bruno Le Roux, vous avez bien fait de rappeler ce qui figure dans la loi de finances rectificative. Je vous rappelle, mesdames, messieurs les députés, en particulier ceux de l'opposition, que si nous avons présenté une loi de finances rectificative, c'est parce que nous avons hérité d'une situation qui nous conduit à prendre des mesures pour respecter les engagements du Président de la République, c'est-à-dire pour retrouver l'équilibre et la maîtrise de nos comptes publics.
Cela ne se fera pas en une fois, mais par étapes, et nous commençons dès maintenant, en limitant le déficit budgétaire à 4,5 % en 2012 et à 3 % pour 2013, et en prévoyant le retour à l'équilibre à la fin du quinquennat. C'est un effort très important, mais nécessaire au redressement du pays. Sinon, les 600 milliards de dette supplémentaire que nous avons trouvés en arrivant, ce sont les générations futures qui devront le payer, et nous n'acceptons pas que nos enfants et nos petits-enfants paient la facture ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je sais que l'exercice est difficile et je fais toute confiance aux députés de la majorité pour contribuer à trouver la bonne réponse avec le Gouvernement sur la base des propositions que nous avons faites. Il s'agissait de trouver 7,5 milliards d'euros, pour rester dans l'épure des 4,5 %. Nous l'avons fait en décidant d'un nouveau gel des dépenses publiques de 1,5 milliard - ce n'est pas facile, car c'est un effort très important en matière de dépenses -, tout en respectant les priorités. La seule dépense supplémentaire, ce sont 800 millions d'euros consacrés à l'éducation afin de parer aux difficultés de la prochaine rentrée scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C'était un engagement du Président de la République qui s'inscrit dans une volonté de reconstruction de notre système éducatif. Les priorités sont claires et nous allons nous y tenir.
Pour les autres dépenses, cela se fait par redéploiement pour Pôle emploi, de même que pour l'allocation de rentrée scolaire. Et s'agissant de la mesure ramenant l'âge de la retraite à soixante ans, elle est également financée. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Pour le reste, il fallait demander un effort et nous l'avons demandé en le fondant sur la justice...
Un député du groupe UMP. Non, sur l'impôt !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. ...et sur l'efficacité économique.
Vous venez de le dire, monsieur le président Le Roux : l'opposition oublie de préciser que la mesure prise par le précédent gouvernement et la précédente majorité revenait en fait à 12 milliards d'euros de prélèvements sur les classes populaires et sur les classes moyennes par l'augmentation de la TVA. Nous y mettons fin et j'appelle l'ensemble de l'Assemblée nationale à nous appuyer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
On me dit qu'il y a d'autres prélèvements. Oui, il y en a d'autres, mais sur les grandes entreprises - et pas sur les PME -, sur les grands groupes pétroliers ou bancaires et aussi sur les familles les plus aisées avec le rétablissement de l'impôt sur la fortune - qui touche 1 % des contribuables - et la fiscalité sur le patrimoine. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Cela ne concerne que la transmission des hauts patrimoines : 90 % des ménages ne sont pas concernés. Notre projet de loi de finances rectificative est une proposition efficace sur le plan économique et juste sur le plan social.
M. Philippe Meunier. Et les heures supplémentaires ?
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. S'agissant des heures supplémentaires, soyons clairs. Pendant cinq ans, mesdames et messieurs les députés de droite, les députés devenus aujourd'hui la majorité de l'Assemblée nationale, comme d'ailleurs l'ensemble des organisations syndicales de salariés, ont dit que cette mesure ne faisait que favoriser le chômage et n'encourageait pas l'embauche. C'est la réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - " C'est faux ! " sur les bancs du groupe UMP.)
Quand on sait que l'heure supplémentaire coûte moins cher à un employeur que l'heure normale, croyez-vous que l'employeur soit incité à embaucher ? Bien sûr que non ! Il fallait mettre fin à cette mesure anti-emploi (" Très bien ! " sur les bancs du groupe SRC) dont certains ont bénéficié du fait de la défiscalisation.
Concernant les cotisations patronales, la mesure ne s'appliquera qu'aux entreprises de plus de vingt salariés. Mais pour ce qui est de la défiscalisation, la règle ne s'appliquera que lorsqu'elle sera votée par le Parlement - pas depuis le 1er janvier, c'est une évidence ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Pour conclure, j'en appelle au bon sens des Français : cette mesure n'empêchera pas les heures supplémentaires, qui sont payées plus cher que les heures normales - 25 % de plus. Lorsqu'un employeur pourra proposer des heures supplémentaires à ses salariés, s'ils les font, ils seront donc mieux payés.
En outre, la fiscalisation ou la défiscalisation que vous défendez coûtait au budget de l'État, c'est-à-dire à l'ensemble des contribuables, 5 milliards d'euros. Lorsque la crise s'est déclenchée en Allemagne, le Gouvernement a pris l'initiative d'encourager les partenaires sociaux à négocier pour maintenir l'emploi, pour pratiquer le chômage partiel et pour faire en sorte qu'avec la même somme et même un peu plus, les salariés se forment.
Telle est notre politique, dans la poursuite de la conférence sociale. Préserver l'emploi, voilà la priorité du Gouvernement ! (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent.)

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Roux

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique économique

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 juillet 2012

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