Question au Gouvernement n° 1883 :
peines

14e Législature

Question de : M. Éric Ciotti
Alpes-Maritimes (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 28 mai 2014


RÉFORME PÉNALE

M. le président. La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Éric Ciotti. Monsieur le Premier ministre, au mois de juillet 2013, alors que vous étiez ministre de l'intérieur, vous preniez votre plume pour écrire au Président de la République afin de le mettre en garde contre les dangers que recelait le projet de loi de réforme pénale de Mme Taubira.

Plusieurs députés du groupe UMP . Bravo !

M. Éric Ciotti. Vous êtes aujourd'hui Premier ministre, et vous venez de présenter ce texte à la représentation nationale, nous avons commencé à en débattre ce matin en commission des lois. Ce texte, vous le jugiez alors légitimement comme dangereux, vous évoquiez une légitimité fragile, et vous le présentez malgré les risques et les menaces qu'il fait peser sur l'augmentation de la délinquance dans notre pays.

Monsieur le Premier ministre, vous avez cédé à la branche la plus extrême de votre majorité. Cela est grave. Ce texte aura pour conséquence d'affaiblir toute forme de sanction pénale dans notre pays et aboutira inexorablement à une hausse de la courbe de la délinquance.

Plusieurs députés du groupe SRC . C'est faux !

M. Éric Ciotti. Nous vous mettons en garde solennellement contre les dangers de ce texte. Nous vous demandons instamment de réfléchir avant de présenter ce texte dans cet hémicycle.

M. Guy Geoffroy. Retirez-le !

M. Éric Ciotti. Notre pays n'a pas besoin de tensions, notre pays est suffisamment en souffrance pour ne pas exacerber les haines et éviter de faire en sorte que la délinquance ne redevienne un sujet au cœur des préoccupations de nos concitoyens.

M. Jean-Claude Perez. Et la délinquance financière ?

M. Éric Ciotti. Monsieur le Premier ministre, il est de votre devoir, parce qu'il en va de la sécurité de nos concitoyens, de retirer ce texte dangereux qui menace la sécurité des Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je ne sais pas si demain je répondrai à autant de questions, mais je veux répondre à la vôtre, monsieur Ciotti, parce que je l'attendais depuis déjà plusieurs semaines.

Quelles que soient les majorités dans le pays, la délinquance est présente depuis des années, les violences sur les personnes ont augmenté depuis trente ans, les crimes et les violences à caractère sexuel sont une réalité. Et il y a une autre réalité, c'est le poids de la récidive.

La question de la récidive est une question majeure parce qu'elle brise la confiance entre les citoyens et l'État et la justice. Sur cette question, toutes les lois votées durant les quinquennats précédents, notamment le dernier, ont-elles réglé ce problème essentiel ? (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC.) Est-ce que les peines plancher on réglé ce problème ? (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Des arbitrages ont été rendus par le Président de la République en août dernier après un débat interministériel normal et logique auquel nous avons travaillé ensemble avec Christiane Taubira. Ces arbitrages forment l'équilibre d'un texte, et le Gouvernement souhaite que cet équilibre soit totalement préservé, parce qu'il y va de l'efficacité.

Ce qui m'intéresse, et ce qui intéresse le ministre de l'intérieur comme la garde des sceaux, c'est l'efficacité. Nos prisons n'ont jamais été aussi pleines ni aussi remplies. Est-ce pour autant que nous avons gagné en efficacité dans la lutte contre la délinquance ?

Plusieurs députés du groupe SRC . Non !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Ces questions doivent être posées de manière apaisée, monsieur Ciotti, afin de voir comment les uns et les autres peuvent converger sur ce sujet. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt l'interview du sénateur Lecerf, membre de l'UMP, publiée il y a quelques jours dans un quotidien du matin. Il déclarait, sur la loi pénale, qu'elle ne méritait pas les critiques et les caricatures que vous avez malheureusement rappelées, et que 90 % de ce texte méritait d'être pris en compte.

M. Jacques Myard. Un sénateur, ça ne compte pas ! (Sourires.)

M. Manuel Valls, Premier ministre. Alors, monsieur Ciotti, je vous invite avec la garde des sceaux et les parlementaires à construire la réponse la plus efficace dans la lutte contre la récidive. C'est comme cela que nous lutterons contre la délinquance, c'est comme cela que nous ferons baisser les extrémismes, c'est comme cela que nous ne jouerons pas sur ce sujet-là !

M. Philippe Meunier. Nos amendements ne sont pas adoptés !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Ciotti, je suis fier, en tant que Premier ministre, d'avoir au sein de mon Gouvernement une grande figure de la gauche, qui a subi des attaques inacceptables au cours de ces dernières années. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Vives exclamations sur les bancs de l'UMP.) Oui, inacceptables ! (Mêmes mouvements.)

Chacun s'honorerait de ne pas transformer le débat qui commence aujourd'hui à l'Assemblée en un débat absurde et caricatural…

M. Philippe Meunier. C'est insultant !

M. Manuel Valls, Premier ministre . …entre la droite et la gauche, mais à faire œuvre d'intérêt général parce que c'est ce que les Français attendent, et ce dont la République a plus que jamais besoin ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

M. Philippe Meunier. C'est insultant !

M. le président. Monsieur Meunier, je vous rappelle au respect de notre règlement. Comme je viens de vous l'écrire, j'appliquerai maintenant celui-ci à la lettre. Je n'accepte plus ces cris dans l'hémicycle ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je vous le dis !

M. Christian Jacob. Dites la même chose au Gouvernement !

Données clés

Auteur : M. Éric Ciotti

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 28 mai 2014

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