pouvoirs publics
Question de :
M. Nicolas Dupont-Aignan
Essonne (8e circonscription) - Non inscrit
Question posée en séance, et publiée le 16 juillet 2014
VALEURS DE LA RÉPUBLIQUE
M. le président. La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan, au titre des députés non inscrits.
M. Nicolas Dupont-Aignan. Monsieur le Premier ministre, j'avais imaginé vous poser une question sur l'état de nos forces de défense, mais M. Meunier vous a déjà interrogé à ce sujet. Votre manière de répondre me conduit à vous demander très directement pourquoi, à chaque fois que l'opposition pose une question précise, et gênante par essence, vous vous réfugiez derrière les « valeurs de la République » et le « rassemblement des Français », en accusant l'opposition de « diviser ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) S'opposer, ce n'est pas diviser, c'est participer au débat démocratique. La République que vous invoquez à tout bout de champ, nous la défendons tous et nous y adhérons tous. L'idéal du rassemblement des Français, nous le voulons tous. Mais, monsieur le Premier ministre, les mots seuls peuvent-ils permettre de défendre la République ? Les actes de votre Gouvernement sont-ils bien là pour ce faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Il n'y a pas de République quand la police est découragée. Dans notre département de l'Essonne, que vous connaissez bien, vous allez supprimer, cette année même, une centaine d'agents. Les policiers sont molestés, insultés, jamais défendus. Il n'y a pas de République quand la justice est laxiste, et la loi Taubira que vous venez de voter va considérablement aggraver la situation. Vous le savez tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Des milliers de délinquants vont être libérés de prison ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est cela, la réalité du pays ! C'est cela que vivent nos concitoyens ! Il n'y a pas de République quand les frontières sont des passoires et quand les communautarismes se développent. Il n'y a pas de rassemblement possible quand l'économie est à l'arrêt, quand les entreprises n'embauchent plus et quand les jeunes dans les quartiers sont oisifs. Voilà la réalité du pays !
Les Français se posent une question simple, monsieur le Premier ministre, et plus encore après l'intervention hier du Président de la République : quand allez-vous sortir de votre bulle et du déni permanent de réalité ? Quand allez-vous voir ce que vivent nos concitoyens, leurs souffrances et leurs difficultés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, je fais appel et référence aux valeurs de la République, de la nation et de la patrie, parce que je considère avec beaucoup que les républicains ont trop souvent oublié ces valeurs et ces rappels. En les laissant aux autres, à ceux qui ont de notre pays une vision pessimiste, décliniste et le voudraient refermé sur lui-même, nous n'avons pas rendu service aux valeurs qui sont les nôtres. Souffrez donc que je continue à les évoquer, car je pense qu'elles permettent un rassemblement plus que jamais nécessaire face à la crise économique que nous traversons depuis des années, face à la crise de confiance que j'ai rappelée à l'occasion de mon discours de politique générale et face à la crise d'identité de notre pays – ce sont là des débats qui méritent, bien évidemment, une confrontation. Pour avoir été moi-même dans l'opposition, je ne dénierai jamais le droit à l'interpellation et à la critique. Il serait absurde de le faire.
Toutefois, après avoir tiré les leçons de ceux qui ont été pendant plusieurs années dans l'opposition, je crois que la caricature, la facilité et la volonté permanente de diviser sur les mêmes sujets ne sont pas acceptables. D'ailleurs, vous venez d'en faire l'illustration : comment expliquer que ce que vous appelez la loi Taubira ouvre les portes des prisons ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Bernard Accoyer. C'est la vérité !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Le débat à l'Assemblée nationale et au Sénat, de même que les prises de position des uns et des autres ont montré qu'il serait temps que nous cessions de nous diviser sur les questions de sécurité et de justice. Nous avons ô combien de fois traité ces sujets, notamment avec la multitude de lois que vous avez votées quand nous étions dans l'opposition et vous dans la majorité, et qui n'ont pas servi à grand-chose. Dans les domaines de la justice et de la sécurité, face à la violence que connaît notre société et face à l'échec lié à la récidive, plutôt que des interpellations, comme vous le dites avec raison, il faut des actes. C'est ce gouvernement, c'est cette majorité, c'est ce Président de la République qui ont précisément permis de mettre fin à la saignée que les administrations de la police, de la gendarmerie et de la justice ont connue. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C'est ce Président de la République, ce gouvernement et cette majorité qui ont permis la création de centaines de postes de policiers et de gendarmes, mais également dans la justice, parce que nous faisons face à une situation intolérable dans nos prisons et qu'il faut un système de probation digne de ce nom pour appliquer la loi pénale.
Monsieur le député, vous avez raison, les appels à la République, à la nation et à la France doivent être suivis par des actes. Ces actes, nous les accomplissons, forts d'une conviction profonde qui ne me lâchera jamais : le rassemblement autour de nos valeurs. Je souhaite que ce soit la gauche qui, plus que jamais, porte ces valeurs de République et de nation ; je ne veux pas les laisser aux extrêmes et à ceux qui ont été trop proches du Front national dans leur parcours politique. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
Auteur : M. Nicolas Dupont-Aignan
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 juillet 2014