Question au Gouvernement n° 2226 :
manifestations

14e Législature

Question de : M. Bruno Le Roux
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - Socialiste, républicain et citoyen

Question posée en séance, et publiée le 29 octobre 2014


DRAME DE SIVENS

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Bruno Le Roux. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le Premier ministre, samedi dernier, sur le lieu-dit du Testet, dans le Tarn, dans la circonscription de Jacques Valax, un jeune homme de vingt et un ans, Rémi Fraisse, a trouvé la mort lors de violents affrontements entre des manifestants et les forces de l'ordre. Je tiens à présenter ici les condoléances de mon groupe politique, et au-delà, je le pense, de toute la représentation nationale, à sa famille et à ses proches. Nous devons faire la lumière sur les circonstances de ce drame. La justice mène l'enquête sur les conditions du décès de Rémi Fraisse, et j'espère que nous comprendrons très vite ce qui s'est passé cette nuit-là afin que les responsabilités soient établies.

Ce drame ne doit pas être accepté, ni banalisé, mais il ne doit pas être utilisé non plus. Nous sommes dans un État de droit : cela implique que la loi soit respectée et que la justice puisse faire son travail librement et rapidement. Nous avons une exigence de vérité et de transparence dans les faits, nous avons une exigence de justice.

Dans un État de droit, chacun doit respecter toutes les règles qui organisent la démocratie. Lorsqu'un projet a passé les stades de la concertation, des décisions, voire des recours, la violence n'est à aucun moment la réponse à apporter à une situation qui ne conviendrait pas à quelques-uns. Ce n'est pas ici que nous déterminerons les faits ni les responsabilités. Ce n'est pas à nous de pointer du doigt, d'attiser les tensions ou de raviver les clivages. J'en appelle donc à la responsabilité de chacun, et à la compassion de tous.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire ici comment l'État compte agir pour élucider au plus vite la mort de ce jeune manifestant ? Pouvez-vous nous confirmer la volonté de l'État d'apporter toutes les réponses à ce drame ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, et sur plusieurs bancs des groupes UDI et UMP.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Le Roux, la mort de Rémi Fraisse, jeune homme de vingt et un ans, sur le site de Sivens, est tragique. Ce qui s'impose en premier lieu à tous, vous l'avez rappelé, c'est la compassion pour la douleur de sa famille ; c'est la solidarité. Nous témoignons tous notre solidarité à cette famille. Comme vous le savez, le Président de la République a eu tôt ce matin le père de Rémi Fraisse au téléphone, pour lui adresser ce même message.

Vérité, vous l'avez dit, transparence, dignité et responsabilité : voici les messages que je souhaite à mon tour faire passer. Il me semble que nous devrions nous accorder sur ces principes simples. Quand la mort survient dans de telles circonstances, les principes de l'État de droit commandent que l'on recherche la vérité. La justice a été saisie. Elle a désormais besoin, faut-il le rappeler, de sérénité pour accomplir les actes d'enquête et d'expertise qui sont indispensables. Je ne doute pas un seul instant qu'elle se prononcera en toute indépendance.

Monsieur Le Roux, l'État s'engage on ne peut plus clairement à ce que la lumière soit faite. Rien ne doit être caché : c'est la position du Gouvernement, et plus particulièrement celle de M. le ministre de l'intérieur, à qui je rends hommage pour son action et son sang-froid. Je n'accepte pas, et je ne le ferai jamais, les mises en cause et les accusations qui ont été proférées en-dehors de cet hémicycle à l'encontre du ministre de l'intérieur, qui a toute ma solidarité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, sur de nombreux bancs des groupes UDI et UMP et sur quelques bancs du groupe écologiste.)

Quant aux forces de l'ordre, je tiens à rappeler qu'elles font un travail très difficile et sont souvent confrontées à une violence extrême. C'est une réalité. Je le dis à la représentation nationale : je n'accepterai pas que l'on mette en cause, avant même que l'enquête soit conclue, l'action des policiers et des gendarmes, qui ont compté de nombreux blessés dans leurs rangs. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP, UDI et UMP.)

La France est un pays démocratique, un État de droit où le droit de manifester, de s'opposer, est garanti - c'est la moindre des choses. Mais je n'accepterai pas les violences : ce qui s'est passé à Gaillac, ce qui s'est passé à Albi, ce qui s'est passé dans votre ville, monsieur le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, à Nantes, est tout aussi inacceptable. Il n'y a pas de place, dans notre République, dans notre démocratie, pour les casseurs. Là aussi, justice doit être faite ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP, UDI et UMP et quelques bancs du groupe écologiste.)

Enfin, il est de mon devoir de chef du gouvernement d'en appeler à l'apaisement. Vous l'avez fait, vous aussi, monsieur le président Le Roux. Face à un tel drame, chacun doit faire preuve de responsabilité et de dignité. C'est la seule attitude possible. Quand on est un responsable politique, quand on est un élu, on ne peut pas faire de déclarations à l'emporte-pièce. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC, RRDP, UDI et UMP.) On ne peut pas désigner des responsables alors même que la justice n'a pas terminé son travail.

La mort d'un homme dépasse tous les clivages, toutes les oppositions. J'appelle à la tempérance et à la décence, par respect pour ce jeune homme et pour sa famille. C'est ainsi que nous serons utiles, et que face à ce drame, nous rassemblerons tous les Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, plusieurs bancs des groupes UMP et UDI et quelques bancs du groupe écologiste.)

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Roux

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 octobre 2014

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