politiques communautaires
Question de :
M. Nicolas Sansu
Cher (2e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Question posée en séance, et publiée le 18 décembre 2014
TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES
M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. Nicolas Sansu. Monsieur le ministre des finances, il y a un peu plus de quinze ans, la gauche rassemblée portait la voix d'une taxe sur les transactions financières, s'appuyant sur les travaux de James Tobin, à l'origine d'un formidable mouvement citoyen pour un autre partage des richesses.
Le double objectif de cette taxe était, et demeure, de soutenir les pays en développement et de réguler un monde financier complètement fou. Cette volonté commune de dizaines d'ONG, de l'association ATTAC, des partis politiques progressistes en Europe et des forces syndicales s'est heurtée à des pratiques détestables et mortifères de la part des banques et des établissements financiers.
La réalité, c'est que la finance, loin d'avoir été mise au pas, continue ses pratiques délétères, où paradis fiscaux et produits dérivés sont encouragés, au détriment de l'économie réelle. Il est vrai que la nomination du chef des voleurs dans l'affaire Luxleaks à la tête de la Commission européenne conforte les apprentis sorciers, qui sont à l'origine de la crise, dans l'idée que tout est permis.
Aujourd'hui, le courage serait de s'attaquer vraiment à cet « ennemi sans visage ». Une véritable taxe sur les transactions financières, étendue à tous les produits dérivés, et une séparation effective des banques sont deux outils indispensables pour y parvenir. De toutes parts – ONG, médias, négociateurs des autres pays –, il nous revient que la France est aujourd'hui l'un des plus grands freins à la régulation et à la mise en œuvre d'une taxe sur les transactions financières ambitieuse et efficace. Une étude a pourtant montré qu'elle pourrait rapporter à la seule France entre 10 et 24 milliards d'euros par an.
Monsieur le ministre, ce n'est pas la gauche grecque qui menace l'Europe et son système financier. C'est le système capitaliste financier européen et ses pratiques irresponsables qui menacent aujourd'hui les peuples. Allez-vous enfin cesser de décourager nos partenaires européens, engager la France pour porter auprès d'eux la mise en œuvre d'une véritable taxation des transactions financières incluant tous les produits dérivés, et lever les freins à une véritable séparation bancaire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et écologiste et sur quelques bancs du groupe SRC.)
M. André Chassaigne. Excellent !
M. le président. La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.
M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le député Nicolas Sansu, je vous remercie de votre question. Vous évoquez un sujet important, qui n'est pas entré dans le débat public aujourd'hui, mais il y a de nombreuses années, et dont nous souhaiterions tous qu'il quitte le débat public pour entrer enfin dans la réalité publique. Soyons au moins d'accord et rassemblés sur ce point.
Permettez-moi de vous rappeler clairement et fermement la position de la France, telle qu'elle a été exprimée par ce gouvernement, par le Président de la République et par les Premiers ministres qui se sont succédé au cours de ces dernières années. La France souhaite une taxation des transactions financières sur tous les produits dans l'ensemble des vingt-huit pays de l’Union européenne. Telle est notre position. Telle était aussi, du reste, celle de la Commission européenne, dont nous avons soutenu la proposition.
Qui s'y est opposé ? Ce n'est pas la France, contrairement à ce que vous laissez penser, mais la Grande-Bretagne, la Hollande, et la Suède qui, à l'époque, avait un autre gouvernement. C'est la raison pour laquelle ce que nous souhaitions tous, à savoir une taxe sur toutes les transactions financières applicable dans les vingt-huit pays, n'a pas pu voir le jour. Depuis lors, la France essaie de faire avancer cette belle idée – et j'y travaille aujourd'hui, en tant que ministre des finances. Le nombre de pays concernés est plus limité, puisque nous sommes onze, dans le cadre de ce que l'on appelle une coopération renforcée, mais la Grande-Bretagne, principale place financière de l’Union européenne, n'en fait pas partie. Nous essayons de faire avancer cette belle idée, pour qu'elle ne soit pas seulement une belle idée.
M. André Chassaigne. Ce sont des paroles !
M. Michel Sapin, ministre . J'ai fait des propositions pour avancer dans ce sens, et nous continuons d'y réfléchir avec nos partenaires italiens, allemands et espagnols, notamment. Nous avons décidé qu'avant le 1er janvier 2016, une taxe sur les transactions financière serait mise en œuvre pour les onze pays.
M. André Chassaigne. Une toute petite taxe !
M. Michel Sapin, ministre . Nous l'avons décidé, nous proposons, nous avançons. Et dès janvier prochain, je prendrai une nouvelle initiative pour faire en sorte que cette belle idée devienne une réalité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
M. André Chassaigne. Ce sont des paroles !
Auteur : M. Nicolas Sansu
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Finances et comptes publics
Ministère répondant : Finances et comptes publics
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 décembre 2014