DOM-ROM : Guyane
Question de :
M. Gabriel Serville
Guyane (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Question posée en séance, et publiée le 20 mai 2015
OCTROI DE MER
M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. Gabriel Serville. Madame la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, les débats qui se sont déroulés la semaine dernière au Sénat ont encore démontré que l'octroi de mer constitue une part importante des ressources des communes d'outre-mer. Censée être reversée intégralement aux communes, en Guyane, cette recette est pourtant ponctionnée de 27 millions d'euros par an au profit du conseil général. Il s'agit là d'une exception locale extrêmement préjudiciable pour des communes déjà particulièrement fragilisées, qui plus est dans un contexte de baisse des dotations octroyées aux collectivités.
Cette situation, foncièrement anticonstitutionnelle, dure depuis quarante-deux ans. Elle est manifestement contraire à l'autonomie financière qui découle du principe de libre administration des collectivités territoriales. Or, selon la loi, l'État ne peut en aucun cas supprimer des ressources fiscales des collectivités sans les compenser. C'est pourtant ce qu'il fait chaque année, de façon discriminatoire, sur cette partie du territoire.
À titre d'exemple, pour la seule année 2015, la commune de Matoury, dont je suis le maire, perd 3,3 millions d'euros, soit environ 10 % de son budget de fonctionnement, tandis que nous devons éponger nos dettes et répondre aux besoins croissants de la population. En l'espèce, cette ponction d'une partie des fonds de la dotation de garantie destinée aux communes nous empêche tout simplement de fournir aux contribuables les services publics auxquels ils ont droit.
Madame la ministre, cette discrimination envers des communes déjà classées parmi les moins bien loties de France ne saurait perdurer. C'est pourquoi l'association des maires de Guyane ainsi que toutes les communes guyanaises envisagent d'engager une action en responsabilité à l'encontre de l'État, devant le tribunal administratif de Cayenne, dans le cadre d'un recours de plein contentieux. Aussi, je vous remercie de bien vouloir nous éclairer, par anticipation, quant aux pistes de solutions qui seraient susceptibles de réparer ce très lourd préjudice. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le député, il est vrai que George Pau-Langevin est en train de défendre, en ce moment même au Sénat, un texte qui concerne non seulement l'octroi de mer, mais aussi la Guyane.
Je rejoins votre analyse : cela fait effectivement des dizaines d'années que cette situation perdure. L'octroi de mer n'est pas destiné à assurer une certaine égalité, ce qui ne serait pas possible, mais à aider les entreprises qui souffrent de leur éloignement et de la très faible taille de leur marché domestique en imposant les importations.
Dans le contexte que vous décrivez, qui dure depuis des dizaines d'années, il a d'abord été décidé de renforcer la part des communes dans la répartition des recettes de l'octroi de mer. Il est important de préciser à l'ensemble des communes de Guyane que la part qui leur est versée est passée de 63 millions d'euros en 2008 à 76 millions d'euros en 2014. De même, nous essayons d'aider davantage la Guyane à travers la dotation globale de fonctionnement, puisque la dotation par habitant va dépasser 57 euros, un montant supérieur à celui de l'ensemble des départements d'outre-mer concernés.
Face à cette situation, outre le pacte d'avenir que le Premier ministre a demandé d'élaborer spécifiquement pour la Guyane, on évoque aujourd'hui l'idée de créer une collectivité unique qui permettrait de rééquilibrer, par l'intermédiaire des aides aux entreprises, la répartition de l'octroi de mer.
On a souvent avancé que la part d'octroi de mer reversée aux départements devait aider ces derniers à soutenir les populations les plus en difficulté, donc à alléger l'action des communes. Mais je pense qu'il faut appréhender ce sujet dans sa globalité et que, si nous travaillons à la création d'une collectivité unique tout en examinant l'évolution de la DGF dans le cadre de la réforme que Mme Pires Beaune porte, avec d'autres, dans cette assemblée, nous réussirons, monsieur le député, à être plus justes.
Auteur : M. Gabriel Serville
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Décentralisation et fonction publique
Ministère répondant : Décentralisation et fonction publique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 mai 2015