Question au Gouvernement n° 2909 :
gouvernement

14e Législature

Question de : M. Christian Jacob
Seine-et-Marne (4e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 21 mai 2015


CONDUITE DE LA POLITIQUE GOUVERNEMENTALE

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, la perte à répétition de votre sang-froid et votre manière de gouverner alternant entre manipulation, louvoiement et brutalité inquiètent de plus en plus les Français ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) J'en prendrai trois exemples.

D'abord, la gestation pour autrui. Vous avez refusé à l'automne dernier que la France fasse appel de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme. Sur cette question d'éthique majeure, qui touche à la marchandisation du corps des femmes, vous encouragez de fait la violation de la loi de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.) Vous jouez clairement le pourrissement ; permettez-moi de vous dire que sur ce sujet, c'est particulièrement indigne !

Mme Claude Greff. C'est honteux !

M. Christian Jacob. Les quotas de migrants, ensuite. Vous tentez de nous faire croire que vous êtes contre les quotas ; dans le même temps, vous demandez au ministre de l'intérieur de négocier la répartition solidaire des migrants. Expliquez-nous la différence entre une répartition solidaire des migrants et des quotas : il n'y en a pas ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Vous manipulez l'opinion publique et vous mentez aux Français ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC. – « Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Veuillez écouter la question, s'il vous plaît !

M. Christian Jacob. Dernier exemple : votre gestion de la réforme du collège. La publication ce matin du décret entérinant celle-ci est une honte ! C'est une honte, car cette publication affiche un double mépris : mépris des enseignants, qui s'inquiètent de l'émergence d'un collège de la médiocrité (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ; mépris de notre assemblée, où vous avez refusé que se tienne un débat démocratique. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Brigitte Bourguignon. Quelle est la question ?

M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, la brutalité est en politique l'arme des faibles. Or publier ce décret en pleine nuit est un acte politique brutal. Vous le paierez cher ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Michel Vergnier. Pas de menaces !

M. Christian Jacob. Nous vous demandons l'abrogation du décret et la tenue dans les plus brefs délais d'un véritable débat démocratique ici, dans l'hémicycle, projet contre projet. Nous vous mettons au défi de le faire ! (Les députés du groupe UMP et quelques députés du groupe UDI se lèvent et applaudissent vivement l'orateur.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président Jacob, je vous réponds bien volontiers. En vous écoutant, je me disais qu'en matière de violence, de perte de ses nerfs et de démagogie, vous aviez beaucoup à apprendre aux autres ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Meunier. C'est l'hôpital qui se moque de la charité !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Et ce n'est pas la première fois – y compris lors de moments solennels pour l'Assemblée nationale.

Vous avez raison : chacun doit être à la hauteur de l'exigence des Français.

M. Christian Jacob. C'est ce qu'on vous demande !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Depuis 2012, parce que c'est une priorité du Président de la République…

M. Guy Geoffroy. Sa priorité, c'est sa réélection !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …et, surtout, parce que c'est une exigence des Français, nous avons engagé la refondation de l'école. Un long débat a eu lieu ici même, à l'Assemblée nationale, à l'occasion de l'examen du projet de loi présenté par Vincent Peillon.

C'est notre devoir, mais aussi notre honneur, que d'engager cette réforme attendue et nécessaire. On ne peut accepter l'échec subi par des dizaines de milliers d'enfants – échec qui est d'ailleurs souvent de votre responsabilité, car vous avez supprimé 80 000 postes d'enseignant, vous avez saccagé la formation des enseignants et vous avez décidé de ne plus faire de l'école de la République une priorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Eh bien, nous, nous avons décidé, monsieur Jacob, d'en faire une priorité !

Après ce débat, il était de notre devoir de mettre en œuvre la refondation de l'école.

M. Christian Jacob. On voit le résultat !

Mme Claude Greff. Tout le monde dans la rue !

M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est pourquoi, comme vient de le rappeler la ministre de l'éducation nationale, la réforme des collèges a été adoptée à une très large majorité par le Conseil supérieur de l'éducation.

M. Franck Gilard. Quelle est sa légitimité ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Il y a eu, dans cet hémicycle, des questions et des réponses ; il y a eu, bien sûr, de la concertation avec l'ensemble des partenaires ; il y a eu, hier, un mouvement – et il est de notre responsabilité d'écouter ceux qui font grève, comme ceux qui ne font pas grève. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Ce que je constate, monsieur le député, c'est que des syndicats, et non des moindres – la Confédération française démocratique du travail et l'Union nationale des syndicats autonomes –, soutiennent la réforme ; les deux fédérations de parents d'élèves aussi ; l'enseignement catholique, de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Deflesselles. Et les autres ?

M. Claude Goasguen. C'est la fin de l'école publique !

M. Manuel Valls, Premier ministre. J'ai la conviction profonde qu'au-delà du débat actuel, l'immense majorité des Français attendent un changement et des réformes. Car ce pays, monsieur Jacob, doit être réformé – en bien des matières, et pas uniquement scolaire. Et il doit être réformé en donnant plus de responsabilités aux acteurs ; cela fait des années que l'on réclame, y compris dans vos rangs, de l'autonomie pour les collèges…

M. Pascal Terrasse. Eh oui !

M. Luc Chatel. Mais pas n'importe laquelle !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …et plus de responsabilités pour les équipes pédagogiques. Ces préoccupations sont au cœur de la réforme présentée par la ministre de l'éducation nationale. Et vous, monsieur Jacob, par démagogie, vous vous opposez à une réforme que vous auriez pu soutenir, et à propos de laquelle M. Chatel a tenu des propos particulièrement justes !

M. Christian Jacob. Vous avez peur du débat !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Au nom d'une opposition frontale et stérile, vous avez décidé de vous y opposer et de rejoindre dans leurs critiques ceux qui sont très éloignés de vos positions.

Car, au fond,…

Mme Claude Greff. Au fond ? Il n'y a rien au fond !

M. le président. Madame Greff, s'il vous plaît !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …si vous aviez à concevoir une réforme ou à publier un décret, que proposeriez-vous ? Évidemment pas ce que réclamaient hier les enseignants qui manifestaient ! Vous proposeriez la même chose que M. Le Maire, c'est-à-dire une école de la sélection, une école qui supprime la deuxième langue vivante, une école qui tourne le dos au principe même de la République, l'égalité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. François Fillon. Mais non !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Ayez donc le courage, non pas de suivre tel ou tel manifestant ou de vouloir – ce qui est assez étrange ! – cogérer le ministère de l'éducation nationale avec tel ou tel syndicat, mais de présenter vos propositions aux Français ; ceux-ci se rendront alors compte de la démagogie qui est la vôtre et de votre volonté de détruire l'école ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Alors oui, monsieur Jacob, nous voulons réformer, et c'est la raison pour laquelle nous avons décidé, avec le chef de l'État et la ministre de l'éducation nationale, de publier ce décret.

M. Sylvain Berrios. En pleine nuit !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Il faut aller vite, parce qu'il faut former les enseignants en vue de la rentrée 2016. Il faut avancer, parce que c'est utile. Ce gouvernement est déterminé à réformer ; nous continuerons à le faire, sur ce sujet comme sur tous les autres, car il y va de l'intérêt des Français. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Données clés

Auteur : M. Christian Jacob

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : État

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 mai 2015

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