commerce extracommunautaire
Question de :
M. Alain Moyne-Bressand
Isère (6e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 25 juin 2015
TRAITÉ DE LIBRE-ÉCHANGE TRANSATLANTIQUE
M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour le groupe Les Républicains.
M. Alain Moyne-Bressand. Monsieur le Premier ministre, nos agriculteurs sont très inquiets et je souhaite ici relayer leurs préoccupations, dans le contexte des négociations sur le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement entre la Commission européenne et les États-Unis.
Ces négociations sont aujourd'hui menées dans le plus grand secret. Elles font l'objet de spéculations diverses, et le report du vote qui devait avoir lieu le 10 juin au Parlement européen a renforcé les inquiétudes. Le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur déclarait, le 8 mai 2015, que les négociations n'avançaient pas. Pourquoi ? Quels sont les points de blocage ? Ces questions sont importantes pour nos agriculteurs.
Avec ce traité, c'est l'avenir et la qualité de notre modèle agricole qui sont en jeu. La loi d'avenir pour l'agriculture d'octobre dernier a surtout apporté des contraintes pour le présent. Les exploitants sont noyés sous les déclarations et les obligations administratives nouvelles. On comprend leur inquiétude, car aucun signal positif n'est à entrevoir. Il suffit par exemple de voir le prix du lait, qui ne cesse de chuter : en janvier 2014, la tonne de lait se vendait 392 euros. Aujourd'hui, on est aux alentours de 300 euros. Et ne dites pas, comme d'habitude, que c'est la faute de l'arrêt des quotas ! Il suffit d'aller un peu sur le terrain pour comprendre qu'il n'en est rien.
Les agriculteurs, en particulier les jeunes, sont catastrophés par le manque de perspectives. De plus en plus d'exploitations, ne trouvant pas de repreneur, sont malheureusement à l'abandon. Aussi, monsieur le Premier ministre, il est important que la représentation nationale soit tenue informée des négociations transatlantiques, de leur calendrier et de leur contenu. Les agriculteurs attendent des réponses. Quelles actions concrètes le Gouvernement français va-t-il mener ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Monsieur le député Alain Moyne-Bressand, je vous prie tout d'abord d'excuser M. Matthias Fekl, qui vient de partir en déplacement avec le Premier ministre en Colombie et en Équateur, et qui m'a demandé de répondre à votre question.
Comme vous l'avez rappelé, le traité transatlantique, ou TTIP – Transatlantic Trade and Investment Partnership – est aujourd'hui en cours de négociation entre l'Union européenne et les États-Unis, et le dixième cycle de négociation s'ouvrira au début du mois de juillet. Pour l'heure, aucun accord n'a donc été signé.
Du reste, il faut être deux pour négocier, or je veux souligner qu'à ce stade, le gouvernement américain demande encore au Congrès de disposer de la Trade promotion authority, c'est-à-dire du mandat qui lui permettra de conduire réellement cette négociation. Cette demande a jusqu'ici été repoussée et va à nouveau être examinée par le Sénat.
Tout au long de ces négociations, la France a formulé des exigences précises et fixé des lignes rouges, notamment au sujet de l'agriculture. D'abord, nous l'avons dit, nous n'intégrerons pas aux négociations les règles relatives à la sécurité sanitaire des aliments – nous refusons les OGM, le bœuf aux hormones et le poulet chloré. De même, nous avons exclu de ces négociations les secteurs très sensibles que sont l'audiovisuel et la protection des données personnelles.
S'agissant, deuxièmement, de la méthode et de la transparence à laquelle vous avez appelé, ce sont là des exigences absolues pour nous. Le mandat de négociation donné à la Commission européenne est désormais public : c'était une demande forte de la France, mais il faut aller plus loin, en permettant l'accès aux documents de négociation dans les capitales des États membres. Les États-Unis s'y opposent et nous proposent de donner accès à ces documents dans leurs ambassades. Cette proposition est absolument inacceptable, puisque c'est à chacun des vingt-huit États membres qu'il reviendra de donner son accord, puis à chaque Parlement, ainsi qu'au Parlement européen, de ratifier un éventuel accord.
Sur la transparence, comme sur les lignes rouges, nous partageons vos préoccupations, et nous les défendons.
Auteur : M. Alain Moyne-Bressand
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politiques communautaires
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 juin 2015