politique fiscale
Question de :
M. Alain Suguenot
Côte-d'Or (5e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 29 octobre 2015
IMPOSITION DES MÉNAGES
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Suguenot, pour le groupe Les Républicains.
M. Alain Suguenot. Monsieur le Premier ministre, vous avez dit la semaine dernière qu'il y avait eu « une augmentation importante de la fiscalité au cours de ces dernières années ». Et vous avez ajouté cette augmentation avait créé « une forme de rupture entre les Français et l'impôt. » C'est le moins que l'on puisse dire !
En reconnaissant cette hausse très forte, ce sont MM. Jean-Marc Ayrault et François Hollande que vous avez, de fait, visés, puisque vous avez ajouté : « Sans doute aurait-il fallu mieux préparer la cohérence au début du quinquennat. » Vous avez essayé de corriger le tir, en indiquant que les baisses d'impôt, très partielles, votées en 2014, puis celles qui devraient s'appliquer l'an prochain, compenseraient cette erreur de jeunesse et l'impréparation de votre arrivée au pouvoir.
Mais les chiffres sont têtus, monsieur le Premier ministre : en sus des 18 milliards d'impôts supplémentaires que vous avez prélevés en deux ans sur les entreprises, ce sont bien les ménages qui ont été le plus lourdement taxés. Le cumul des mesures votées depuis 2011 atteint en effet 68 milliards d'euros, dont 58 milliards ne pèsent que sur les particuliers. Cette hausse cumulée n'est évidemment pas compensée par la baisse que vous évoquez de 5 milliards en 2015 et 2016.
En outre, l'hyperconcentration de l'impôt sur le revenu a des effets dévastateurs. En effet, alors que le nombre de foyers fiscaux aura baissé entre 2012 et 2016, la recette aura quasiment explosé, faisant peser sur les classes moyennes la plus grande part de l'impôt. Cela a des conséquences multiples, monsieur le Premier ministre : incitation à quitter notre pays – on en parle peu, mais c'est une réalité –, décollecte du Livret A, tensions sociales, mal-être de nos concitoyens.
Je n'oublie pas non plus l'augmentation des impôts locaux, que votre politique de baisse des dotations rend inévitable…
M. Razzy Hammadi. Ah !
M. Alain Suguenot. …et qui touche, elle, tous les Français.
Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : quand, au-delà des mots et des promesses non tenues, votre mea culpa deviendra-t-il une réalité dans les faits ? Quand aurez-vous une politique juste, de modération fiscale ? Monsieur le Premier ministre, les 10 milliards d'euros qu'il manquera au budget pour 2016 ajoutent à notre inquiétude. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.
Mme Geneviève Levy. Nous voulons une vraie réponse !
M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le député Alain Suguenot, le Premier ministre a déjà eu l'occasion de répondre hier à la question que vous posez…
M. Hervé Mariton. Sa réponse n'était pas convaincante !
M. Michel Sapin, ministre. …mais je voudrais, à mon tour, apporter quelques éléments de réponse. D'abord, laissons les mea culpa à des assemblées moins laïques que la nôtre et tâchons ensemble, comme nous le voulons tous, de dire la vérité.
M. Guy Geoffroy. C'est un expert qui parle !
M. Michel Sapin, ministre. Dans cette quête de vérité, nous pouvons regarder ensemble les choses en face. Si je regarde les choses en face, monsieur le député, et vous pouvez le faire avec moi…
M. Paul Giacobbi. N'exagérons rien !
M. Michel Sapin, ministre. …vous admettrez que l'état de la France, en 2012, était déplorable. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Mme Claude Greff. Et aujourd'hui ?
Mme la présidente. Mes chers collègues, un peu de calme.
M. Michel Sapin, ministre. Une France dont le déficit avait explosé – personne ne peut le nier –, dont la compétitivité avait chuté, dont les entreprises avaient énormément de difficultés à se battre contre leurs homologues, et un déficit commercial insondable…
Mme Claude Greff. C'est malhonnête !
M. Michel Sapin, ministre. Devant cet état de fait, la vérité – et vous pourriez en convenir –, c'est que vous avez décidé, dès 2010, puis pour 2011 et 2012, des augmentations d'impôt. La vérité, c'est que vous avez décidé ces augmentations d'impôt. La vérité, c'est que nous avons continué à augmenter les impôts. Regardons-la, cette vérité, d'un côté, comme de l'autre !
Mme Claude Greff. Quel culot !
M. Michel Sapin, ministre. La vérité, monsieur le député, c'est que, puisque la France aujourd'hui se redresse,…
M. Sylvain Berrios. Dix pour cent de chômeurs !
M. Michel Sapin, ministre. …puisque la France aujourd'hui retrouve une croissance que vous ne nous aviez pas laissée, puisque la France est en train, progressivement, de redresser ses comptes publics, elle est désormais capable – et elle a même le devoir – de faire en sorte que les impôts, qui ont pu augmenter pour les entreprises ou les ménages, diminuent aujourd'hui.
Nous diminuons les impôts des entreprises pour leur permettre d'investir et d'embaucher,…
Mme Claude Greff. Arrêtez ces mensonges !
M. Michel Sapin, ministre. …et nous voyons les premiers fruits de cette politique. Nous diminuons les impôts des ménages, avec 12 millions de foyers fiscaux qui, en deux ans, verront leurs impôts baisser.
Mme Claude Greff. Menteur !
M. Michel Sapin, ministre. Voilà la vérité : partageons-la, monsieur le député. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Mme Claude Greff. À peine quelques applaudissements ! C'est parce que vous êtes un menteur !
Auteur : M. Alain Suguenot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Finances et comptes publics
Ministère répondant : Finances et comptes publics
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 octobre 2015