droit du travail
Question de :
M. Céleste Lett
Moselle (5e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 16 mars 2016
PROJET DE LOI TRAVAIL
M. le président. La parole est à M. Céleste Lett, pour le groupe Les Républicains.
M. Céleste Lett. Monsieur le Premier ministre, votre texte sur le travail se voulait au départ « révolutionnaire » et ambitieux, permettant enfin aux entreprises de s'organiser plus simplement. Aujourd'hui, après moult chamboulements pour faire plaisir aux uns et aux autres, il n'est plus qu'un simple projet rétrograde, vidé de toute substance ! Démonstration : Sarreguemines, ma ville, compte des filiales de deux grands groupes allemands, Continental – moins de 2 000 salariés – et Smart – plus de 2 000 salariés. Toutes deux, confrontées à des objectifs de compétitivité, ont formulé le vœu de sauver ces milliers d'emplois en contrepartie d'efforts à réaliser sur le coût et le temps de travail.
Mais dernièrement, la modification provisoire de la durée du travail chez Smart, approuvée par plus de 56 % des salariés interrogés par référendum, s'est heurtée à un refus catégorique de deux syndicats bien moins représentatifs. Venant d'un territoire voisin de l'Allemagne où, grâce à un syndicalisme fort et plus représentatif existe un véritable dialogue social, le message adressé par nos organisations syndicales aux responsables allemands est catastrophique. Heureusement, le droit d'opposition n'aura pas eu raison du choix sans appel d'une très large majorité de salariés qui, avec pas moins de 97 % d'avenants signés, ont évité la délocalisation en Slovénie. Je vous remercie d'ailleurs, monsieur le Premier ministre, de l'écoute que vous m'aviez à l'époque apportée.
Monsieur le Premier ministre, votre texte initial laissait entrevoir des avancées significatives. Aujourd'hui, vous reculez, et j'ai peur que demain, d'autres belles entreprises ne subissent les mauvaises orientations prises par une minorité non représentative. Donner la priorité à l'emploi et conforter la parole des salariés ne doit pas apparaître comme un contournement de la voie syndicale, bien au contraire : ce n'est ni plus ni moins qu'un bel exemple de démocratie participative responsable ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le député, il y a en effet un changement majeur dans ce projet de loi par rapport à la situation actuelle : une plus grande place laissée à la négociation collective. Nous pensons en effet que le système français est à bout de souffle.
M. Dominique Dord. Il s'agit d'un recul !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Si le code du travail est devenu à juste titre de plus en plus épais, c'est bien parce qu'il a intégré de nombreuses dérogations, demandées d'ailleurs par les organisations patronales, visant à couvrir toutes les situations. Mais nous sommes passés d'une ère industrielle à une ère de services et nous ne pourrons pas continuer à couvrir tout le champ des adaptations.
C'est pourquoi ce projet de loi est un acte de confiance en direction des chefs d'entreprise comme en direction des syndicats. Tout l'enjeu est de laisser plus de capacité d'adaptation, au plus près du terrain. La philosophie du projet de loi n'a à cet égard absolument pas changé : nous confortons les organisations syndicales mais tout en élargissant les objets de la négociation. L'exemple de Smart que vous avez donné montre que le dialogue social n'y a pas été exemplaire, les salariés se retrouvant dans une relation déséquilibrée avec l'employeur, ce qui les a conduits à accepter une modification de leur contrat de travail. Voilà ce que nous ne souhaitons pas. Il faut apporter des solutions par des accords collectifs majoritaires, avec une équation simple : pas de souplesse sans négociation, et puisque les entreprises veulent davantage de souplesse, il y aura négociation.
Le projet de loi prévoit deux modalités de mise en œuvre des accords collectifs : la première, c'est un accord majoritaire pour renforcer la légitimité des accords à venir sur l'objet des négociations : la seconde, c'est de permettre à des organisations syndicales représentant au moins 30 % des voix de demander une consultation des salariés. Il ne s'agit pas là de contourner les organisations syndicales.
Monsieur le député, ce projet de loi répond véritablement, croyez-moi, aux demandes formulées non seulement par les salariés, mais également par les chefs d'entreprise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : M. Céleste Lett
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 mars 2016