Question au Gouvernement n° 3742 :
Turquie

14e Législature

Question de : M. Bruno Le Maire
Eure (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 17 mars 2016


CONSEIL EUROPÉEN DES 17 ET 18 MARS

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Maire.

M. Bruno Le Maire. Monsieur le ministre des affaires étrangères, à l'occasion de votre prise de fonctions, vous avez indiqué que vous vouliez relancer la construction européenne sur la base du couple franco-allemand. Cette déclaration a satisfait nombre de parlementaires, sur les bancs de la gauche comme sur ceux de la droite. Malheureusement, les faits contredisent vos déclarations. Contrairement à ce qu'a déclaré Harlem Désir, la France a vécu ces dernières semaines une série d'humiliations sur la scène internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Humiliation de voir la France écartée de la négociation sur l'avenir de la Syrie, alors qu'elle est directement concernée par l'afflux de réfugiés et la menace islamiste venus de ce pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Humiliation de voir la Grande-Bretagne imposer à l’Union européenne des concessions, y compris un droit de regard sur l'avenir de la zone euro, en échange de son maintien dans l’Union européenne.

M. Jean Glavany. Mais non !

M. Bruno Le Maire. La Grande-Bretagne est libre de choisir ; nous n'avons pas à lui accorder de concessions sur la zone euro pour qu'elle reste au sein de l'Europe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)

Humiliation de voir, pour la première fois de l'histoire de l’Union européenne, qu'un document de travail préparatoire au Conseil européen des 17 et 18 mars a été négocié non pas entre la chancelière allemande et le Président de la République française, mais entre Angela Merkel et le Premier ministre turc ! (Mêmes mouvements.)

Sur le fond, ce texte est une capitulation. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner l'assurance que demain, au Conseil européen, le Président de la République s'opposera à la libéralisation des visas pour les citoyens turcs et à toute nouvelle ouverture de chapitre pour l'adhésion de la Turquie à l’Union européenne ?

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Bruno Le Maire. L'ensemble des membres du groupe Les Républicains sont opposés à l'entrée de la Turquie dans l’Union ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Claude Goasguen. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le député, je croyais que vous étiez habitué à plus de nuances - c'est la réputation que vous voulez vous faire -, mais vous venez de tomber dans le piège de la caricature. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Vous semblez avoir oublié que vous avez participé à l'ouverture de chapitres dans les négociations d'adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Sous la présidence de François Hollande, deux chapitres seulement ont été ouverts. Lorsque vous étiez au pouvoir, il y a eu onze ouvertures de chapitres, dont deux sous la présidence française.

M. Bernard Deflesselles. C'est faux !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Est-il nécessaire de faire peur et d'utiliser n'importe quel argument pour convaincre les membres du parti Les Républicains de vous soutenir lors de la primaire ? (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.) L'Europe et la relation franco-allemande méritent mieux que cela !

S'agissant des visas, la Turquie a demandé d'aller plus vite, mais la France, et j'en suis convaincu, l'ensemble des États membres, estiment que tant que tous les critères ne seront pas satisfaits – seulement la moitié des soixante-douze critères sont respectés –, il n'y aura pas de libéralisation des visas. Cette position sera confirmée demain lors du Conseil.

M. Guy Geoffroy. Mais la libéralisation aura lieu !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Quant aux discussions entre l'Allemagne et la Turquie, ne faites pas, je vous prie, de polémique.

M. Claude Goasguen. L'accord est inadmissible !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Il est parfaitement compréhensible que l'Allemagne, qui accueille plus d'un million de réfugiés, et la Turquie, qui en accueille plus de 2,5 millions, discutent ensemble. Mais la décision sera prise par le Conseil européen.

M. Sylvain Berrios. Que va faire François Hollande ?

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Même si cela est difficile, il est indispensable, et dans l'intérêt commun, de discuter franchement et sincèrement avec la Turquie. C'est ce que nous ferons demain. Le Président de la République s'y est engagé, dans la clarté et avec une conviction que je répète ici : l'avenir de l'Europe passe, plus encore aujourd'hui, par la relation de confiance entre l'Allemagne et la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.)

Données clés

Auteur : M. Bruno Le Maire

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Affaires étrangères

Ministère répondant : Affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 2016

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