terrorisme
Question de :
M. Claude Goasguen
Paris (14e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 30 mars 2016
INCRIMINATION DES ACTES TERRORISTES
M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen, pour le groupe Les Républicains.
M. Claude Goasguen. Ma question s'adresse au garde des sceaux. (« Il n'est pas là ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Monsieur le garde des sceaux, face à la multiplication des attentats en Europe et dans le monde, nous sommes nombreux à nous poser quelques questions simples mais qui appellent des réponses.
Sommes-nous, oui ou non, en guerre avec l'État islamique et les mouvements islamistes ?
Dans le contexte qui est le nôtre, il va bien falloir tirer quelques conséquences, car nous donnons, en tout cas juridiquement, l'impression de ne pas être à la hauteur de la situation depuis la multiplication des attentats.
Notre législation, au travers de notre code pénal et de notre code de justice militaire, permet pourtant, monsieur le Premier ministre, de sanctionner plus sévèrement les auteurs de ces crimes odieux. Ainsi, le livre IV du code pénal, relatif aux crimes et délits contre la nation, précise dans un de ses articles fondamentaux, l'article 411-4, que « le fait d'entretenir des intelligences avec une puissance étrangère, avec une entreprise ou organisation étrangère […] en vue de susciter des hostilités ou des actes d'agression contre la France, est puni de trente ans de détention criminelle ».
M. Christian Kert. C.Q.F.D. !
M. Claude Goasguen. Cet article pourrait parfaitement être appliqué aux Français partis faire le djihad et de retour en France.
Mais cet article n'est pas appliqué. Depuis plusieurs mois nous en demandons la raison au garde des sceaux. Le ministère nous répond que vous refusez de reconnaître la réalité juridique de l'état de guerre et le crime de trahison, préférant vous en tenir à des propositions d'ailleurs très controversées de perpétuité réelle, actuellement débattues au Sénat.
Le problème n'est pas la perpétuité réelle, monsieur le Premier ministre : le problème c'est de qualifier de trahison ce qui est une trahison ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.) S'il vous plaît : vous savez comment cela fonctionne !
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Vous le savez, monsieur le député, Jean-Jacques Urvoas est au Sénat pour défendre son projet de loi, et c'est pourquoi je me permets de répondre à sa place, d'autant que ce n'est pas la première fois que vous posez cette question.
Votre position, qui s'appuie sur la thématique du fait de guerre, de façon, peut-être un peu rhétorique, à la faire apparaître comme beaucoup plus sévère, ne traduit pas du tout le point de vue du Gouvernement.
M. Yves Fromion. C'est vous qui parlez de guerre !
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Vous le savez, l'incrimination que vous proposez a l'inconvénient de consacrer le caractère étatique de l'État islamique alors que cette caractérisation doit être nuancée. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Deuxième élément, comme vous le savez très bien puisque vous êtes juriste, une telle incrimination suppose l'existence d'un acte positif. Or dans les cas précis auxquels nous sommes aujourd'hui confrontés, on ne peut pas démontrer la réalisation d'un acte positif justifiant une telle incrimination.
Troisième élément, qui me paraît tout à fait important, les membres des réseaux auxquels nous avons affaire, s'ils sont parfois effectivement Français, peuvent aussi être de simples résidents sur le territoire français, voire n'être ni l'un ni l'autre, et leurs actes doivent pouvoir être incriminés d'une façon globale.
Enfin, vous le savez aussi, la procédure serait beaucoup plus lourde et ne permettrait pas ce qui est un des points forts de l'approche juridique actuelle, à savoir appréhender dans le même filet des personnes qui ne sont potentiellement que justiciables en matière correctionnelle. (« N'importe quoi ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Voilà pourquoi l'incrimination qui est aujourd'hui retenue en matière de terrorisme est sans aucun doute la plus pratique, la plus efficace et la plus globale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : M. Claude Goasguen
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ordre public
Ministère interrogé : Relations avec le Parlement
Ministère répondant : Relations avec le Parlement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 mars 2016