Question au Gouvernement n° 4207 :
lois de finances

14e Législature

Question de : M. Gilles Carrez
Val-de-Marne (5e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 6 octobre 2016


PROJET DE LOI DE FINANCES

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, pour le groupe Les Républicains.

M. Gilles Carrez. Monsieur le ministre des finances, je veux vous féliciter pour votre talent de prestidigitateur. Votre projet de budget pour 2017 est un festival de tours de passe-passe et d'astuces de comptabilité.

M. Pascal Popelin. Il est vrai que vous êtes orfèvre en la matière !

M. Gilles Carrez. Tout cela pour essayer de nous faire croire que le déficit public sera inférieur à 3 % du PIB l'an prochain ! (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Votre montage en trompe-l'œil est simple : d'un côté, vous gonflez artificiellement les recettes pour l'année 2017 ; de l'autre, vous repoussez les dépenses à l'année 2018. La surestimation des recettes, d'abord, due à votre prévision de croissance de 1,5 %, s'élève à plusieurs milliards d'euros ; le Haut conseil des finances publiques, présidé par le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, conteste cette prévision excessivement optimiste. Près de 10 milliards d'euros de dépenses, ensuite, sont reportés sur l'année 2018 (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.). La générosité dont fait preuve le président Hollande, à quelques mois des élections présidentielles, envers les agriculteurs, Alstom, et les fonctionnaires, est donc financée à crédit !

M. Pascal Popelin. Vous les avez réclamées vous-mêmes, ces mesures !

M. Gilles Carrez. Cela pèsera sur les comptes publics surtout à partir de l'année 2018, de sorte que le déficit réel de la France en 2017 sera très certainement supérieur à 3 %. Ce n'est pas l'opposition qui vous le dit, mais le Haut conseil des finances publiques, dont le sérieux ne peut être mis en doute. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.) Permettez-moi de vous demander respectueusement, monsieur le ministre des finances, si vous n'êtes pas devenu l'illusionniste en chef de la maison Bercy !

Et puisqu'il me reste quelques secondes de temps de parole, monsieur le président, je voudrais dire à Mme Touraine que le rétablissement des comptes sociaux est lié à la réforme des retraites menée par François Fillon et Éric Woerth en 2010 ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Michel Sapin, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le président Carrez, je vous connais depuis de nombreuses années – pendant lesquelles vous avez été successivement rapporteur général de la commission des finances, puis président de cette même commission – pour être un homme modéré, raisonnable, employant des arguments rationnels. Mais aujourd'hui c'est tout le contraire : c'est dommage, car ce registre vous sied beaucoup moins bien !

Il n'y a aucun subterfuge particulier dans ce projet de loi de finances pour 2017, aucun illusionnisme, car c'est un budget sincère, qui poursuit notre politique de diminution des déficits. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Sylvain Berrios. Si ce n'est pas par subterfuge, alors c'est de l'incompétence !

M. Michel Sapin, ministre. Monsieur le président Carrez, permettez-moi de vous poser une question : à quel niveau votre majorité a-t-elle laissé le déficit de la France ?

Plusieurs députés du groupe Les Républicains. C'est vous que l'on interroge ! Répondez à la question !

M. Michel Sapin, ministre. Plus de 5 % ! Grâce aux efforts que nous avons accomplis, grâce à un niveau de croissance supérieur, nous allons le faire diminuer à moins de 3 %. Qui a réussi ce travail ? Nous ! Qui a détérioré la France ? Vous ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations persistantes sur les bancs du groupe Les Républicains.)

C'est nous qui sommes sérieux ; quant à vous, vous devriez accepter de regarder la réalité en face. Quant à la dette, qui vous préoccupe comme elle nous préoccupe,…

M. Christian Jacob. Tu parles !

M. Michel Sapin, ministre. …je rappelle qu'elle a augmenté, sous votre responsabilité, de vingt-cinq points en cinq ans ; de combien a-t-elle augmenté, sous notre responsabilité ? De sept points ! Qui donc maîtrise la dette, et prépare l'avenir de nos enfants ? Pas vous, nous ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Monsieur le président Carrez, vous qui estimez le sérieux, ne perdez pas le vôtre. Ne participez pas à cette sorte de concours qui a lieu entre les candidats à la primaire, à qui baissera le plus les impôts, en faisant semblant de baisser les dépenses dans le même temps. Ne cédez pas à cette facilité : ce n'est pas parce que vous êtes en campagne pour les primaires que vous devez être primaire dans votre raisonnement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Données clés

Auteur : M. Gilles Carrez

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Finances publiques

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 octobre 2016

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