Question au Gouvernement n° 4675 :
gouvernement

14e Législature

Question de : M. Olivier Faure
Seine-et-Marne (11e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 16 février 2017


POLITIQUE GÉNÉRALE

M. le président. La parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Olivier Faure. Monsieur le président, mes chers collègues, la semaine prochaine, nous achèverons nos travaux après cinq années d'action. Qui mieux que vous, monsieur le Premier ministre, pourrait incarner les défis auxquels nous avons été confrontés ?

Vous avez été ministre des affaires européennes pendant la crise de l'euro, ministre du budget alors que nous faisions face à la dette abyssale laissée par nos prédécesseurs,… (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Myard. Pourquoi Hollande ne se représente-t-il pas, alors ?

M. Olivier Faure. …ministre de l'intérieur au moment des attentats tragiques qui ont ensanglanté notre pays, et vous êtes désormais Premier ministre tandis que les cartes du jeu mondial se redistribuent.

Je comprends que le bilan soit l'objet d'un débat. On a tancé les amateurs, mais ce sont les amateurs qui ont rétabli les comptes publics. On a décrié les laxistes, mais ce sont les laxistes qui ont renforcé les services de renseignement, de police et de gendarmerie. On a dit que ce gouvernement n'était pas assez fidèle à l'histoire de la gauche,…

M. Éric Straumann. Pas nous !

M. Olivier Faure. …mais c'est bien sous cette législature que l'éducation est redevenue une priorité, que l'accès aux soins a été renforcé, que la question climatique a été traitée, que le capital et le travail ont été imposés au même barème.

M. Marc Le Fur. Qu'en dit Christian Paul ?

M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, nous voulons vous dire notre fierté (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains) : fierté d'avoir accompagné les pas de vos deux prédécesseurs et ceux du Président de la République ; fierté d'être à vos côtés pour que, jusqu'à l'élection présidentielle, chaque minute soit une minute utile ; fierté de vous savoir, en ce moment même, à l'œuvre dans l'élaboration d'un socle européen de droits sociaux.

Avons-nous tout réussi ? (« Non ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.) À l'évidence non. Il n'y a pas de grand soir. Il n'y en aura jamais.

M. Éric Straumann. Ça, c'est vrai.

M. Olivier Faure. Il n'y a qu'une accumulation de réformes qui, depuis un siècle, forgent le modèle français.

Monsieur le Premier ministre, vous l'aurez compris, ma question est surtout un remerciement et l'expression d'un espoir, celui de continuer ensemble à rendre l'avenir désirable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Plusieurs députés du groupe Les Républicains. Il n'est pas candidat !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le président Olivier Faure, votre question comporte beaucoup de sujets. J'essaierai d'aller à l'essentiel.

Je veux d'abord insister devant la représentation nationale sur le moment particulier où nous nous trouvons. Dans le monde et en Europe, les populismes font une percée dont il faut bien reconnaître qu'elle représente un extraordinaire danger pour la pérennité des valeurs des pères fondateurs de l'Union européenne, auxquelles de nombreux gouvernements de toutes sensibilités en France ont manifesté leur attachement par la suite. Nous sommes également dans un moment de danger du point de vue de notre attachement à l'État de droit, qui rassemble sur ces bancs bien des républicains de toutes sensibilités.

Nous avons vécu un quinquennat particulièrement difficile en raison des défis qui se présentaient à nous : la réduction de la dette, la nécessité de redresser nos comptes publics, le terrorisme, qui nous a frappés très durement et s'en est pris aux valeurs essentielles de la République en tentant de semer l'effroi parmi nos concitoyens, avec cet incommensurable chagrin que nous avons vécu ensemble et la volonté, manifestée dans l'unité sur tous ces bancs, de faire en sorte que, malgré les épreuves, la République demeure debout.

Nous avons eu aussi, dans ce contexte particulier, la volonté de contribuer à la réorientation de l'Europe en mettant sur le métier de nouveaux sujets pour rendre l'Europe plus lisible, plus solidaire et plus protectrice. Si je devais dire en un mot quel est le principal défi qui se présente à nous et qui se présentera aux gouvernements de la France quels qu'ils soient, j'insisterais sur la nécessité, pour l'Europe, d'assurer sa mission de protection du continent et des citoyens européens.

Protection contre le terrorisme, en confortant le contrôle aux frontières extérieures de l'Union européenne grâce à la montée en puissance de Frontex, à la réforme du système d'information Schengen, à la connexion des fichiers criminels, à la mise en place de la directive de lutte contre le trafic d'armes.

Protection du continent européen au moment où les États-Unis menacent de se désengager de ce continent et notamment de l'OTAN, par laquelle ils avaient contribué à la protection de l'Europe. Nous devons renforcer l'Europe de la défense…

M. Claude Goasguen. Il fallait le faire avant !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. …à travers la mise en place du Fonds européen de défense, qui doit permettre de définir les conditions de la projection de nos forces, de la planification des opérations, de la mutualisation d'un certain nombre de financements dont les défenses des pays européens et la défense européenne ont besoin pour assurer le développement de différents processus industriels.

La protection, c'est aussi le socle de droits sociaux dont nous avons parlé ce matin en Conseil des ministres et que j'ai de nouveau évoqué juste après avec la commissaire Marianne Thyssen, qui nous rendait visite. En matière de salaire minimum européen, de lutte contre les excès du détachement de travailleurs, de reconnaissance de la mobilité des apprentis, de carte d'étudiant européenne, nous progressons pour que l'Europe sociale s'affirme avec une lisibilité équivalente à celle qui a permis à certains projets, comme Erasmus, de s'affirmer.

L'Europe, enfin, c'est la protection de nos secteurs d'excellence – je pense à nos pôles de compétitivité, à notre recherche, à notre université. Il faut porter beaucoup plus loin le plan Juncker et lui assigner des objectifs clairs.

Mesdames, messieurs les députés, c'est la dernière fois qu'il m'est donné l'occasion de m'exprimer devant votre assemblée. C'est la dernière question d'actualité à laquelle je réponds et, n'étant pas candidat aux élections législatives, je n'aurai plus l'occasion de m'exprimer dans cette enceinte.

M. Éric Straumann. Nous vous regretterons !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. C'est pour moi un moment d'émotion. Voilà près de vingt ans que je vous côtoie, pour de multiples débats où nous nous sommes opposés et où, parfois, nous avons aussi contribué à faire œuvre législative ensemble. Je voudrais, dans cette circonstance particulière, remercier l'ensemble des députés de tous les bancs pour la qualité du travail accompli (Applaudissements prolongés sur tous les bancs), dire ma grande fierté d'avoir pu contribuer à ce travail, dire aussi que, dans ces vingt années d'exercice comme député ou comme ministre, j'ai toujours essayé de faire au mieux – mais chacun sait que, face à la rudesse des choses et des défis, on n'est jamais sûr de bien faire. Ce fut, je le répète, une immense fierté pour moi d'être si longtemps à vos côtés. (Applaudissements sur tous les bancs. – Mmes et MM. les députés du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, ainsi que quelques députés du groupe de l'Union des démocrates et indépendants, se lèvent et applaudissent vivement.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Faure

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : État

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 février 2017

partager