Question au Gouvernement n° 553 :
déficits publics

14e Législature

Question de : M. Olivier Faure
Seine-et-Marne (11e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 20 février 2013

POLITIQUE BUDGÉTAIRE ET FISCALE

M. le président. La parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, vous l'avez évoqué vous-même : notre pays n'atteindra pas l'objectif fixé par le Président de la République d'une réduction du déficit à 3 % du PIB pour l'année 2013. (" Bien sûr ! " sur les bancs du groupe UMP.)
La droite le présente comme le signe d'un échec.
Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !
M. Olivier Faure. Elle fait le pari que les Français ont déjà oublié son bilan. Bilan qui a vu la dette de la France doubler en dix ans !
M. Christophe Guilloteau. Et vos promesses ?
M. Olivier Faure. Car de quoi parlons-nous ?
Il y a neuf mois à peine, le déficit public était encore de 5,2 % ! Et c'est grâce aux mesures prises dès le mois de juillet que ce déficit a été ramené à 4,5 % ! Et c'est justement maintenant, alors que nous nous rapprochons des 3 %, que l'opposition voudrait nous faire la leçon sur des recettes qu'elle n'a jamais trouvées, sur des économies qu'elle n'a jamais réalisées, sur les investissements qu'elle avait abandonnés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Alors, monsieur le Premier ministre, ce n'est pas à la droite qu'il faut répondre, elle devra d'abord faire son propre inventaire pour retrouver une crédibilité. C'est aux Français qui s'inquiètent de ce que leurs efforts ne portent pas encore tous leurs fruits. Quelle sera la réponse de votre gouvernement ? (" Aucune ! " sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Le sérieux ? Les Français savent la gestion rigoureuse nécessaire. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.) On ne sort pas d'une situation d'endettement excessif sans efforts sur la dépense publique.
L'austérité ? Nous la redoutons avec eux, car elle nous entraînerait dans une spirale dépressive et parce que le modèle français repose sur sa capacité à lier la performance économique à un haut niveau de solidarité.
Monsieur le Premier ministre, dans ce contexte, comment comptez vous arbitrer entre la nécessité de compenser les moins-values fiscales sans décourager pour autant l'investissement nécessaire pour retrouver la croissance ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur Olivier Faure, lorsque j'ai pris mes fonctions de Premier ministre, j'ai trouvé un déficit de 5,2 %. En six mois, le Gouvernement l'a réduit à 4,5 % (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) en dépit d'une croissance très faible. (" Une croissance nulle ! " sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La Cour des comptes, dont vous connaissez le jugement sans complaisance, a salué cet effort structurel considérable et sans précédent.
M. Guy Geoffroy. Mensonge !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Quant à la croissance pour l'année 2012, elle est négative au dernier trimestre, moins 0,3 %. Dans la zone euro, moins 0,6 %. En Allemagne, moins 0,6 %. En Espagne, moins 0,7 %. Avec moins 0,3 %, la France fait mieux, mais cela ne nous satisfait pas. C'est la réalité. Avec une croissance encore plus faible, c'est vrai que nous n'atteindrons pas les 3 % de réduction des déficits en 2013. (" Eh oui ! " sur les bancs du groupe UMP.)
Mais le cap, en dépit de cette croissance faible, reste le même.
M. Guy Geoffroy. C'est faux !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. C'est l'engagement du Président de la République : déficit zéro en 2017. Ce cap est le nôtre et il sera tenu. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Pourquoi faut-il le tenir ? Parce qu'il s'agit de l'indépendance de la France. Ce n'est pas parce que d'autres nous le dicteraient ou qu'on nous l'imposerait, c'est parce que la France veut retrouver ses marges de manoeuvre : ne pas laisser la facture aux générations futures, retrouver des marges de manoeuvre pour investir, améliorer la situation des Français. C'est une question de souveraineté et d'indépendance nationale. C'est notre responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. - Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
C'est pourquoi il faut tenir le cap, je le répète, et le tenir sans à-coups, ne pas pénaliser l'activité économique, mais agir avec sérieux et constance et moderniser l'action publique. Vendredi prochain, vous le savez, la Commission européenne publiera la situation de chaque pays de la zone euro en matière de croissance, donc en matière de déficits. Je l'ai dit dès la semaine dernière, puisque nous ne serons pas à 3 %, nous discuterons avec la Commission, avec nos partenaires, pour trouver le meilleur calendrier possible afin de ne pas déprimer l'activité économique en 2013. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Nous ne prendrons pas la responsabilité de dégrader la très faible croissance pour 2013 ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. - Protestations sur les bancs du groupe UMP.) C'est l'engagement que je prends devant la représentation nationale. (Mêmes mouvements.)
Je voudrais vous rappeler les deux leviers dont nous disposons, dont le pays dispose pour la croissance.
M. Marc-Philippe Daubresse. Des mesures fiscales supplémentaires !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. D'abord, le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi,...
M. Guy Geoffroy et M. Bernard Deflesselles. Zéro !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. ...le crédit d'impôt pour redonner des marges aux entreprises - vous l'avez voté. Il faut que les entreprises l'utilisent. J'appelle chacune et chacun d'entre vous à aller dans les entreprises afin de leur dire : vous avez ce crédit, vous avez ce plan. Qu'en faites-vous ?
Plusieurs députés du groupe UMP. Zéro !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Qu'en faites-vous pour la croissance, l'investissement et l'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le deuxième levier est l'investissement public. Demain avec le Président de la République, nous tiendrons un séminaire sur ce thème et j'annoncerai un certain nombre d'orientations. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Patrice Verchère. Avec quel argent ?
M. le président. S'il vous plaît.
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. L'investissement public en partenariat avec les collectivités locales, avec le secteur privé, c'est l'investissement dans le haut débit, dans le numérique sur tout le territoire national. C'est le transport, le logement, la transition énergétique, c'est la santé.
M. Marc-Philippe Daubresse. C'est de la brasse coulée !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Enfin, nous avons tous les outils en main : le pacte de croissance, je l'ai rappelé, l'accord sur la sécurisation de l'emploi, le contrat de génération, les emplois d'avenir. C'est à tous les acteurs de l'entreprise, des collectivités territoriales, de se saisir de ces leviers et d'agir pour redonner au pays la croissance et des perspectives.
Je ne suis pas à la tête d'un gouvernement (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP) qui se fixe comme seul horizon l'échec de notre pays. Moi, je veux la réussite de la France, et je demande à la droite de faire preuve d'un peu de modestie. Je vous rappelle que les 5,2 % de déficit, c'est ce que vous nous avez laissé. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. S'il vous plaît, gardez votre calme !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Si nous n'avions rien fait, nous aurions été à 6 % !
Plusieurs députés du groupe UMP. Zéro !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. C'est votre responsabilité d'avoir augmenté la dette de 600 milliards d'euro. C'est votre responsabilité d'avoir contribué à l'augmentation du chômage avec un million de chômeurs en cinq ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est votre responsabilité d'avoir laissé un commerce extérieur en déficit de 70 milliards. C'est votre responsabilité d'avoir détruit l'appareil productif de notre pays, avec 750 000 emplois. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Comment pouvez-vous vous permettre de nous faire la leçon, vous qui portez dix ans de politique de droite, de régression, d'injustices ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Très mauvais !
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Nous, nous voulons sauver le modèle français, non pas en restant tels que nous sommes, mais en le réformant. Car ce qui nous anime, c'est l'avenir du pays, c'est la baisse du chômage, la solidarité, un nouveau modèle français qui fasse la fierté des Français et qui les rassemble. (Mmes et MM les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Tel est notre engagement. C'est pour cela, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, que j'attends votre motion de censure avec impatience. Ce sera bilan contre bilan, projet contre projet ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Faure

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Finances publiques

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 février 2013

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