fraude fiscale
Question de :
Mme Barbara Pompili
Somme (2e circonscription) - Écologiste
Question posée en séance, et publiée le 10 avril 2013
ÉVASION FISCALE
M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour le groupe écologiste.Mme Barbara Pompili. Monsieur le Premier ministre, le mensonge de Jérôme Cahuzac est certes un acte individuel (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) se nourrissant de ressorts humains détestables, qui existent dans tous les milieux, qui ne sont pas nouveaux, comme l'addiction à l'argent. Le politique a bien peu de prise sur cela, sinon par le renforcement des sanctions contre les fraudeurs, notamment en instaurant enfin des peines dissuasives pour les élus.
Mais cette évasion fiscale est surtout la conséquence d'un modèle de développement de la finance internationale qui a fait du dumping fiscal l'un de ses moteurs. Il est la conséquence d'une coupable mansuétude, qui ne peut que nous interroger, des différents gouvernements depuis plusieurs années.
Une Europe impuissante, souvent volontairement malgré le travail des eurodéputés, des nations qui s'en remettent à la définition de règles communes qui ne viennent jamais, et le résultat est là. Un rapport sur l'évasion des capitaux publié en 2012 indique que près de 36 milliards d'euros sont chaque année soustraits au budget de l'État. Trente-six milliards volés aux Français !
À la crise financière et sociale, l'évasion fiscale ajoute une crise morale. Plusieurs responsables de la majorité ont dit leur volonté de voir le Parlement saisi de mesures radicales et déterminées. Les uns et les autres, nous travaillons à des propositions de loi. Celle des écologistes sera déposée demain sur le bureau de notre assemblée, mais chacun sait que, sur ces questions, rien n'est possible sans la volonté du Gouvernement.
Ma question est donc claire : êtes-vous prêt, monsieur le Premier ministre, à mettre en oeuvre en France un équivalent de la législation américaine, qui a instauré pour les banques étrangères, sous peine de retrait de leur agrément, une obligation de transmettre aux services fiscaux américains des informations sur leurs clients contribuables aux États-Unis ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, je partage votre révolte. Il est inadmissible qu'au moment où des efforts particuliers sont demandés aux Français et, au-delà, aux Européens, des phénomènes d'exil fiscal, d'évasion fiscale puissent se développer. C'est d'ailleurs, vous le savez, l'un des sujets sur lequel le Gouvernement s'est mobilisé depuis sa nomination. Nous avons fait passer, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, un paquet de mesures de lutte contre la fraude. Il doit permettre de récupérer, non pas 36 milliards d'euros, mais d'emblée un milliard d'euros.
Vous savez pertinemment aussi que, dans le cadre de la loi bancaire que j'ai défendue devant votre assemblée, a été adopté, à l'initiative de votre groupe, un amendement qui permettra à la France d'être le premier pays au monde à obtenir des informations sur les activités de ses banques dans tous les pays du monde, y compris dans les paradis fiscaux. Personne ne peut nier que ces paradis fiscaux existent. Les révélations faites dans le journal Le Monde le montrent : non, contrairement à ce que disait M. Sarkozy, les paradis fiscaux, ce n'est pas fini !
M. Patrice Verchère. Et le trésorier de la campagne de M. Hollande ?
M. Pierre Moscovici, ministre. C'est la raison pour laquelle il faut passer d'échanges d'informations à la demande à des échanges d'information automatiques. (" Augier ! Augier ! " sur les bancs du groupe UMP.) C'est ce qu'ont fait les États-Unis, avec une législation qui s'appelle FATCA, qu'il faut transposer à l'échelle européenne. (" Augier ! Augier ! " sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. S'il vous plaît, écoutez la réponse, au moins !
M. Pierre Moscovici, ministre. Vous devriez plutôt écouter, en effet, ce que je vais dire. Ce matin, j'ai signé avec mes homologues allemand, britannique, italien et espagnol une lettre à la Commission européenne pour qu'il y ait un FATCA européen, pour que ces mesures soient donc appliquées dans toute l'Union, en particulier en France.
Voilà quelle est la volonté du Gouvernement, voilà quelle est la volonté du Président de la République : bannir l'évasion fiscale, lutter contre l'exil fiscal, combattre les paradis fiscaux. Nous sommes avec vous, nous sommes ensemble ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Auteur : Mme Barbara Pompili
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 avril 2013