politiques communautaires
Question de :
M. Jean-Luc Laurent
Val-de-Marne (10e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 29 mai 2013
TAXES SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.M. Jean-Luc Laurent. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.
Le projet de création d'une taxe sur les transactions financières - la " taxe Tobin européenne " - a connu une avancée majeure. Malgré les oppositions importantes de certains États membres, Grande-Bretagne en tête, et la virulence des lobbies de la finance, l'Union européenne, ayant constaté l'impossibilité d'avancer ensemble à vingt-sept, a pu ouvrir la voie - sans que les oppositions soient suffisantes pour bloquer le projet - à une coopération renforcée à onze.
En effet, la Commission européenne a déposé un projet de directive qui prévoit la taxation des actions, des obligations et des produits dérivés tout en s'assurant de son effectivité, face au risque de délocalisation, par le double principe d'émission et de résidence.
La taxe Tobin, mes chers collègues, on en parlait beaucoup depuis des années ; on a même fait mine, à une époque, de la créer. À présent, on la fait.
Les difficultés demeurent toutefois nombreuses. Le diable se nichant dans les détails, les onze États volontaires doivent s'accorder sur l'assiette exacte en tenant compte des spécificités financières de chaque nation.
La Commission estime la recette de cette taxe au montant, non négligeable, conséquent de 30 milliards d'euros. Il convient à présent de s'accorder sur la destination de cette recette nouvelle, qui peut permettre de faire beaucoup, en particulier d'investir et d'accompagner une politique de compétitivité qui ne repose pas sur l'écrasement des systèmes sociaux.
Dans le contexte actuel de conflit ouvert entre la finance et l'économie réelle, la création de cette taxe doit être une priorité, même si la date de son application fait aujourd'hui débat.
Par ailleurs, le dialogue avec l'Allemagne doit être d'une amicale franchise.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer quelle est la position de la France sur ce projet de taxe sur les transactions financières ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Philippe Armand Martin. Et du chômage !
M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le député, vous l'avez dit : tandis que certains ont parlé de la taxe Tobin sans y croire, parce qu'en vérité ils ne partageaient pas l'idée, d'autres - c'est notre cas - sont en train de la faire. Vous savez que c'était un engagement fort du Président de la République que de créer une taxe sur les transactions financières. Dès le Conseil européen de juin 2012, il a obtenu que cela soit inscrit dans l'agenda dit de croissance, à propos duquel la France a arraché un accord. Puis, le 22 janvier 2013, le conseil des ministres de l'économie et des finances, avec les Allemands et les Français, a obtenu la création de ce que l'on appelle une coopération renforcée, qui associe onze pays, qui veulent créer cette taxe entre eux.
Toutefois, le mécanisme des coopérations renforcées n'est pas des plus simples, ce qui complique un peu les choses. Non seulement les onze pays en question doivent se mettre d'accord, mais ce doit être également le cas des seize autres - qui seront bientôt dix-sept. Nous travaillons sur la base d'une proposition de la Commission, qui est de valeur mais qui doit encore être améliorée.
J'en viens aux trois objets de votre question. S'agissant de la date, nous voulons aller vite, car notre volonté politique est intacte...
M. Claude Goasguen. Pas trop vite, quand même !
M. Pierre Moscovici, ministre. ...et nous voulons aller fort, et nous souhaitons faire beaucoup mieux que la taxe sur les transactions financières qui existe en France à l'échelle nationale.
Par ailleurs, nous souhaitons une assiette large, qui porte évidemment sur les devises - conformément au principe de la taxe Tobin -, mais aussi sur certaines transactions sur produits dérivés, parce que c'est là que se niche la spéculation.
Enfin, s'agissant de l'affectation de la taxe, s'il est trop tôt pour entrer dans les détails, deux destinations doivent être visées : une partie doit être affectée au développement - c'est la philosophie même de cette taxe - et une autre partie à l'économie. Ce matin, s'exprimant sur le chômage des jeunes, le Président de la République a d'ailleurs évoqué la possibilité d'en affecter une partie à un budget de la zone euro qui aurait un rôle contracyclique.
En tout état de cause, monsieur le député, nous voulons aller vite et nous voulons aller fort : il s'agit en effet d'un objectif politique majeur dont je sais qu'il est soutenu par toute la majorité (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
Auteur : M. Jean-Luc Laurent
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 mai 2013