DGF
Question de :
M. Didier Quentin
Charente-Maritime (5e circonscription) - Les Républicains
M. Didier Quentin appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et son impact à venir sur les communes touristiques. Tout d'abord, on peut se féliciter que le Gouvernement ait entendu les associations d'élus en reportant d'un an la réforme de la DGF, afin de disposer d'une carte intercommunale stabilisée et d'obtenir des simulations pluriannuelles permettant de mesurer les effets structurels d'une telle réforme. Néanmoins, il convient de prendre en considération les particularités des communes touristiques, tant des stations balnéaires que de montagne, dont les dépenses de fonctionnement par habitant sont près de deux fois supérieures à celles des autres communes. C'est pourquoi il lui demande s'il entend prendre en compte la situation des stations balnéaires et touristiques, au regard des charges spécifiques qu'elles doivent assumer.
Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2015
PRISE EN COMPTE DE LA SITUATION DES COMMUNES TOURISTIQUES DANS L'ATTRIBUTION DE LA DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT
M. le président. La parole est à M. Didier Quentin, pour exposer sa question, n° 1168, relative à la prise en compte de la situation des communes touristiques dans l'attribution de la dotation globale de fonctionnement.
M. Didier Quentin. Madame la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, je voudrais vous interroger sur l'impact de la réforme de la dotation globale de fonctionnement sur les communes touristiques, ainsi que sur les conséquences du transfert de la compétence tourisme aux intercommunalités.
Tout d'abord, on peut se féliciter que le Gouvernement ait entendu les associations d'élus, en reportant d'un an la réforme de la DGF, afin de disposer d'une carte intercommunale stabilisée et d'obtenir des simulations pluriannuelles pour mesurer les effets structurels d'une telle réforme.
Néanmoins, il convient de prendre en considération les particularités des communes touristiques, comme les stations balnéaires, de montagne et thermales, dont les dépenses de fonctionnement par habitant sont près de deux fois supérieures à celles des autres communes. L'importance de ces dépenses s'explique par la nécessité de faire face à l'afflux de population en haute saison avec toutes les conséquences que cela implique en matière de nettoiement, de sécurité, d'éclairage, de salubrité publique et de voirie.
Le surdimensionnement des équipements lié aux pics de fréquentation implique, en outre, des dépenses d'investissement supérieures de 60 % à celles des communes non touristiques. De plus, lorsque l'on sait que la DGF versée par l'État aux communes représente de 20 % à 25 % de leurs recettes, que la France est la première destination touristique mondiale depuis vingt-cinq ans et que ce secteur représente près de 8 % de notre produit intérieur brut, une diminution drastique de la DGF des communes touristiques serait dramatique pour l'attractivité de notre territoire.
Par ailleurs, s'agissant de la promotion du tourisme, la loi NOTRe devrait permettre, malgré le transfert de la compétence touristique à la strate intercommunale, de conserver une relative autonomie financière et administrative aux offices du tourisme de stations classées, à charge pour les communes supports de négocier la présidence des conseils d'administration. Il s'agit là d'un enjeu budgétaire et stratégique essentiel, eu égard à l'importance des subventions versées par ces communes aux offices de tourisme et aux choix des animations organisées par ces dernières. Vous comprendrez aisément que les stations classées attendent des précisions à ce sujet.
C'est pourquoi je vous serais reconnaissant, madame la ministre, de m'indiquer les mesures que le Gouvernement envisage pour mieux prendre en considération la situation particulière des stations balnéaires, de montagne et thermales, au regard des charges spécifiques qu'elles doivent assumer, ainsi qu'en matière de promotion touristique.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur Quentin, vous avez commencé par vous réjouir du report d'un an de la réforme de la DGF, alors que M. Viala aurait, lui, préféré que l'augmentation de la dotation intervienne tout de suite pour régler son problème. Parfois, la géographie rend les sujets totalement transpartisans.
Les communes touristiques bénéficient aujourd'hui d'un avantage financier au titre de la DGF, puisque la loi du 31 décembre 1993 portant réforme de la dotation globale de fonctionnement et modifiant le code des communes et le code général des impôts a gelé les critères d'éligibilité et la composition des communes touristiques dans la répartition de la DGF et a procédé à l'intégration des anciennes dotations complémentaire et supplémentaire touristiques au sein de la dotation forfaitaire – tout cela n'est pas simple, mais clair malgré tout. Ces dernières évoluent donc au rythme de la dotation forfaitaire. Les montants consolidés représentent en 2015 une ressource de plus de 197 millions d'euros.
La population des communes est un critère fondamental dans la répartition des dotations de l'État, notamment de la plus importante d'entre elles : la dotation globale de fonctionnement. Pour répartir la DGF, l'État s'appuie sur la population totale selon l'INSEE, en y ajoutant – ne l'oublions jamais – un habitant par résidence secondaire et un habitant par place de caravane. Cette population, appelée « population DGF », tient donc compte des charges particulières supportées par certaines communes, notamment touristiques. Au niveau national, ce mécanisme d'augmentation forfaitaire pour résidence secondaire ou aire d'accueil permet de majorer la population des communes de plus de 3,2 millions d'habitants, c'est-à-dire que la population DGF est supérieure de 4,76 % à la population INSEE.
Comparées aux autres communes, les communes touristiques présentent une très forte proportion de résidences secondaires – 12 % contre 4,5 % sur le reste du territoire. Le mécanisme de majoration leur garantit de voir comptabilisée une population qui n'est pas présente à l'année et pour laquelle des charges sont engagées. Il constitue le soutien le plus efficace pour les communes touristiques, car les évolutions de résidences secondaires et de places de caravanes sont actualisées chaque année dans la population DGF, qui détermine le calcul des attributions. Cette évolution est d'ailleurs plus dynamique que celle de la population INSEE. Alors que cette dernière a crû de 0,51 % entre 2014 et 2015, le nombre des places de caravanes a augmenté de 2,71 % et celui des résidences secondaires de 0,6 %.
Par ailleurs, les communes touristiques bénéficient de recettes spécifiques non négligeables et dynamiques. Le produit est affecté aux dépenses destinées à favoriser la fréquentation touristique de la commune. En 2012, le produit de la taxe de séjour, qui représentait 236 millions d'euros, en hausse de 6,8 % par rapport à 2011, et celui de la taxe sur les entreprises exploitant des engins de remontée mécanique, qui s'élevait à près de 34 millions d'euros en 2014, leur sont également affectés, ainsi que le prélèvement sur le produit des jeux dans les casinos.
On relèvera qu'une part importante des ressources des communes touristiques échappe à la notion de potentiel financier. En effet, cet indicateur n'intègre ni la taxe de séjour ni celle sur les remontées mécaniques. Le Gouvernement a reporté l'entrée en vigueur de la réforme, mais celle-ci, définie dans l'article 58 du projet de loi de finances pour 2016, vise à réduire le poids des composantes figées dans la répartition des attributions et à renforcer la prise en compte de la réalité physique et financière d'un territoire.
Elle tient compte de la population DGF, des charges de ruralité par le biais de la notion de sous-densité et des charges de centralité mesurées à l'échelle intercommunale. Les spécificités des communes touristiques s'intègrent naturellement dans ces composantes, qu'il s'agisse du poids des résidences secondaires dans la population, de l'entretien d'espaces étendus ou de l'attractivité d'une commune au sein de son territoire.
Enfin, vous savez que nous avons pris des dispositions spécifiques pour les stations représentant une marque. Sur ce point, vous avez obtenu satisfaction. Quant à l'évolution des finances, la prise en compte de cette population DGF est trop souvent oubliée. Il faudrait faire un calcul, commune par commune, pour voir l'avantage réel de chaque commune touristique, sachant que le statut des offices de tourisme spécifiques représentant une marque sera gravé dans le marbre de la loi.
M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.
M. Didier Quentin. Madame la ministre, je prends acte de votre réponse et vous en remercie. Toutefois, je me permets d'insister sur la nécessité d'un dialogue entre le Gouvernement et les associations d'élus du littoral et de la montagne sur la question d'une DGF majorée pour nos stations, ainsi que d'une clarification sur le rôle des offices de tourisme en matière de promotion touristique.
Il y aurait, d'ailleurs, une certaine cohérence, au moment même où le ministre des affaires étrangères, en charge du tourisme, a souligné dans les conclusions du rapport du Conseil de promotion du tourisme la notion de marque, à laquelle vous avez fait allusion, notamment pour nos stations balnéaires et de montagne, en termes d'attractivité touristique.
Auteur : M. Didier Quentin
Type de question : Question orale
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Décentralisation et fonction publique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2015