ressources
Question de :
M. Arnaud Viala
Aveyron (3e circonscription) - Les Républicains
M. Arnaud Viala attire l'attention de Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique sur l'inquiétude grandissante de nombreux élus, notamment dans les zones rurales fragiles, confrontés à une baisse drastique des dotations de l'État tout en se voyant transférer de plus en plus de compétences et imposer des réformes coûteuses, comme les nouveaux rythmes scolaires, dans un cadre fiscal nouveau qui limite grandement leurs marges de manœuvre. En effet, dès 2014, en raison de la baisse des dotations de l'État, l'investissement des communes et intercommunalités a baissé de 12,4 %, ce qui a eu des répercussions sur le tissu économique local et l'emploi principalement dans les zones rurales. La politique actuelle conduit à court terme à la désertification totale de certaines zones interstitielles. Il souhaiterait savoir quelles mesures il entend prendre afin que les économies, nécessaires au demeurant, ne se fassent en premier lieu sur les dépenses d'investissement, créatrices d'emplois et génératrices de richesses.
Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2015
CONSÉQUENCES DE LA BAISSE DES RESSOURCES DES COMMUNES ET DES INTERCOMMUNALITÉS EN ZONE RURALE
M. le président. La parole est à M. Arnaud Viala, pour exposer sa question, n° 1175, relative aux conséquences de la baisse des ressources des communes et des intercommunalités en zone rurale.
M. Arnaud Viala. Madame la ministre la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, comme de très nombreux collègues ici, je vous ai interrogée, à plusieurs reprises, sur les conséquences dramatiques et inévitables de vos décisions en matière de baisse des dotations aux collectivités territoriales et, plus précisément, au bloc communal. Ma question porte sur les points les plus urgents.
Que dire, en premier lieu, au tissu des PME et des TPE qui ont perdu, à cause de ces mesures, jusqu'à 50 % de leurs carnets de commandes, comme c'est le cas dans le secteur du bâtiment et des travaux publics ?
Que faire, en second lieu, lorsque le dispositif particulièrement inégalitaire de péréquation horizontale qui est en vigueur s'ajoute, comme une double peine, à la baisse des dotations, en pénalisant les collectivités les plus dynamiques ? Celles-ci cherchent en effet, pour contourner cette baisse, à se doter de ressources, notamment par le biais du déploiement d'activités économiques : il s'agit d'un réel problème.
Dans ce contexte, comment faire face, en troisième lieu, aux dépenses nouvelles issues de transferts de l'État ? Même si je sais, madame la ministre, que vous n'aimez pas qu'on vous le rappelle, les temps d'activité péri-éducatifs, issus de la réforme des rythmes scolaires, pèsent lourdement sur les budgets des communes.
C'est également le cas de la création de maisons de santé, dont la création pèse lourdement sur les budgets des collectivités les plus fragiles dans les territoires les plus défavorisés. Pour autant, cette création, tout comme celle de maisons de services au public, est tout à fait nécessaire à la survie des services de proximité aux populations.
Je souligne que, dans ces mêmes territoires, les élus ont, notamment au sein des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, à cœur de porter des projets pour leur territoire. Or leur mise en œuvre nécessite, bien entendu, des moyens.
Enfin, pour aborder un sujet qui a également été largement évoqué ici, qui paie pour le déploiement des technologies mobiles et numériques, que nos concitoyens attendent avec impatience et qui n'arrivent pas par le biais du plan national mis en œuvre par le Gouvernement jusqu'aux zones les plus défavorisées ? Plus précisément, si elles bénéficient de ce déploiement, ce n'est que grâce à la contribution monétaire du contribuable local, puisque les EPCI sont appelés à financer, en grande partie, le déploiement de la montée en débit ou de la fibre. Ces schémas extrêmement onéreux s'inscrivent en outre dans un contexte très difficile sur le plan budgétaire.
Sans volonté polémique, je voudrais, madame la ministre, que vous me disiez, à cet instant, quelle est votre vision de l'aménagement, demain, du territoire national. En outre, quelle est votre vision de la répartition de la population au sein de ce même territoire ?
En effet, nous faisons aujourd'hui le constat suivant : en dehors des zones métropolitaines urbaines à forte concentration de population – qui présentent par ailleurs d'autres inconvénients en termes de sécurité, d'équilibre économique et de sécurité sociale –, il devient de plus en plus difficile de maintenir le minimum vital que nous devons garantir à nos populations pour qu'elles restent dans les territoires concernés et de développer des projets permettant un essor et une dynamique, en dépit des volontés très fortes exprimées localement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le député, on ne polémique bien évidemment pas sur de tels sujets, même si nous savons, vous comme beaucoup de vos collègues appartenant à la formation politique dont vous êtes membre, qu'il fallait faire baisser la dépense publique et que notre déficit était beaucoup trop élevé.
Un tel mouvement ne peut s'opérer sans toucher aux trois grands postes de la dépense publique que sont l'État, les collectivités territoriales et, malheureusement, la santé. Cette décision a été prise : elle est difficile à assumer, et aucun ministre de la décentralisation ne rêve de baisser les dotations aux collectivités locales.
Cela dit, nous avons essayé d'être justes, c'est-à-dire de ne toucher qu'à 1,9 % des recettes réelles de fonctionnement. Mais vous avez mis le doigt sur un point extrêmement important : il faut que nous soyons très clairs sur la nécessité d'opérer une péréquation.
La péréquation horizontale, qui a d'ailleurs été mise en place – au travers du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC – avant notre arrivée au pouvoir, c'est-à-dire par la précédente majorité, composée pour l'essentiel de représentants de votre famille politique, a bien pris en compte le fait qu'il n'était pas possible de doter toutes les collectivités territoriales de la même façon.
Dans le même temps, nous avons choisi, dès le projet de loi de finances pour 2016 – et le mouvement se poursuivra, je l'espère, par la suite – d'augmenter cette péréquation de 317 millions d'euros au bénéfice du bloc communal, soit 180 millions au titre de la dotation de solidarité urbaine, la DSU, et 118 millions au titre de la dotation de solidarité rurale, la DSR, et 20 millions répartis entre la dotation de fonctionnement minimale, la DFM, et la dotation de péréquation urbaine, la DPU.
De la même façon, nous avons largement augmenté la dotation d'équipement des territoires ruraux, la DETR, c'est-à-dire les subventions d'équipement aux collectivités.
Aujourd'hui, à l'heure où je vous parle, tout n'a pas encore été dépensé : il faut donc que nous regardions de près, avec l'ensemble des représentants du Gouvernement sur les territoires ainsi que des élus qui le veulent bien, comment mieux utiliser, par exemple, l'enveloppe des 500 millions d'euros qui vient d'être fléchée vers l'investissement dans ces communes, notamment pour les baux ruraux.
Comment susciter l'investissement local en privilégiant l'autofinancement ? Comment – et je passe sur le fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, qui va être préfinancé au moyen de prêts à taux zéro ce que, je l'ai constaté, beaucoup de maires ignorent, alors qu'il s'agit de masses de trésorerie –, va-t-on faire prendre en compte le fait que l'entretien du patrimoine va donner droit à du FCTVA ?
Ces évolutions visent, en définitive, à rétablir l'équilibre entre le fonctionnement et l'investissement. C'est d'ailleurs sur l'autofinancement net qu'il faut que nous soyons les meilleurs, d'autant, je vous le rappelle, qu'il faut dire à nos entrepreneurs que cette baisse des dotations a eu pour contrepartie le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le CICE.
Tout cela devra être largement discuté. Quoi qu'il en soit, je suis à la disposition des élus pour examiner les cas dans lesquels l'autofinancement net devient, hors mutualisation et hors équilibre intercommunal, dramatique pour l'équipement des communes concernées.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Viala.
M. Arnaud Viala. Madame la ministre, s'agissant de la DETR, si elle n'est pas intégralement consommée, ce que l'on constate dans les départements, c'est précisément parce que fait défaut la capacité à investir.
Je vous demande qu'avant la fin du processus de baisse de la dotation globale de fonctionnement au bloc communal, nous puissions réaliser un audit, département par département, afin de bien identifier la situation actuelle de chaque commune et de chaque EPCI.
Pour le département de l'Aveyron, je me porte volontaire pour vous accompagner, évidemment en lien avec les services de l'État, dans cette démarche.
Auteur : M. Arnaud Viala
Type de question : Question orale
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Décentralisation et fonction publique
Ministère répondant : Décentralisation et fonction publique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2015