Question orale n° 1182 :
matériel électrique et électronique

14e Législature

Question de : Mme Geneviève Fioraso
Isère (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Geneviève Fioraso appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la situation actuelle de l'entreprise franco-italienne STMicroelectronics, implantée notamment dans l'agglomération grenobloise qui compte 6 000 emplois directs et 4 fois plus d'emplois en amont et en aval. Ce centre est menacé par la vision court-termiste de ses dirigeants, qui ont annoncé un plan de réduction du secteur digital, majoritairement localisé à Grenoble. L'entreprise souffre aujourd'hui d'un manque de vision stratégique qui se traduit par un niveau d'investissement très insuffisant, à hauteur de 7 % de son chiffre d'affaires global contre 20 % pour les leaders du secteur. Pourtant, le potentiel technologique est reconnu, notamment grâce aux perspectives très porteuses du FD-SOI (Fully depleted - silicon on insulator). Des propositions de nature à redonner des perspectives à cette entreprise existent, à la hauteur des investissements publics consentis depuis 20 ans et de son potentiel dans de nombreux secteurs d'application : réduire le niveau de dividendes versés aux actionnaires, conforter et relancer le modèle intégré de l'entreprise, développer résolument une stratégie européenne. Elle souhaite connaître les actions que mènera en ce sens l'État actionnaire français et le calendrier dans lequel elles s'inscriront, sachant que le temps presse dans un secteur aussi concurrentiel à l'international.

Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2015

SITUATION DE L'ENTREPRISE STMICROELECTRONICS
M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour exposer sa question, n°  1182, relative à la situation de l'entreprise STMicroelectronics.

Mme Geneviève Fioraso. Monsieur le secrétaire d'État chargé du budget – et non M. le ministre de l'économie, donc – je souhaite appeler votre attention sur la situation actuelle de l'entreprise franco-italienne STMicrocroelectronics, qui représente plus de 6 000 emplois directs et quatre fois plus d'emplois en amont et en aval dans l'agglomération grenobloise.

STMicroelectronics est la locomotive d'un écosystème local exemplaire qui forme le plus grand centre d'expertise européen en micro et nanoélectronique.

Ce centre est menacé par la vision court-termiste des dirigeants actuels de la société, qui ont annoncé un plan de réduction du secteur digital majoritairement localisé à Grenoble et qui concerne plus de 2 000 emplois. Ils ne proposent aucune stratégie alternative pour répondre à un marché qui connaît pourtant un fort développement, en particulier pour l'Internet des objets.

L'entreprise souffre aujourd'hui d'un manque de vision stratégique qui se traduit par un niveau d'investissement très insuffisant, à hauteur de 7 % de son chiffre d'affaires global contre 20 % pour les leaders du secteur.

Pourtant, son potentiel technologique est internationalement reconnu, notamment grâce aux perspectives très porteuses du FD-SOI, en lien avec la société locale Soitec, des microcontrôleurs et des imageurs nouvelle génération.

L'État français est actionnaire à hauteur de 13,5 %, comme l'État italien.

L'intersyndicale, qu'Emmanuel Macron a reçue à la fin du mois de novembre – ce dont je le remercie –, est elle aussi très mobilisée pour la défense d'une stratégie industrielle de long terme préservant l'emploi.

À l’issue du rendez-vous que le ministre nous a accordés avec les parlementaires Éliane Giraud, Michel Destot et Pierre Ribeaud, je lui confirme donc trois propositions visant à donner des perspectives à cette entreprise à la hauteur des investissements publics nationaux et régionaux consentis depuis plus de 20 ans et de son potentiel dans de nombreux secteurs d'application : systèmes critiques de la défense et du nucléaire, aéronautique, télécoms, automobile, énergie, Internet des objets.

Je propose de réduire le niveau de dividendes aux actionnaires – dont le montant est disproportionné par rapport aux résultats – au profit d'investissements ciblés et stratégiques.

Je propose également de conforter et de relancer le modèle intégré de STMicroelectronics, de la R&D à la production industrielle de systèmes intelligents miniaturisés, qui seul assure la maîtrise du développement de nombreuses applications et des emplois associés.

Enfin, je propose de développer résolument une stratégie européenne car le maintien d'une filière des semi-conducteurs est un enjeu de souveraineté et de compétitivité pour l'Europe, avec un soutien financier à la hauteur des besoins de cette industrie très capitalistique. C'est le projet « Airbus of chips » défendu par Jean-Jack Queyranne et les exécutifs des régions Rhône-Alpes et Basse-Saxe en Allemagne – à Dresde – avec le soutien financier très important de l'État fédéral.

Je vous remercie de bien vouloir indiquer les actions que mènera en ce sens l'État actionnaire français sous l'impulsion du ministre de l'économie ainsi que le calendrier dans lequel elles s'inscriront, sachant que le temps presse dans un secteur aussi concurrentiel sur le plan international.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Madame la députée, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Emmanuel Macron, auquel je ne manquerai pas de faire part de vos propositions – il les connaît, d'ailleurs – de même que des remarques éventuellement inspirées par ma réponse.

STMicroelectronics est une entreprise essentielle dans un secteur stratégique pour la France et l'Europe. Cela est vrai tant en termes industriel que social mais, aussi, pour la maîtrise et l'approvisionnement de l'Europe en technologies clefs pour de nombreuses industries de pointe telles que l'aéronautique ou le spatial.

STMicroelectronics représente aujourd'hui près de 11 000 emplois en France.

Le Gouvernement a pleinement conscience des difficultés que rencontre actuellement cette entreprise, qui se traduisent en particulier par des pertes sur ses activités de composants pour décodeurs numériques.

Nous sommes pleinement mobilisés en lien étroit avec le gouvernement italien, partenaire avec lequel s'est construite l'histoire de STMicroelectronics, pour trouver des solutions aux difficultés actuelles.

L'ensemble de la filière microélectronique fait l'objet d'un soutien de l'État dans le cadre des investissements d'avenir et des solutions proposées dans le cadre de la Nouvelle France industrielle – STMicroelectroniques tenant un rôle central dans cette filière.

Le Gouvernement soutient également la mise en place d'une stratégie renouvelée de création de valeur et de reconquête de parts de marché au sein de cette entreprise.

Nous sommes convaincus du potentiel et de l'avantage compétitif que représente le large panel de technologies dont dispose STMicroelectronics pour lui permettre de se positionner avec succès sur des marchés porteurs tels que l'automobile connectée ou l'Internet des objets.

C'est l'établissement de cette stratégie qui devrait conditionner toute décision quant à l'avenir de ses différentes activités, en France comme en Italie.

Pour accompagner le développement de STMicroelectronics et de l'ensemble de la filière en France, nous soutenons aussi la constitution d'un large écosystème européen autour d'une technologie maîtrisée par STMicroelectronics, appelée FD-SOI.

Cette action s'est traduite récemment par l'annonce d'une collaboration entre la France et l'Allemagne qui a été faite à l'issue de la conférence franco-allemande sur le numérique du 27 octobre dernier.

Il appartient à l'entreprise de prendre ses décisions mais, vous le constatez, nous veillons à ce qu'elles relèvent d'un projet industriel crédible.

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Mme Geneviève Fioraso. Il me reste deux secondes mais cela suffira pour dire, précisément, que le temps presse vraiment, la concurrence internationale allant très vite dans un secteur aussi stratégique que l'espace, par exemple, mais qui touche également les activités de la défense et du nucléaire.

Je le répète : je serai très vigilante quant aux évolutions de ce secteur stratégique.

Données clés

Auteur : Mme Geneviève Fioraso

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique

Ministère répondant : Économie, industrie et numérique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2015

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