régions
Question de :
M. Michel Vergnier
Creuse (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Michel Vergnier interroge Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique sur la réorganisation des services de l'État dans la nouvelle région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes.
Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2015
RÉORGANISATION DES SERVICES DE L'ÉTAT DANS LA RÉGION AQUITAINE-LIMOUSIN-POITOU-CHARENTES
M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier, pour exposer sa question, n° 1190, relative à la réorganisation des services de l'État dans la région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes. Cette question s'adresse à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, dont je salue l'arrivée sur nos bancs.
M. Michel Vergnier. Je salue également Mme la ministre, et suis très heureux qu'elle puisse me répondre directement.
Lors du premier tour des élections régionales, on a de nouveau enregistré un taux d'abstention record ainsi qu'une forte poussée des extrêmes, avec des scores jamais atteints dans les communes rurales. Ce mouvement général de recul de la participation s'est d'ailleurs constaté partout en France.
Certaines raisons à ce phénomène sont connues, et je veux mettre en évidence l'inquiétude manifestée par les électrices et les électeurs au sujet de la gouvernance des nouvelles régions, s'agissant du rôle de l'État. En effet, beaucoup de nos concitoyens craignent que les centres de décision soient beaucoup plus éloignés qu'ils ne l'étaient auparavant, éloignés géographiquement mais aussi déconnectés de leurs préoccupations quotidiennes. Ce sentiment d'abandon s'est manifesté dans les urnes.
Que deviendrons-nous ? Nous les petits, existerons-nous encore ? N'allons-nous pas être encore plus marginalisés ? Les principales préoccupations tiennent davantage à la vie quotidienne qu'au développement économique, question qui paraît plus lointaine. C'est le cas, par exemple, pour la santé, avec les nouvelles agences régionales de santés – ARS – ; pour l'éducation, avec les rectorats ; pour l'agriculture et la forêt ; pour le soutien aux actions culturelles, enfin, avec les directions régionales des affaires culturelles – DRAC –, ou pour le soutien aux associations sportives.
Les compétences des nouvelles régions ont été définies ; elles doivent être clarifiées pour devenir plus lisibles, et pour que chacun mesure que tous les territoires seront accompagnés de la même façon, avec en ligne de mire la lutte contre le sentiment de relégation et d'isolement.
Chaque territoire, nous le savons tous deux, madame la ministre, a sa propre richesse, ses talents, ses projets souvent innovants. Aucun d'entre eux ne peut être laissé pour compte en raison de sa superficie, de sa démographie ou de sa situation géographique. Penser local, agir territorial : telle doit être la règle. Pour cela, les relais seront nécessaires.
Enfin, les personnels ont aussi besoin d'être rassurés quant à leur avenir. Ils craignent pour leur carrière et pour leur affectation.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous apporter à ce stade un certain nombre d'éclaircissements sur les actions régaliennes, ou à tout le moins expliciter la vision du Gouvernement sur ce sujet crucial ? Selon quel calendrier et quelles méthodes les nouvelles réorganisations seront-elles mises en place ? Des mesures d'accompagnement sont-elles prévues, y compris de façon temporaire ? Je vous remercie des réponses que vous voudrez bien apporter à tous ces territoires.
M. le président. Nous y serons tous attentifs. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Vous êtes un défenseur reconnu de l'action publique dans les territoires, monsieur Vergnier. En janvier prochain, la nouvelle carte des régions entrera en vigueur ; et je partage la description que vous avez faite d'une forme de peur et de sentiment d'abandon : cela s'est peut-être traduit dans un certain nombre de votes ou d'abstentions dimanche dernier.
Nous devons donc remettre le dossier sur la table, non sans avoir rappelé ce qui a déjà été décidé. Dès le début du mois de janvier, dans chaque région fusionnée, il y aura un seul préfet de région, un seul recteur de région académique, un seul directeur général d'agence régionale de santé et un seul directeur régional pour chaque réseau ministériel. En moins d'un an, l'État aura donc dû s'adapter à la nouvelle carte régionale.
Il doit aussi s'appuyer, dans cette réorganisation, sur les propositions locales et les spécificités territoriales. C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, les préfets chargés de la préfiguration des nouvelles régions, avec l'ensemble des équipes régionales de l'État, ont essayé – sans toujours y réussir, ils en sont conscients – de nouer un dialogue de qualité avec les élus que vous êtes et les organisations syndicales.
Vos légitimes préoccupations nous interpellent néanmoins, car elles signifient que nous ne sommes pas au bout de la démarche. Nous avons entendu, notamment, les questions qui touchent à la diversité des territoires. Votre région, monsieur le député, est une grande région ; aussi n'est-il pas facile d'y mettre l'action publique en bon état de marche – le succès sera au rendez-vous, je n'en doute pas, et la qualité des fonctionnaires n'est pas du tout en cause, mais je parle ici de l'appréciation qui peut être portée par nos concitoyens.
La direction régionale de l'équipement, de l'aménagement et du logement, la DREAL, aura son siège à Poitiers avec celui de la direction régionale de l'INSEE, ce qu'imposait la nécessité de reconnaissance des sites.
La direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, la DRAAF, sera quant à elle installée à Limoges, de même que la future commission du contentieux du stationnement payant, non à des fins de meilleure efficacité, mais parce qu'il convient de répartir les postes de fonctionnaires sur les territoires.
Il faut donc répartir les postes de fonctionnaires entre ces deux villes. Dans chacune d'entre elles, l'actuel rectorat conservera non pas la mainmise ni la direction de l'action, car il ne subsistera plus qu'un seul rectorat d'académie, mais la proximité nécessaire pour discuter de l'évolution des outils mis à la disposition des enseignants et des personnels.
Nous devons discuter ensemble de l'emploi public régional et de son maintien, car il doit, à mon sens, être maintenu. J'ai dit aux organisations syndicales, comme aux élus, qu'il fallait un minimum de mobilité. Certes, il y aura des mobilités obligatoires, mais comme il en a toujours existé dans la fonction publique.
Toutefois, cela ne suffira pas. Notre démarche visera à atteindre un équilibre : l'État restera présent, car il faut que notre drapeau flotte sur les territoires, même si nous sommes tous décentralisateurs. Mais, dans le même temps, il faut que le fameux dispositif, qui vise aujourd'hui à favoriser les expérimentations, permette de répondre à cette question : comment les services de l'État, aux côtés des collectivités territoriales, peuvent permettre à des projets qui sont aujourd'hui bloqués d'émerger ? Pourquoi sont-ils bloqués ? Parce que, dans nos collectivités territoriales les moins favorisées, l'ingénierie fait défaut.
Tels sont les sujets sur lesquels je vous propose de former un groupe de travail, autour du ministère de la décentralisation et de la fonction publique, et avec la collaboration des ministères de l'intérieur et du logement et de l'égalité des territoires. Il nous permettra de mieux avancer sur les sujets que vous avez évoqués et qui peuvent se résumer ainsi : comment lutte-t-on contre le sentiment d'abandon ?
À la demande du Premier ministre, et même s'il pense que sur ce sujet nous ne sommes pas allés assez loin, une telle démarche a déjà été adoptée s'agissant des ruralités.
M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier.
M. Michel Vergnier. La réponse de Mme la ministre ayant été très complète, je n'ai pas grand-chose à ajouter. J'accepte évidemment avec plaisir cette proposition de groupe de travail. Notre action dans les territoires nous permet de connaître la réalité – vous la connaissez aussi, madame la ministre – de leur fonctionnement.
Nous savons à ce titre que, lorsqu'un dossier est abordé, il faut qu'il puisse être traité rapidement, car cela fait notre force. Il faut ensuite que nous autres, élus, puissions en suivre le cheminement.
Madame la ministre, je suis donc très favorable à la méthode de travail que vous avez proposée, et je serai à vos côtés si ma participation à ce groupe de travail est souhaitée.
Auteur : M. Michel Vergnier
Type de question : Question orale
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Décentralisation et fonction publique
Ministère répondant : Décentralisation et fonction publique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2015