maisons d'arrêt
Question de :
M. Gérard Menuel
Aube (3e circonscription) - Les Républicains
M. Gérard Menuel attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la grande vétusté de la maison d'arrêt de Troyes, ainsi que la surpopulation carcérale récurrente. Alors que la surpopulation carcérale est générale en France, elle l'est d'autant plus à la maison d'arrêt de Troyes, prévue pour seulement 116 places et qui atteint régulièrement les 160 détenus. De plus, la maison d'arrêt est en grande vétusté et il est impossible de la réhabiliter. Cette situation est non seulement indigne pour les détenus et leurs familles, mais pose également des questions concernant la sécurité du personnel qui a de nouveau récemment manifesté sa colère. À cela s'ajoute la réduction du nombre de places à la prison de Villenauxe-la-Grande par manque de personnel. Pourtant, un projet de construction d'une nouvelle prison de 400 places était prévu à Lavaux et avait recueilli l'avis favorable de tous les acteurs du terrain et l'État en 2011. Ce projet d'importance a été annulé par l'État en 2012. Il souhaite savoir si le Gouvernement entend amorcer à nouveau ce projet pour répondre aux normes d'incarcération en vigueur qui ne sont pas respectées à la maison d'arrêt actuelle.
Réponse en séance, et publiée le 30 mars 2016
MAISON D'ARRÊT DE TROYES ET CONSTRUCTION D'UNE NOUVELLE PRISON À LAVAU
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Menuel, pour exposer sa question, n° 1338, relative à la maison d'arrêt de Troyes et à la construction d'une nouvelle prison à Lavau.
M. Gérard Menuel. Monsieur le garde des sceaux, ministre de la justice, dans le département de l'Aube, le secteur pénitentiaire, dont vous avez la charge, suscite de nombreuses et légitimes interrogations, c'est un euphémisme !
Au centre de détention de Villenauxe-la-Grande, tout d'abord, il a fallu fermer un bâtiment afin de ne pas compromettre la sécurité de l'établissement, auquel il manque la bagatelle de cinquante agents de surveillance pour fonctionner normalement. La situation se dégrade depuis plusieurs années et je veux saluer ici le courage des agents de votre administration, qui travaillent dans des conditions pour le moins compliquées.
Ma première question concerne donc le centre de Villenauxe-la-Grande : à quand le retour à une situation normale ? Il faut en effet que soit mis fin à cette situation inextricable de fermeture partielle, faute de personnel.
Sachez que la situation de Villenauxe-la-Grande a des répercussions négatives sur la situation de la maison d'arrêt de Troyes. Cet établissement reçoit en effet des condamnés en surnombre, dans des conditions d'un autre âge, et les agents y travaillent également dans un contexte très difficile et non sécurisé.
Ma seconde question concerne cette maison d'arrêt de Troyes. Il y a cinq ans, un projet de construction d'une nouvelle prison a été envisagé. Au terme de la concertation locale, un site de quinze hectares, situé dans la commune de Lavau, à proximité de Troyes, a été réservé. Mais, depuis lors, c'est le silence ou presque. Quelques collaborateurs de votre prédécesseur sont venus sur place constater la gravité de la situation : celle d'une prison indigne de notre époque.
Monsieur le garde des sceaux, dans cet hémicycle, lors d'une séance de questions au Gouvernement, vous avez annoncé la construction de 15 000 nouvelles places de prison. Pouvez-vous, ce matin, nous dire où en est le projet de construction de la prison de Lavau ? Il nous a été dit qu'il n'était pas abandonné mais simplement gelé. Quand ce dossier sera-t-il dégelé ?
Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, je m'efforcerai de répondre le plus précisément possible à vos deux questions, en commençant par l'aspect immobilier, par lequel vous avez terminé votre propos.
Ce n'est pas à vous que je décrirai la maison d'arrêt de Troyes : j'ai découvert, en consultant le dossier, qu'il s'agissait d'un ancien couvent des cordeliers datant de 1258, c'est-à-dire du XIIIe siècle, qui n'a été transformé en prison qu'au XIXe siècle. Son implantation en centre-ville, son emprise foncière et la configuration de ses locaux rendent effectivement impossible d'envisager une augmentation de sa capacité.
Par conséquent, je vous confirme que le ministère a en projet la création d'un nouvel établissement de 520 places, à Lavau, dans le même département. Ce projet n'est pas abandonné, j'en prends l'engagement devant vous : j'ai vérifié que les crédits nécessaires sont bien inscrits au programme triennal 2015-2017. Les études seront conduites en 2016 et, à ce stade, la livraison est prévue pour 2022.
D'ici là, comme c'est le cas depuis que cet établissement accueille des détenus, des travaux d'entretien seront évidemment programmés pour permettre la poursuite de l'exploitation. Vous savez – mieux que moi, d'ailleurs – que bien des transformations lui ont été apportées, ce qui a modifié son aspect extérieur comme l'intérieur des bâtiments.
J'en viens aux questions de la surpopulation et des personnels.
Dans le document que vous m'avez préalablement transmis, vous protestez, et vous avez raison, contre la surpopulation carcérale dans la maison d'arrêt de Troyes : au 1er mars 2016, 181 personnes y étaient détenues, alors que sa capacité est de 114 places, soit un taux d'occupation de 158 %.
Cette sur-occupation est préjudiciable à tous : évidemment aux personnes détenues mais elle menace aussi la sécurité des personnels servant dans l'établissement. J'ai d'ailleurs noté qu'une manifestation avait eu lieu, le 17 février dernier, à l'initiative du syndicat Force ouvrière de cet établissement, afin de protester contre cette sur-occupation. J'avais d'ailleurs déjà observé, en octobre, qu'un certain nombre de personnels de l'établissement s'étaient déjà exprimés dans ce sens. Je saisis d'ailleurs l'occasion pour saluer les personnels de l'établissement – au nombre de trente-huit, à ma connaissance – ainsi que le commandant Francis Césari, qui le dirige.
Pour répondre à cette situation, il faut évidemment agir de deux manières : d'abord en construisant des places de prison – j'ai pris un engagement en ce sens –, ensuite en procédant à des réorganisations. J'ai, en conséquence, demandé à la direction interrégionale des services pénitentiaires de Dijon de mener une politique de transferts, en priorisant les affectations dans d'autres centres de détention de l'inter-région Centre-est.
Voilà, monsieur le député, les éléments de réponse que je peux vous apporter. Je veux évidemment vous assurer de ma détermination à conduire une politique dans laquelle les conditions de travail et de détention ne s'opposent pas. Toutes deux contribuent en effet à garantir la sécurité et la dignité des personnes détenues comme celles des personnels de l'administration pénitentiaire.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Menuel.
M. Gérard Menuel. Je salue la connaissance du dossier de la maison d'arrêt de Troyes dont a fait preuve M. le garde des sceaux, tout comme la précision de sa réponse.
Auteur : M. Gérard Menuel
Type de question : Question orale
Rubrique : Système pénitentiaire
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 mars 2016