politiques communautaires
Question de :
M. Guy Teissier
Bouches-du-Rhône (6e circonscription) - Les Républicains
M. Guy Teissier appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur la proposition de créer une garde-côte européenne. L'Europe connaît aujourd'hui une grave crise des migrations qui l'affecte en profondeur, notamment à partir du bassin méditerranéen, qui oblige à renforcer le contrôle des frontières extérieures de l'Union européenne et assurer la sécurité de l'espace Schengen. La Commission européenne a ainsi proposé la création d'un corps pour intervenir aux frontières extérieures mais cela semble poser plusieurs difficultés en matière de souveraineté. La police en mer est subordonnée à une volonté politique formellement exprimée par l'État. Par ailleurs le niveau d'intégration politique actuel des pays européens ne permet pas d'imaginer que l'Union pourrait endosser cette responsabilité, du moins à court ou moyen terme. L'idée de garde côte européenne intégrée constituerait une forme de « communautarisation » alors que jusqu'à présent les coopérations locales opérationnelles ont montré leur efficacité. Aussi il aimerait connaître sa position en la matière et savoir si la France va peser de tout son poids pour demander a contrario le recoupement des informations, l'intégration réelle et performante des systèmes d'information des différences agences européennes et des États membres dans un cadre strict, seule garantie d'efficacité.
Réponse en séance, et publiée le 27 avril 2016
GARDE-CÔTE EUROPÉENNE INTÉGRÉE
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Teissier, pour exposer sa question, n° 1393, relative à une garde-côte européenne intégrée.
M. Guy Teissier. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense et concerne effectivement la proposition de créer une garde-côte européenne.
Nous connaissons aujourd'hui une grave crise des migrations, qui affecte l'Europe en profondeur, notamment à partir du bassin méditerranéen, ce qui nous oblige à renforcer le contrôle des frontières extérieures de l’Union européenne et assurer la sécurité de l'espace Schengen.
La Commission européenne a ainsi proposé la création d'un corps pour intervenir aux frontières extérieures, mais cela semble poser plusieurs difficultés, essentiellement en matière de souveraineté, car la police en mer est subordonnée à une volonté politique formellement exprimée par l'État.
L'emploi du vocable « garde-côte », complétant celui de « gardes-frontières », n'est pas approprié. En effet, une garde-côte est l'expression d'une volonté politique à la fois globale et très particulière pour agir en mer, c'est-à-dire dans un espace non assimilable aux espaces terrestres sous souveraineté d'un État. Il y a une grande différence entre une garde-frontières au sens de Schengen et une garde-côte au sens commun, qui implique de nombreuses autres missions appartenant pleinement au domaine de la souveraineté nationale.
Le niveau d'intégration politique actuel des pays européens ne permet sûrement pas d'imaginer que l'Union pourrait endosser cette responsabilité, du moins à court ou moyen terme.
L'idée de garde-côte européenne intégrée constituerait une forme de « communautarisation » alors que, jusqu'à présent, les coopérations locales opérationnelles ont montré leur efficacité pleine et entière, et nous avons de nombreux exemples.
Ainsi, il me semble que l'approfondissement de la coopération effective entre les trois agences européennes et le renforcement de leurs actions communes sont préférables à la création d'une supra-agence, qui serait très difficile à mettre en œuvre.
Aussi, je souhaiterais connaître la position du ministre de la défense en la matière et savoir si la France va peser de tout son poids pour demander le recoupement des informations, l'intégration réelle et performante des systèmes d'information des différences agences européennes et des États membres dans un cadre strict, seule garantie d'efficacité, me semble-t-il.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification.
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Tout d'abord, monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du ministre de la défense, retenu par une réunion opérationnelle.
La Commission européenne a présenté le 15 décembre 2015 devant le Parlement européen une série de mesures législatives visant à mieux sécuriser les frontières extérieures de l’Union européenne et à gérer de manière plus efficace les flux de migrants, tout en renforçant la sécurité intérieure de l'Union.
Ces mesures s'appuient sur plusieurs projets de règlements, notamment le nouveau règlement concernant l'agence FRONTEX, créée en 2004 pour coordonner la coopération opérationnelle des États membres aux frontières de l’Union européenne en matière de lutte contre l'immigration clandestine, sujet évidemment primordial aujourd'hui. L'introduction de la notion de garde-côte européenne dans ce texte a entraîné une réflexion sur l'opportunité de se doter d'un tel outil communautaire.
Les négociations entre la Commission et les États membres ont toutefois conduit à ce que la notion de garde-frontières et garde-côte européenne, présente dans le projet de nouveau règlement de FRONTEX, ne soit pas in fine retenue.
Comme vous le rappelez fort justement, dans le contexte sécuritaire et migratoire actuel, le renforcement de la coopération en mer est une nécessité absolue, dans le respect des attributions nationales de chaque État membre.
La France, avec la création d'une fonction de garde-côtes, a mis en place un dispositif permettant de répondre au besoin d'accroître la coordination de l'action de l'État en mer. Ce dispositif comprend notamment une instance de pilotage, le comité directeur de la fonction de garde-côtes et son groupe de travail permanent, et un centre de situation maritime unique, le centre opérationnel de la fonction garde-côtes.
Le ministère de la défense approuve la proposition faite à l'article 52 du projet de règlement, qui vise à renforcer la coopération entre les agences existantes, c'est-à-dire FRONTEX, l'AESM, l'Agence européenne de sécurité maritime, et l'AECP, l'Agence européenne de contrôle des pêches, au profit des autorités de chaque État membre en charge de la fonction garde-côtes.
Par ailleurs, au niveau européen, les administrations nationales de la fonction garde-côtes sont déjà fortement impliquées dans les actions pilotées par FRONTEX ou dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, la PESC. C'est notamment le cas dans l'opération Triton, en cours en Méditerranée centrale, à laquelle participent notamment notre pays et l'Italie.
Enfin, pour ce qui concerne le partage de l'information, de nombreux projets existent déjà mais, plus qu'un nouveau système, il conviendrait prioritairement de rechercher l'intégration des systèmes existants et la création de passerelles entre eux. C'est notamment ce qui a pu être réalisé au niveau des bassins maritimes régionaux, avec la mise en place des systèmes de surveillance en Atlantique, Seahorse Atlantico, comme en Méditerranée, Seahorse Mediterraneo.
J'espère, monsieur le député, que cette réponse est à la hauteur de l'importante question que vous avez posée au Gouvernement.
M. Guy Teissier. Merci, monsieur le secrétaire d'État.
Auteur : M. Guy Teissier
Type de question : Question orale
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : Défense
Ministère répondant : Défense
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 19 avril 2016