Question orale n° 1449 :
taux

14e Législature

Question de : M. Philippe Duron
Calvados (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Philippe Duron attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les conséquences de la modification du statut fiscal du pommeau pour les producteurs cidricoles normands. Les producteurs normands s'inquiètent des intentions de la commission de Bruxelles d'une modification de la définition des boissons alcoolisées relevant du code NC 2206. Une requalification des boissons définies dans cet article risque d'exclure le pommeau de Normandie. Or une hausse de la fiscalité sur ce produit aurait des conséquences financières importantes pour les producteurs cidricoles normands dont 20 % de la production de pommes se retrouve sous forme de pommeau. Par ailleurs, cette requalification constituerait une discrimination inacceptable dans la mesure où des productions similaires, comme le pineau des Charentes, resteraient classées et taxées comme des boissons fermentées et non classées en spiritueux. Il lui demande, afin de ne pas pénaliser une filière qui par ailleurs rencontre de grandes difficultés, de veiller à ce que le pommeau de Normandie puisse être maintenu dans son code fiscal actuel, le 2206.

Réponse en séance, et publiée le 4 mai 2016

STATUT FISCAL DU POMMEAU
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Duron, pour exposer sa question, n°  1449, relative au statut fiscal du pommeau.

M. Philippe Duron. Monsieur le ministre, je souhaiterais appeler votre attention sur les conséquences de la possible modification du statut fiscal du pommeau pour les producteurs cidricoles normands.

Les producteurs normands de cidre, de poiré, de pommeau et de Calvados s'inquiètent en effet des intentions de la Commission européenne de modifier la définition des boissons alcoolisées relevant de la NC 2206, qui concerne les produits intermédiaires et donc les produits fermentés comme le pommeau. Or, malgré l'addition d'alcool, le pommeau de Normandie conserve bien toutes les caractéristiques des produits classés dans cette catégorie de boissons fermentées, tant en termes d'arômes que de goût. Une requalification des boissons définies dans cet article risque d'exclure le pommeau de Normandie et le classer dans les spiritueux relevant de la NC 2208, soumis à une fiscalité plus importante.

Or une hausse des droits sur ce produit aurait des conséquences financières préoccupantes pour les producteurs cidricoles normands dont 20 % de la production de pommes se retrouve sous forme de pommeau. Par ailleurs, cette requalification constituerait une discrimination inacceptable dans la mesure où des productions similaires à base de raisin, comme le pineau des Charentes, resteraient classées et taxées comme des boissons fermentées et non classées en spiritueux.

Monsieur le ministre, dans le cadre de la révision du règlement de la Communauté européenne no 110-2008, je souhaiterais connaître la position que vous défendrez au niveau européen sur cette question essentielle pour une filière qui fait de grands efforts de qualité et qui cherche à se diversifier en élaborant des produits nouveaux – le cidre rosé, par exemple – et en recherchant de nouveaux marchés. Un tel classement aggraverait les difficultés que rencontre déjà actuellement la filière cidricole, à l'exemple de bien d’autres filières agricoles.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, je tiens tout d'abord à rappeler qu'un amendement, adopté au Sénat et à l’Assemblée dans le cadre de l'examen de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, a permis de reconnaître que, notamment le vin, produit de la vigne, ainsi que les cidres et poirés, font partie du patrimoine culturel, gastronomique et paysager protégé de la France. L'attachement du ministre à toutes ces boissons est connu et j'ai toujours revendiqué cette volonté. Je suis de l'Ouest comme vous, monsieur le député. Nous sommes l'un et l'autre attachés à notre histoire et à nos produits.

Il n'en reste pas moins vrai que le pommeau de Normandie est susceptible de faire l'objet d'un changement de statut, ce qui ne serait pas sans incidence notamment sur son maintien dans le statut d'indications géographiques – IG. En effet, ce produit bénéficie depuis 1997 de la fiscalité de la catégorie des produits intermédiaires – le code 2206 auquel vous avez fait référence. Dans le même temps, les indications géographiques de pommeau figurent à l'annexe III du règlement de la Communauté européenne no 110/2008 répertoriant les IG de boissons spiritueuses enregistrées par l'Union européenne : or ce règlement exclut de son champ d'application les produits de la catégorie 2206. Cette situation de double appartenance pose a priori un problème de compatibilité.

Les représentants des professionnels, inquiets de connaître le statut fiscal qui s’appliquerait désormais à leur produit, ont été reçus au ministère par mon cabinet le 24 février dernier. Ils ont rappelé leur attachement aux IG de pommeau et leur inquiétude quant à la possibilité pour la filière d'assumer une hausse de la fiscalité associée à un passage dans la catégorie des boissons spiritueuses – code 2208 au lieu du code 2206 –, lequel aurait cependant permis au pommeau d'être couvert par le règlement régissant les IG des boissons spiritueuses. Il y a donc contradiction entre, d’une part, la reconnaissance de l’IG qui entraîne un changement de fiscalité, et le maintien dans la fiscalité actuelle qui ne permet pas la reconnaissance de l’IG.

Concernant les aspects fiscaux, le Gouvernement, par la voix de Christian Eckert, a confirmé le classement du pommeau comme boisson intermédiaire sous le code 2206. Concernant la reconnaissance des IG qui y est liée, je tiens à rappeler mon attachement à ces indications qui sont à la fois porteuses de valeur ajoutée et de reconnaissance et garantes des savoir-faire traditionnels sur le long terme. Je suis donc favorable à ce que le pommeau continue à pouvoir bénéficier de cette protection.

L'ouverture prochaine des négociations pour la révision du règlement relatif aux IG des boissons spiritueuses constitue en ce sens une opportunité pour consolider juridiquement la protection du pommeau en tant qu'IG, tout en cherchant à préserver la fiscalité applicable aux produits intermédiaires comme le pommeau. Tel est l’objectif que je poursuivrai dans les négociations. Mes services, conjointement avec ceux des douanes, préparent donc dans cet esprit les discussions futures sur ce processus de révision du droit de l'Union européenne.

Nous chercherons donc à gagner sur les deux fronts, notre objectif étant de conserver une fiscalité spécifique tout en garantissant au pommeau de Normandie son indication géographique. Telle est la ligne du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. Je ne doutais pas de votre soutien, monsieur le ministre, et je vous accompagne évidemment de tous mes encouragements dans cette négociation à venir.

Données clés

Auteur : M. Philippe Duron

Type de question : Question orale

Rubrique : Tva

Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt

Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 avril 2016

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