catastrophes naturelles
Question de :
M. Olivier Falorni
Charente-Maritime (1re circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste
M. Olivier Falorni attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, sur la situation des propriétaires ayant acquis, avant le sinistre provoqué par le passage de la tempête Xynthia, des terrains constructibles situés sur des sites à présent classés zone de solidarité. Contrairement aux propriétaires d'habitations, aucune indemnisation n'a été envisagée en contrepartie de l'abandon de leur projet de construction, de l'abandon de leur propriété, et encore de la perte totale de la valeur foncière de leur bien. La mission d'information sur les conséquences de la tempête Xynthia a préconisé un rachat de ces terrains nus par l'État. À cette question déjà posée, le ministère évoque les conditions de mise en oeuvre du fonds de prévention des risques naturels majeurs pour refuser toute indemnisation. Devant cette criante injustice, il lui demande de bien vouloir l'informer des mesures envisagées, autres que le fonds Barnier, pour permettre une indemnisation justement proportionnelle à celle consentie aux propriétaires d'habitations.
Réponse en séance, et publiée le 1er mars 2013
CONSÉQUENCES DE LA TEMPÊTE XYNTHIA POUR LES
PROPRIÉTAIRES DE TERRAINS CONSTRUCTIBLES
M. Olivier Falorni. Cela fait trois ans, jour pour jour, que la tempête Xynthia s'est abattue sur nos côtes, causant la mort de cinquante-trois personnes et provoquant de très lourds dégâts - j'associe ainsi à ma question Mme Suzanne Tallard, dont la circonscription a également été durement frappée.
À la suite de ce drame, la solidarité nationale a joué son rôle : le Fonds de prévention des risques naturels majeurs a permis d'indemniser les propriétaires des habitations classées dans les zones dites noires, puis requalifiées en zones de solidarité.
Cependant un problème majeur demeure, concernant les propriétaires qui ont acquis, avant le passage de Xynthia, des terrains constructibles désormais classés en zone de solidarité.
Contrairement aux propriétaires d'habitations, aucune indemnisation n'a été envisagée en contrepartie de l'abandon de leur projet de construction, de l'abandon de leur propriété ou encore de la perte totale de la valeur foncière de leur bien.
À la question du rachat de ces terrains nus par l'État, vous évoquez les conditions de mise en oeuvre du FPRNM, pour refuser toute indemnisation. Or, selon le rapport fait au nom de la mission commune d'information sur les conséquences de la tempête Xynthia, un droit de délaissement pérenne, et de portée générale, devrait être instauré pour répondre à ce type de situation.
La commission souligne, à cet égard, qu'un mécanisme de délaissement a déjà été créé par la loi Bachelot du 30 juillet 2003 dans les zones exposées à un risque technologique majeur : il s'agit de la proposition n° 91 de la commission.
Dans ma circonscription, de nombreux propriétaires terriens sont aujourd'hui touchés par cette criante injustice.
Quelles mesures autres que le fonds Barnier, madame la ministre, les, allez-vous mettre en oeuvre pour permettre une indemnisation justement proportionnelle à celle consentie aux propriétaires d'habitations ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Il y a trois ans aujourd'hui, la tempête Xynthia causait la mort de cinquante-trois personnes sur le littoral et plus de 2,5 milliards d'euros de dommages.
Je tiens à exprimer mon soutien aux familles directement touchées par ce drame, ainsi que la solidarité de l'État vis-à-vis des élus et des collectivités territoriales qui ont subi cette tempête et qui se sont mobilisées dans les régions Poitou-Charentes et Pays de la Loire.
L'enjeu, désormais, est de tout mettre en oeuvre pour éviter qu'une telle catastrophe ne se reproduise et de prendre les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité des biens et des personnes.
Il est vrai que les décisions prises par l'État immédiatement après la tempête ont parfois été incohérentes. Elles ont d'ailleurs fait l'objet de travaux importants, qu'il s'agisse du rapport d'information de juillet 2010 des députés Maxime Bono et Jean-Louis Léonard ou du rapport de la Cour des comptes.
Ces incohérences passées portent préjudice à la lisibilité et à la claire compréhension des positions de l'État, harmonieuses désormais.
Je connais la situation de ces propriétaires ayant acquis, avant le passage de la tempête, des terrains nus constructibles, qui désormais ne le sont plus. Ils se retrouvent dans une situation telle qu'ils ne peuvent revendre leurs biens à leur valeur initiale, ce qui constitue de fait une indéniable perte de patrimoine.
J'ai donc saisi le Conseil d'État pour savoir s'il était nécessaire d'exproprier les terrains nus dans ces zones à risques, afin de donner droit à une indemnisation.
Sa réponse est négative : elle se comprend juridiquement au regard de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui soumet l'expropriation à une condition de nécessité. Le législateur ne doit recourir à l'expropriation pour risque naturel qu'en dernier ressort : l'indemnisation n'est pas de droit lorsque des terrains perdent leur constructibilité, et donc leur valeur, pour un motif tiré d'un intérêt général supérieur.
Je sais que cette réponse n'est pas conforme à votre attente, monsieur Falorni, mais c'est celle qu'en toute franchise et en toute responsabilité je me dois de vous apporter.
M. le président. La parole est à M. Olivier Falorni.
M. Olivier Falorni. Comme vous l'avez dit, madame la ministre, cette réponse n'est pas celle que nous attendions, ma collègue et moi-même, mais nous prenons acte de cette décision du Conseil d'État.
Néanmoins, nous continuerons à défendre ces propriétaires qui, en tant que victimes, doivent pouvoir bénéficier de la solidarité nationale. Trois ans jour pour jour après ce drame, j'espère que ces personnes qui ont été durement frappées ne seront pas encore un peu plus les victimes de Xynthia.
Auteur : M. Olivier Falorni
Type de question : Question orale
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : Budget
Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 février 2013