Question orale n° 241 :
normes

14e Législature

Question de : M. Philippe Le Ray
Morbihan (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Philippe Le Ray attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur les nombreuses difficultés rencontrées par les éleveurs bretons. En effet, ceux-ci se sentent totalement abandonnés par les pouvoirs publics. Non contents de subir de multiples contraintes de normes ou encore l'augmentation des coûts de matière première (tant au niveau des aliments que des énergies) les éleveurs font également face à une mauvaise valorisation de leurs produits dans la filière, notamment au niveau de la transformation, due principalement à la concurrence européenne (charges, 35 heures...). Retarder l'exigence des mises aux normes, revoir totalement la politique des droits à produire notamment au niveau des transferts de quotas ou encore revoir la politique environnementale et favoriser ainsi la mobilité des matières organiques et leur traitement lui paraissent comme des mesures non coûteuses à prendre et susceptible ainsi d'aider durablement la filière. Il lui demande donc dans quelle mesure ces solutions pourraient être appliquées pour redonner ainsi confiance à nos éleveurs qui constituent le socle de l'économie de nos territoires.

Réponse en séance, et publiée le 22 mars 2013

RÉFORME DES NORMES ENVIRONNEMENTALES DANS L'ÉLEVAGE

M. le président. La parole est à M. Philippe Le Ray, pour exposer sa question, n° 241, relative à la réforme des normes environnementales dans l'élevage.
M. Philippe Le Ray. Monsieur le ministre de l'agriculture, tout le monde connaît la situation de l'élevage en France et particulièrement en Bretagne. Les revenus des éleveurs sont catastrophiques. La ferme bretonne recule en volume, l'industrie agroalimentaire est en souffrance. Nous allons dans le mur. C'est le couloir de la mort - je l'affirme - de l'élevage. L'heure n'est plus aux discours et aux déclarations de bonnes intentions. Des mesures draconiennes sont à prendre en urgence.
Je connais parfaitement le milieu de l'élevage et ses attentes. C'est pourquoi je vous demande avec force et conviction de prendre les mesures suivantes non coûteuses pour l'État et qui s'appuieraient sur deux leviers.
Premièrement, il conviendrait d'améliorer le prix de vente en imposant évidemment à la distribution une traçabilité sur les prix et en exigeant une répercussion des coûts des matières premières et environnementaux. Il vous faut, aussi, renégocier les aides européennes à l'exportation.
Deuxièmement, et c'est pour moi le plus important, il paraît vital d'établir un " plan survie " s'appuyant sur la baisse des coûts pour l'élevage. À cet effet, je vous propose d'élaborer un plan national de production de protéines végétales à destination de la production animale en réorientant massivement les aides PAC vers cette ressource première.
Je vous suggère d'étudier à nouveau les normes environnementales sur le bâtiment et de renégocier un report pour se mettre aux normes de la directive européenne relative au bien-être animal.
Par ailleurs, vous devez accepter la libre circulation de l'azote organique issu des élevages, en respectant bien sûr mais en modifiant la directive " Nitrates " concernant les zones ZES et ZAC.
Enfin, vous devez modifier les procédures des installations classées et intervenir pour alléger des contrôles trop souvent humiliants pour des hommes et des femmes à bout de souffle.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'accepter ces solutions. De tels choix politiques ne coûtent rien à l'État, je le répète, mais sont indispensables pour sauver l'élevage. Je vous prie de redonner confiance aux éleveurs. Je suis prêt à vous aider.
M. le président. Merci pour cette excellente question, mon cher collègue.
M. François de Rugy. Le président sort de sa neutralité ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Monsieur le président, vous avez noté avec raison l'intérêt de cette question !
Monsieur le député, vous évoquez la situation de l'élevage. Je partage vos préoccupations et je me rendrai d'ailleurs, dès la fin de mes réponses ce matin, devant les éleveurs laitiers à Nantes.
Plusieurs sujets sont sur la table, le premier étant celui des relations contractuelles et commerciales. Si la loi de modernisation de l'économie, la LME, s'est saisie des rapports entre grande distribution, transformation et production, nous avons des efforts à faire pour que soit pris en compte dans les discussions le coût de la production, lequel - c'est ce qui doit changer - doit être intégré.
Vous avez également évoqué la question très intéressante des protéines végétales, avec la possibilité d'offrir aux exploitations une meilleure autonomie alimentaire, ce qui, par définition, les rendrait moins dépendantes du marché européen et mondial. C'est un enjeu majeur et des propositions en ce sens seront présentées dans les prochains jours. Dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, nous essayons d'ailleurs, en travaillant sur les surfaces et sur une possibilité d'aide couplée supplémentaire pour les protéagineux, de disposer d'un élément stratégique pour nous donner les moyens d'aller vers cette plus grande autonomie fourragère que vous souhaitez - je suis parfaitement d'accord avec vous.
Vous avez par ailleurs évoqué la question tout aussi intéressante de l'azote organique. La gestion par zones d'excédent, si elle tend à réduire ce dernier, oublie malheureusement l'azote minéral, qui, en Bretagne, vient s'ajouter à l'azote organique. Nous allons donc essayer de changer de stratégie et de considérer la question de l'azote dans son ensemble. Ainsi, si j'ai de l'azote organique en excédent, je dois pouvoir l'utiliser à due concurrence de ce que je vais économiser en azote minéral. L'azote organique mesuré en excédent pourrait alors être utilisé, à la condition, je le répète, de prendre en compte l'azote total et donc de diminuer en conséquence le recours à l'azote minéral. C'est une question qu'il conviendra de coupler avec celle de la méthanisation puisque, en faisant de l'énergie avec de l'azote organique, on pourra alors, si le digestat est considéré comme un fertilisant - c'est tout le débat - avoir une gestion spécifique qui réduirait d'ailleurs les pollutions.
Vous avez enfin évoqué un sujet beaucoup plus difficile, la directive relative au bien-être animal. Cette directive a été négociée il y a trois ans et s'applique. Il n'est pas possible aujourd'hui pour le ministre que je suis de la renégocier, mais nous devons essayer de trouver l'accompagnement nécessaire pour permettre à nos éleveurs de s'adapter.

Données clés

Auteur : M. Philippe Le Ray

Type de question : Question orale

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt

Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 mars 2013

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