raffinage
Question de :
M. Guillaume Bachelay
Seine-Maritime (4e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Guillaume Bachelay attire l'attention de M. le ministre du redressement productif sur les mesures à prendre pour sauvegarder et développer le secteur du raffinage français. Les fermetures récentes de raffineries en France (Dunkerque, Reichstadt, Berre) et la réduction de capacité à Gonfreville montrent la fragilité du secteur. Après les départs de BP et de Shell ces dernières années, il ne reste plus que deux groupes pétroliers intégrés, raffineurs et distributeurs, encore actifs en France. Il s'agit pourtant d'un secteur stratégique pour l'indépendance énergétique du pays, la protection de l'emploi et de l'environnement : le coût environnemental en termes de transports de la délocalisation des activités de raffinage doit également être pris en compte. Il souhaite donc connaître les projets du Gouvernement pour sauvegarder et développer le secteur du raffinage.
Réponse en séance, et publiée le 24 avril 2013
SOUTIEN AU SECTEUR DU RAFFINAGE
M. le président. La parole est à M. Guillaume Bachelay, pour exposer sa question, n° 268, relative au soutien au secteur du raffinage.M. Guillaume Bachelay. Madame la ministre, en quatre ans, quatre raffineries ont cessé leur activité en France. Après l'arrêt des sites des Flandres et de Reichstett, après la mise sous cocon de celui de Berre-l'Étang, mardi dernier le tribunal de commerce de Rouen a rejeté les offres de reprise de la raffinerie Petroplus à Petit-Couronne, jugeant qu'aucune ne présentait les garanties financières et techniques indispensables à la pérennité de l'activité et des emplois.
Je veux, devant la représentation nationale, rendre hommage aux salariés et à l'intersyndicale dont je partage le combat depuis un an et demi. Je pense aux sous-traitants, commerçants, collectivités territoriales, aux ports de Rouen et du Havre qui vont subir l'impact de cette situation.
Le combat pour le raffinage est d'intérêt général. Il continue et passe par trois étapes.
La première est à Petit-Couronne : elle signifie sécuriser le site et ses installations, mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi exemplaire, en phase avec ceux qui sont pratiqués dans le secteur pétrolier, et bien sûr repositionner ce site stratégique de 240 hectares sur l'axe Seine. Avec les présidents des collectivités territoriales concernées - la communauté d'agglomération Rouen-Elbeuf, la région Haute-Normandie, le département -, je plaide pour l'usage portuaire et industriel du site. Un comité de suivi a été mis en place vendredi dernier sous l'égide de l'État. Pouvez-vous préciser les engagements du Gouvernement sur ces enjeux ?
La deuxième étape du combat se situe au niveau national. Le plan d'action du gouvernement Fillon, adopté en juin 2011, n'a, hélas, rien donné ; nous en subissons aujourd'hui les conséquences. Des milliers d'emplois directs et indirects sont en jeu, ainsi que l'indépendance énergétique de la nation. Comment l'État compte-t-il sauvegarder et développer l'industrie française du raffinage ? Par ailleurs, et c'est un enjeu-clef, le Gouvernement va-t-il repenser la réglementation pour un vrai principe pollueur-payeur ? Je propose, tirant les leçons de Petit-Couronne, que la réparation environnementale des sites soit calculée au prorata temporis de l'activité des exploitants successifs, et non à la charge exclusive du dernier en date.
La troisième étape du combat est européenne. L'Europe est l'échelle décisive, sous deux aspects au moins : d'une part, il existe des crédits européens spécifiques, comme ceux du Fonds d'ajustement à la mondialisation, et dans le cas de Petit-Couronne, cette voie mérite d'être explorée ; d'autre part, nous devons protéger les raffineries européennes face aux importations de produits finis fabriqués hors d'Europe, dans des conditions de dumping social, environnemental et fiscal inacceptables. Je plaide pour des écluses commerciales aux frontières de l'Europe qui protègent les sites, les technologies et les emplois du raffinage.
Madame la ministre, quelle initiative la France compte-t-elle prendre pour qu'en matière de raffinage, l'Union ne rime pas avec liquidation, mais avec protection ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.
Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Monsieur le député, en effet, depuis déjà plusieurs années, le secteur du raffinage européen est en forte restructuration et connaît un contexte difficile qui, vous l'avez rappelé, est marqué par une baisse structurelle de la demande qui entraîne des surcapacités, par un déséquilibre croissant du mix de consommation européen, caractérisé par une sur-représentation du gazole, par des marges de raffinage souvent déprimées et par une concurrence croissante des pays émergents. Plusieurs grands groupes pétroliers intégrés ont fait le choix de se désengager, plus ou moins partiellement, du raffinage européen. Depuis plusieurs années, le raffinage français est confronté à une situation de crise, et vous avez eu raison de rappeler que les plans antérieurs, notamment celui de juin 2011, n'ont pas produit d'effets.
Quelles sont les perspectives et les actions engagées par le Gouvernement et par le ministère du redressement productif ?
Concernant Petroplus, je peux vous confirmer l'implication forte du Gouvernement dans le suivi du PSE comme dans les travaux de repositionnement du site industriel de Petit-Couronne. Le Gouvernement continuera à s'impliquer auprès des salariés et mobilisera les outils de la politique de l'emploi, à travers notamment le contrat de sécurisation professionnelle, avec l'objectif que chaque salarié ait individuellement une solution. L'Union française des industries pétrolières a d'ores et déjà annoncé que les entreprises de la branche proposeraient une centaine d'emplois de reclassement. Le PSE sera en ligne avec les plans sociaux dans le secteur pétrolier. Une nouvelle période s'ouvre pour le site industriel de Petit-Couronne. À la demande du Gouvernement, le préfet de région pilotera une mission dont l'objet est de réaliser la mise en sécurité des installations, de travailler au repositionnement du site, notamment dans sa vocation industrielle, et de suivre très attentivement la mise en mise en oeuvre du PSE. Il sera assisté dans cette tâche par un ingénieur de la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services, et travaillera en lien étroit avec les élus locaux.
Je souhaitais aborder deux points essentiels que vous avez également évoqués : premièrement, l'évolution de la réglementation relative à la responsabilité environnementale et à la dépollution des sols ; deuxièmement, les initiatives prises au niveau européen. La mobilisation du Fonds d'ajustement à la mondialisation pour le site de Petit-Couronne et la mise en place de protections commerciales aux frontières de l'Union, face aux importations de produits raffinés hors UE dans des conditions incontestables de dumping social et environnemental, sont en effet extrêmement importantes. En raison du format de l'exercice et compte tenu de l'ampleur de ces problématiques, je vous propose, monsieur le député, de vous adresser dans les meilleurs délais, sur ces deux points, une réponse très précise par écrit. La France veillera à ce que l'action européenne aboutisse à un renforcement du secteur du raffinage et non pas à sa liquidation en Europe, et surtout pas dans notre pays.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Bachelay.
M. Guillaume Bachelay. Je vous remercie, madame la ministre, pour votre réponse et pour les engagements pris ce matin. Mais je rappelle que ce dont nous parlons concerne des dizaines de milliers d'emplois directs et indirects dans notre pays, notamment sur la vallée de la Seine. Par ailleurs, au-delà du raffinage, d'autres secteurs industriels sont concernés ; je pense à la cosmétique, à l'agroalimentaire, à la chimie. Nous débattons donc d'un enjeu industriel vraiment d'intérêt général.
Auteur : M. Guillaume Bachelay
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Redressement productif
Ministère répondant : Redressement productif
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 avril 2013