énergies renouvelables
Question de :
M. Charles de Courson
Marne (5e circonscription) - Union des démocrates et indépendants
M. Charles de Courson attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur le plan énergie méthanisation autonomie azote, présenté le 29 mars 2013 à l'occasion de son déplacement conjoint avec M. la Ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, dans une exploitation porcine du Morbihan. Ce plan ambitieux qui apportera des réponses à la valorisation des déjections animales, doit nécessairement associer les céréaliers. En effet, il est reconnu que la méthanisation ne fonctionne bien que lorsque les déjections animales sont complétées par de la biomasse d'origine végétale. Il lui demande, d'une part, ses intentions quant au développement de cette technique associant déjections animales et coproduits des céréales. La méthanisation présente en effet des atouts considérables pour les dites filières agricoles. Le Gouvernement s'est fixé des objectifs ambitieux, en développant notamment 1 000 méthaniseurs d'ici 2020. Cependant, ces objectifs ne pourront être atteints que si un « choc de simplification » est mis en marche, et que certaines contraintes réglementaires sont levées. Aussi il lui demande, d'autre part, s'il compte améliorer les tarifs de rachat de l'électricité produite par ces industries. En effet, il faut permettre l'accès au tarif élevé pour tous les projets valorisants des déchets issus de l'agriculture et de l'agro-industrie. Pour cela, la levée des contraintes de statut juridique, de taille de projet, de nature des produits utilisés, et de condition d'utilisation de la chaleur est nécessaire. En outre, il lui demande s'il envisage d'autoriser les cultures énergétiques. Il faut valoriser la production de cultures qui ne viennent pas en concurrence avec les productions alimentaires. C'est le cas des cultures intermédiaires à vocation énergétique qui sont cultivées après une céréale d'hiver et avant une culture de printemps. Enfin, il lui demande s'il est prêt à exclure le digestat de la réglementation applicable aux déchets. Le digestat est un résidu fertilisant de la méthanisation, produit de haute valeur fertilisante. Il est actuellement considéré comme un déchet, donc soumis aux contraintes applicables aux déchets. Or il conviendrait de pouvoir l'utiliser sur les exploitations où il est produit, mais aussi sur d'autres exploitations, et le vendre ou le transformer en valorisation déshydratée pour les jardins. La modification du statut de déchet applicable au digestat, ainsi que l'établissement d'un cadre réglementaire adapté sont indispensables.
Réponse en séance, et publiée le 24 avril 2013
PLAN ÉNERGIE MÉTHANISATION AUTONOMIE AZOTE
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour exposer sa question, n° 271, relative au plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote.M. Charles de Courson. Madame la ministre, le 29 mars dernier, à l'occasion d'un déplacement conjoint avec madame la ministre de l'environnement, Delphine Batho, dans une exploitation porcine du Morbihan, Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, a présenté un plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote. Ce plan ambitieux qui apportera des réponses à la valorisation des déjections animales doit nécessairement associer les producteurs de végétaux. Il est reconnu en effet que la méthanisation ne fonctionne bien que lorsque les déjections animales sont complétées par de la biomasse d'origine végétale. Aussi ne pensez-vous pas, madame la ministre, qu'il est nécessaire de développer une technique qui associe déjections animales et coproduits des productions végétales ? La méthanisation présente en effet des atouts considérables pour ces filières agricoles.
Que le Gouvernement se soit fixé des objectifs ambitieux, en développant notamment 1 000 méthaniseurs d'ici à 2020, ne peut que nous réjouir. Cependant, ces objectifs ne pourront être atteints que si un " choc de simplification " est mis en marche et que certaines contraintes réglementaires sont levées. Aussi, madame la ministre, comptez-vous prendre les trois mesures suivantes ?
Tout d'abord, comptez-vous améliorer les tarifs de rachat de l'électricité produite par ces industries ? Il faut permettre l'accès à un tarif élevé pour tous les projets valorisant des déchets issus de l'agriculture et de l'agro-industrie. À cette fin, allez-vous lever les contraintes de statut juridique, de taille de projet, de nature des produits utilisés et de conditions d'utilisation de la chaleur ?
Ensuite, envisagez-vous d'autoriser les cultures énergétiques ? Il faut valoriser la production de cultures qui ne concurrencent pas les productions alimentaires : c'est le cas des cultures intermédiaires à vocation énergétique qui sont cultivées après une céréale d'hiver et avant une culture de printemps.
Enfin, êtes-vous prête à exclure le digestat de la réglementation applicable aux déchets ? Le digestat est un résidu fertilisant de la méthanisation, un produit de haute valeur fertilisante. Il est actuellement considéré comme un déchet et, de ce fait, soumis aux contraintes applicables aux déchets. Or il conviendrait de pouvoir l'utiliser sur les exploitations où il est produit, mais également sur d'autres exploitations, et de pouvoir le vendre ou le transformer en valorisation déshydratée pour les jardins. Avez-vous l'intention d'établir un cadre réglementaire adapté à ce produit ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.
Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Le plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote, présenté par Delphine Batho et Stéphane Le Foll, est un plan ambitieux, car la filière méthanisation est considérée comme une filière d'avenir. Le Gouvernement est convaincu qu'elle contribuera à la transition énergétique et écologique de notre pays. L'objectif est de développer un modèle français de méthanisation agricole, créateur d'emplois et source de revenus, qui permettra de traiter et de valoriser les effluents d'élevage et les coproduits des exploitations agricoles, notamment céréalières, et de produire plus d'énergie renouvelable. L'objectif est double : écologique et économique, dans la droite ligne du projet agro-écologique présenté par Stéphane Le Foll en décembre dernier.
Le plan EMAA prévoit de mobiliser et de renforcer les outils publics de soutien au développement des investissements dans la méthanisation agricole. Afin de faciliter l'émergence des projets en accompagnant leur plan de financement, les réseaux bancaires seront mobilisés dans les territoires en synergie avec les acteurs de la profession agricole : ceci est indispensable à la réussite du plan.
Pour répondre à votre première question, sachez qu'il est prévu d'améliorer le dispositif d'achat de l'électricité produite à partir de biogaz en adaptant la prime d'effluents d'élevage à la réalité des projets de méthanisation agricole.
Comme vous le soulignez dans votre deuxième question, il s'agit aussi de simplifier. Nous engageons des actions pour lever les freins au développement des projets, par exemple en matière de transparence économique pour les GAEC. S'agissant des aspects réglementaires, il est prévu de relever le seuil du régime d'autorisation de 50 à 60 tonnes d'intrants par jour, dans le cadre de la réglementation ICPE. Le ministère de l'écologie étudie également la possibilité de création d'un " guichet unique " pour les porteurs de projets. Une simplification et une harmonisation des dossiers administratifs sont également prévues.
Enfin, le développement de la méthanisation agricole peut être une opportunité pour améliorer les cycles de rotation des cultures. Le plan EMAA prévoit l'acquisition et la diffusion de connaissances sur les cultures intermédiaires à vocation énergétique, que vous avez évoquées, en incluant leurs impacts environnementaux ainsi qu'un accompagnement et un soutien à leur utilisation dans le cadre de la méthanisation.
Par contre, ce plan ne vise pas à encourager les cultures énergétiques en lieu et place de cultures alimentaires, même pour un usage de méthanisation.
Quant aux digestats de méthanisation, le code rural prévoit que la mise sur le marché et l'utilisation de matières fertilisantes destinées à l'agriculture sont subordonnées à homologation ou, à défaut, à autorisation. Par dérogation à ce principe général et sous réserve que l'innocuité pour l'homme, les animaux et l'environnement soit établie, les produits normalisés sont exonérés de l'obligation d'homologation, si la norme les concernant a été rendue d'application obligatoire par arrêté interministériel.
À ce stade, aucune norme ne vise aujourd'hui les digestats de méthanisation en tant que matière fertilisante destinée à être mise sur le marché. Seules deux normes existantes permettent leur utilisation en tant que composant de compostage final. Toute personne qui détient un digestat dont l'emploi est destiné à assurer ou à améliorer la nutrition des végétaux ou les propriétés des sols est donc tenue de solliciter une autorisation. Cette procédure permet d'assurer la sortie du statut de déchet des digestats de méthanisation : aussi le plan EMAA prévoit-il un volet pour viser l'homologation de certains digestats de méthanisation.
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. Vos réponses, madame la ministre, vont qualitativement dans le bon sens, mais il convient d'aller plus loin, sous peine de voir échouer ce plan d'intérêt national.
Pour répondre à ma première question, vous avez dit envisager une réévaluation des tarifs, mais il faut aller vite : il conviendrait de les augmenter de l'ordre de 15 % pour atteindre le niveau allemand.
J'ai évoqué la possibilité de faire des cultures énergétiques sur les zones gelées : votre réponse ne semble pas me contredire.
Enfin, créez vite des normes pour le digestat ! Si elles ne sont mises en place que dans trois ans, vos propos auront perdu tout leur sens.
Auteur : M. Charles de Courson
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 avril 2013