bassins miniers
Question de :
M. Serge Janquin
Pas-de-Calais (10e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Serge Janquin appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conséquences particulièrement contraignantes, sur les biens immobiliers, qu'ont fait peser les décisions de l'État relatives à la mise en place d'un plan de prévention des risques d'inondation sur le bassin versant de la Lawe, à Bruay-la-Buissière, en méconnaissance de la totalité des risques liés à l'histoire minière. En l'occurrence, pour raison d'exploitation de la houille au début du XXe siècle, cette rivière a été littéralement détournée de son lit naturel et même surélevée, exposant le quartier dit du « vieux Bruay » au risque d'inondation en cas de rupture de digue et fragilisant des nouvelles berges. En 2008, les services de l'État ont proposé dans le cadre de la surveillance des risques un classement de ce quartier en PPRI, n'apportant pas la réponse attendue par les responsables de la commune et les riverains concernés, puisque qu'il ne faisait aucun cas des aléas miniers. En effet le classement en risque naturel écarte de facto tous les autres risques à caractère industriel, déniant tout effet de droit en termes de causalité. Une décision de justice a annulé en 2011 (tribunal administratif de Lille) le PPRI pour des raisons d'insuffisances dans les documents techniques et cartographiques. À ce jour, les représentants de la commune et membres de l'association « le vieux Bruay », estiment nécessaire d'étudier plus avant la problématique, et sollicitent une réponse plus appropriée. Une autre décision de justice en date du 4 avril 2013 (cour administrative d'appel de Douai), si elle admet le principe de l'origine du risque d'inondation du fait des digues réalisées par l'exploitant minier, rejette à ce jour toute indemnisation en considérant que le préjudice n'est qu'éventuel. Ainsi toute indemnisation ou prise en charge préventive est interdite, soit parce que le cadre juridique du PPRI l'interdit, soit parce que les inondations ne sont pas encore intervenues. Aussi l'annulation de ce PPRI suscite tant pour les habitants que pour la collectivité, l'espoir d'une requalification globalisée de cette zone en PPRM, sachant que lorsque l'aléa minier de type inondation est situé en zone PPRI, il convient d'intégrer les informations relatives à cet aléa dans le règlement du PPRl. Les textes en vigueur ne permettent cependant pas de résoudre un tel cas de figure. À l'heure où il est question de l'évolution du code minier, à l'instar du principe de « pollueur-payeur » du code de l'environnement, repris sous le nom de principe de réparation à l'article 4 de la charte constitutionnelle de l'environnement, il lui demande quelle disposition il lui serait possible d'étudier qui permettrait à l'État de prendre sa responsabilité, dans ce dossier.
Réponse en séance, et publiée le 26 juin 2013
CONSÉQUENCES DE LA MISE EN PLACE D'UN PLAN DE PRÉVENTION DES RISQUES D'INONDATION À BRUAY-LA-BUISSIÈRE
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Janquin, pour exposer sa question, n° 321, relative aux conséquences de la mise en place d'un plan de prévention des risques d'inondation à Bruay-la-Buissière.
M. Serge Janquin. Ma question, madame la ministre de la santé, concerne les conséquences très contraignantes sur les biens immobiliers qu'ont fait peser les décisions de l'État relatives à la mise en place d'un plan de prévention des risques d'inondation sur le bassin versant de la Lawe, à Bruay-la-Buissière, en méconnaissance des risques liés à l'histoire minière.
Il s'agit d'un cas tout à fait unique en France : pour des raisons d'exploitation de la houille au début du XXe siècle, cette rivière a été littéralement détournée de son lit naturel et surélevée, exposant le quartier dit du « vieux Bruay » au risque d'inondation en cas de rupture de digue. En 2008, les services de l'État ont proposé, dans le cadre de la surveillance des risques, un classement de ce quartier en PPRI, ce qui n'a pas apporté la réponse attendue par les collectivités et les riverains. En effet, le classement en risque naturel écarte de facto tout autre risque à caractère industriel, déniant tout effet de droit en termes de causalité.
Une décision du tribunal administratif de Lille a annulé en 2011 le PPRI pour des insuffisances dans les documents techniques. Une décision de la cour administrative de Douai, en date du 4 avril 2013, admet le principe de l'origine du risque d'inondation du fait des digues réalisées par l'exploitant minier, mais rejette à ce jour toute indemnisation en considérant que le préjudice n'est qu'éventuel… En somme, pour le bonheur des riverains, il aurait fallu que le risque fût certain ! Ainsi, toute indemnisation ou prise en charge préventive est interdite, soit parce que le PPRI l'interdit, soit parce que les inondations ne sont pas encore intervenues. Aussi l'annulation du PPRI suscite-t-elle de l'espérance pour la collectivité et les riverains.
Les textes en vigueur ne permettent pas de régler un tel cas de figure. À l'heure où il est question de l'évolution du code minier, à l'instar du principe de « pollueur-payeur » du code de l'environnement, repris sous le nom de principe de réparation à l'article 4 de la charte constitutionnelle de l'environnement, quelle disposition le Gouvernement pourrait-il étudier pour que l'État prenne sa responsabilité dans ce dossier ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Delphine Batho, actuellement retenue par l'ouverture des états généraux de la modernisation du droit de l'environnement ; elle vous remercie de votre question et m'a demandé de répondre à sa place.
La situation que vous évoquez est effectivement complexe. Cette zone est protégée contre l'inondation par des ouvrages hydrauliques et des installations de pompage. Leur surveillance est assurée par le BRGM, qui a repris les obligations de l'ancien exploitant minier, Charbonnages de France. Se fondant sur un avis du conseil général des mines, et compte tenu de la stabilisation des terrains ainsi que du dimensionnement de ces ouvrages et installations, l'État a estimé que la situation ne rendait pas nécessaire un plan de prévention des risques miniers. Rien ne conduit jusqu'à présent à remettre en cause cette position.
Toutefois, Delphine Batho souhaite rassurer les habitants de la commune de Bruay-la-Buissière. Il n'est pas nécessaire de faire partie d'un plan de prévention des risques miniers pour être protégé contre les risques d'inondation et bénéficier d'une indemnisation légitime en cas de sinistre. Pour les risques naturels en effet, l'indemnisation des sinistres s'effectue selon le régime des catastrophes naturelles prévu par le code des assurances et le code de l'environnement. Pour les risques miniers, elle est assurée soit par l'ancien exploitant minier, soit par l'État directement lorsque l'exploitant a disparu. Cette indemnisation est prévue par le code minier. Il est normal qu'un exploitant assume sur le long terme les conséquences pour la sécurité des biens et des personnes que son activité passée a engendrées.
En application de ces règles, en cas d'inondation résultant d'affaissements miniers, l'État, qui a repris les obligations incombant à l'ancien exploitant Charbonnages de France, indemniserait donc, au titre du code minier, les sinistrés victimes de dommages, et ce indépendamment de l'existence ou non d'un plan de prévention des risques miniers.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Janquin.
M. Serge Janquin. Je vois bien, madame la ministre, les excellentes dispositions qu'a Mme Batho à l'égard de ce dossier ; encore convient-il s'assurer de la finalisation. Plutôt que d'engager de longues contestations judiciaires en France ou en Europe, je préférerais que l'on reconnaisse que c'est un risque minier et que l'on diligente une mission d'expertise pour évaluer les précautions à prendre afin d'éviter la rupture de la digue en question. Ce serait plus sage que d'envisager des indemnisations après.
Je propose donc à Mme Batho de venir à Bruay-la-Buissière constater la réalité et la spécificité de ce problème – et si vous voulez bien l'accompagner, nous pourrons aussi parler CARMI et AHNAC avec les élus du secteur et mon collègue Nicolas Bays. (Sourires.)
Mme la présidente. Je ne doute pas que Mme la ministre a noté votre invitation et la transmettra également à Mme Batho.
Auteur : M. Serge Janquin
Type de question : Question orale
Rubrique : Mines et carrières
Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie
Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 juin 2013