Question orale n° 33 :
papier et carton

14e Législature

Question de : M. Éric Alauzet
Doubs (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Éric Alauzet appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation de la papeterie de Novillars. En mai 2012, la papeterie de Novillars, en activité depuis 129 ans, a cessé de produire laissant une soixantaine d'employés au chômage, malgré les nombreux atouts de la papeterie : une sécurisation des apports en papiers et cartons, principalement locaux et répondant aux besoins des collectivités du territoire engagées dans une logique de valorisation des déchets ; une zone de chalandise importante pour la récupération du papier et des cartons pour alimenter son activité de transformation ; une collaboration étroite avec les acteurs économiques et institutionnels du territoire. Cette cessation d'activité arrive alors que la papeterie est fermement engagée dans un processus de modernisation et de mutation, via un projet de centrale de cogénération biomasse qui libèrera la papeterie des fortes augmentations à venir des coûts de l'énergie et dynamisera le secteur de l'activité du bois créant ainsi plusieurs dizaine d'emplois locaux. L'aboutissement du projet de centrale biomasse inscrit à la CRE dépend de la pérennité de l'entreprise, l'avenir économique de la papeterie repose sur la réalisation de cette chaufferie. Ce projet s'inscrit parfaitement dans la transition écologique. Le potentiel de la papeterie est reconnu. M. Fadi Gemayel, un industriel spécialisé dans le papier, s'est engagé avec force en faveur de la reprise de la papeterie et apporte 2,5 millions d'euros sur un premier investissement de 4 millions d'euros destinés à élargir le spectre des matières premières absorbées par l'usine. En complément de cet apport il faut trouver 2,8 millions d'euros de prêt bancaire pour moderniser l'outil industriel. Malgré l'engagement de l'État et des collectivités sur un cautionnement à hauteur de 55 %, les antennes régionales des banques refusent d'accorder les prêts qui pourraient permettre la reprise de l'activité. Les raisons de cette frilosité ne sont pas clairement explicitées par les banques mais on comprend néanmoins qu'elles ont des difficultés à appréhender la modernité du projet. Dans ce contexte, on mesure tout l'intérêt que présente la Banque publique d'investissement (BPI) que le Gouvernement va prochainement mettre en place, alors que les banques présentes sur le marché semblent totalement paralysées. Néanmoins, à cet instant précis, alors que l'échéance de reprise de la papeterie par M. Gemayel est imminente, on ne peut se permettre de voir disparaître un outil industriel si précieux au territoire et plein de promesses. Concrètement, cette question est double. Il veut savoir si les moyens seront donnés à la BPI d'accompagner les entreprises en mutation quand elles sont en difficultés passagères. Il lui demande comment assurer la période transitoire qui nous sépare de la date de création de la BPI afin que l'avènement de cet outil ne soit pas accompagné de liquidations judiciaires qui assombriraient son image ou qui nous ferait regretter qu'elle n'ait pas été mise en place plus tôt.

Réponse en séance, et publiée le 5 décembre 2012

PAPETERIE DE NOVILLARS

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour exposer sa question, n°33, relative à la situation de la papeterie de Novillars.
M. Éric Alauzet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances et porte sur le financement de la modernisation et du développement de la papeterie de Novillars, à quelques kilomètres au Nord-Est de Besançon. En mai dernier, cette papeterie, en activité depuis cent vingt neuf ans, a cessé de produire, laissant une soixantaine d'employés au chômage, malgré les nombreux atouts de la papeterie, dans l'attente de finaliser le montage financier du projet de développement.
Confrontée à des difficultés, la papeterie, en pleine mutation, est désormais engagée dans un projet moderne et durable, qui verra la réalisation d'une centrale de cogénération biomasse, inscrit à la commission de régulation de l'énergie. L'entreprise pourra ainsi se mettre à l'abri des aléas et des fortes augmentations à venir du coût de l'énergie, la papeterie ne pouvant plus exister sans la centrale et inversement. Soixante emplois dotés d'un réel savoir-faire seront ainsi sauvés et plusieurs dizaines d'emplois locaux pourraient être créés dans la filière bois.
Il s'agit bel et bien d'un projet du XXIe siècle, bâti autour du recyclage, des énergies renouvelables, et parfaitement inscrit dans la transition écologique et la création d'emplois locaux, qui constituent les priorités du Gouvernement et de la majorité présidentielle.
Le potentiel de la papeterie est reconnu. Fadi Gemayel, un industriel spécialisé dans le papier, s'est engagé avec force en faveur de sa reprise. Il apporte 2,5 millions d'euros pour créer le capital social et mettre en place le fonds de roulement. Il reste à trouver 2,8 millions d'euros de prêt bancaire pour moderniser l'outil industriel et élargir le spectre des matières premières absorbées par l'usine.
Le plan d'affaires présente une sécurisation des apports en papiers et cartons, une zone de chalandise importante, une collaboration étroite avec les acteurs économiques et institutionnels du territoire.
Malgré l'engagement de l'État et des collectivités pour un cautionnement à hauteur de 58 %, les antennes régionales des banques refusent d'accorder les prêts qui permettraient la reprise de l'activité. Les banques n'ont pas expliqué clairement les raisons de leur frilosité mais on comprend néanmoins qu'elles ont des difficultés à appréhender le potentiel et la modernité du projet.
Dans ce contexte, on mesure tout l'intérêt de la Banque publique d'investissement - la BPI - que le Gouvernement va mettre en place dans quelques semaines, alors que les banques présentes sur le marché semblent totalement paralysées.
Néanmoins, à cet instant précis, alors que l'échéance de reprise de la papeterie par M. Gemayel est imminente, nous ne pouvons pas nous permettre de voir disparaître un outil industriel si précieux pour le territoire et plein de promesses.
De quels moyens supplémentaires disposons-nous pour mobiliser les banques dans le financement d'un tel projet ?
Pouvez-vous nous confirmer que la BPI pourra être mobilisée en faveur des entreprises en mutation, comme nous l'avons inscrit en votant des amendements au projet de loi créant la BPI, lorsqu'elles rencontrent des difficulté passagères, comme c'est le cas de la papeterie de Novillars ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, merci d'interroger le Gouvernement à ce sujet. Nous savons, et en particulier M. Pierre Moscovici, en sa qualité de ministre de l'économie mais aussi d'élu du Doubs, tout l'enjeu que représente la papeterie de Novillars pour l'ensemble du département et pour la filière bois de la Franche-Comté, aussi bien pour l'emploi que pour la production et le développement. L'enjeu est également historique compte tenu de l'histoire de cette papeterie, vieille maintenant de plus d'un siècle.
Je sais que vous avez pu débattre de ce sujet dans l'hémicycle lors de la discussion sur le projet de loi portant création de la Banque publique d'investissement la semaine dernière.
Je connais aussi l'attention particulière que vous, à titre personnel, portez à ce dossier. Je tiens à vous assurer, au nom de M. Pierre Moscovici, que l'ensemble des services compétents met tout en oeuvre pour dégager une solution au projet de reprise de la papeterie dans les meilleures conditions et les plus brefs délais.
C'est vrai, depuis mai dernier, la papeterie de Novillars est en liquidation judiciaire, en cessation d'activité, après une gestion que l'on pourrait qualifier de hasardeuse de la précédente direction, qui a conduit soixante-neuf personnes au chômage. Le projet de centrale biomasse, qui doit être développé sur le site et créer plus d'une centaine d'emplois, est, depuis, stoppé dans l'attente d'une reprise de l'activité.
C'est vrai, un industriel libanais, M. Fadi Gemayel, reconnu dans la profession, et qui apporte des garanties solides, a fait part de sa volonté de reprendre ce site. Son investissement doit aujourd'hui être complété par un prêt bancaire qui permettra de moderniser l'outil industriel.
Cependant, les acteurs bancaires dans la région ont fait part de leur réticence à s'engager dans ce projet. Nos services poursuivent leurs efforts, en relation avec OSEO, les collectivités locales et la médiation nationale du crédit, pour parvenir à un tour de table bancaire et financer le prêt de 2,8 millions d'euros. Le dossier est complexe, mais sachez que nous mettons tout en oeuvre pour le faire progresser rapidement.
Vous savez que le projet de loi portant création de la Banque publique d'investissement a été judicieusement amendé par votre assemblée afin d'inclure la " mutation " des entreprises dans ses missions : votre demande est donc, je pense, satisfaite sur ce point. L'Assemblée nationale a par ailleurs réaffirmé, suite à un amendement de la Gauche démocrate et républicaine, que la BPI devrait faire levier sur les banques privées pour les amener à financer ce qu'elles ne financeront pas seules.
La Banque publique d'investissement est en cours de constitution pour être opérationnelle le plus rapidement possible : dans l'intervalle, l'ensemble des outils existants va être mobilisé. Soyez assuré, monsieur le député, que le Gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir pour que ce projet de reprise de la papeterie de Novillars aboutisse.
M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.
M. Éric Alauzet. Je vous remercie, madame la ministre, de cette réponse éclairée, documentée et encourageante. J'espère que nous pourrons illustrer le redémarrage économique avec cet exemple et bien d'autres.

Données clés

Auteur : M. Éric Alauzet

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 novembre 2012

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