Question orale n° 361 :
aéroports

14e Législature

Question de : M. Gérard Sebaoun
Val-d'Oise (4e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Gérard Sebaoun attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les conséquences sanitaires des vols de nuit de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. Une plateforme aéroportuaire comme Roissy-Charles-de-Gaulle, la septième au monde avec plus de 500 000 mouvements chaque année, est un gisement d'activités économiques et d'emplois que personne ne conteste. Mais qui dit aéroport dit nuisances aériennes, et personne ne peut décemment occulter ce problème majeur qui impacte la vie quotidienne des Franciliens. Dans la région, ce sont plus de 5 millions de personnes qui sont survolées à moins de 3 000 mètres d'altitude. Les conséquences sanitaires, de la pollution atmosphérique et du bruit liées aux aéronefs, ne sont plus à démontrer. La nocivité du bruit est étayée par de nombreuses études. Les vols de nuit sont responsables de troubles du sommeil aux conséquences importantes sur la santé des riverains. Elle peut se traduire par un accroissement des risques cardiovasculaires, notamment l'hypertension artérielle, par des phénomènes d'anxiété et par une surconsommation de médicaments. On évoque également des troubles de la capacité d'apprentissage des enfants. Il convient de ne pas opposer artificiellement l'emploi et la sécurité sanitaire de nos concitoyens. C'est pourquoi il nous faut agir pour la réduction des nuisances aériennes. Il regrette que les mesures prises par le précédent du gouvernement n'aient eu que très peu d'effets. Le renouvellement des flottes aériennes n'est qu'un voeu, le changement des procédures d'approche n'a pas apporté d'amélioration réelle à ce jour et les modifications des couloirs aériens n'ont fait que déplacer le bruit. S'agissant précisément des vols de nuit, l'aéroport d'Orly bénéficie depuis longtemps d'un couvre-feu total et la situation a évolué dans les grands aéroports européens comparables. L'aéroport de Francfort avec ses quelque 480 000 mouvements annuels a mis en place un couvre-feu interdisant les vols de nuit entre 22 heures et 5 heures et limite les vols entre 22 heures et 23 heures et entre 5 heures et 6 heures du matin à 133. Les compagnies aériennes ont trouvé les moyens de s'y adapter. Les aéroports de Schiphol à Amsterdam et d'Heathrow à Londres ont également imposé des restrictions au nombre de vols de nuit couvrant une période d'au moins 7 heures. La réglementation sur le coeur de nuit adoptée à Roissy avec un plafond de 55 vols entre 0 heure et 5 heures est une mauvaise réponse, car les périodes 22 heures-0 heure et 5 heures-7 heures ne sont pas concernées. Pire, le nombre de vols concentrés sur ces tranches horaires les plus sensibles pour le sommeil ont augmenté. Aujourd'hui l'aéroport de Roissy est la plateforme européenne dont la réglementation est la moins restrictive avec un nombre de vols de nuit deux fois plus important que celui de ses principaux concurrents. Les vols de nuit correspondent en grande partie à des vols de transport de fret, opérés par Air France et par les entreprises spécialisées, Fedex étant la plus connue. L'énumération de tous ces éléments montre la seule voie possible pour lutter enfin efficacement contre les nuisances aériennes : l'instauration d'un plafond correspondant au niveau moyen des principaux aéroports européens concurrents. Ce plafond, établi sur une durée d'au moins 7 heures, reviendrait à diviser par deux le nombre actuels de vols de nuit, sans entamer la compétitivité de l'aéroport francilien. Cette position est partagée par l'ensemble des associations de riverains. Enfin, l'étude prospective Debats (Discussion sur les effets du bruit des aéronefs touchant la santé) lancée en 2012, permettant de mesurer les effets de l'exposition au bruit des avions sur la santé des populations, doit bénéficier de tous les financements nécessaires pour être menée à son terme. Il le remercie de l'informer sur les mesures qu'il compte initier pour rejoindre nos partenaires européens et mieux concilier la santé des riverains et l'activité économique de la plateforme aéroportuaire de Roissy.

Réponse en séance, et publiée le 14 juin 2013

LIMITATION DES VOLS DE NUIT À L'AÉROPORT DE ROISSY

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour exposer sa question, n° 361, relative à la limitation des vols de nuit à l'aéroport de Roissy.
M. Gérard Sebaoun. Monsieur le ministre chargé des transports, une plateforme aéroportuaire comme Roissy-Charles-de-Gaulle, la septième au monde avec plus de 500 000 mouvements chaque année, est un gisement d'activités économiques et d'emplois que personne ne peut contester, mais qui dit aéroport dit nuisances aériennes, et personne ne peut occulter ce problème majeur qui impacte la vie quotidienne des Franciliens. Dans notre région, ce sont plus de 5 millions de personnes qui sont survolées à moins de 3 000 mètres d'altitude.
Les conséquences sanitaires de la pollution atmosphérique et du bruit liés aux aéronefs ne sont plus à démontrer. La nocivité du bruit est étayée par de nombreuses études.
Les vols de nuit sont responsables de troubles du sommeil aux grandes conséquences sur la santé des riverains, qui peuvent se traduire par un accroissement des risques cardio-vasculaires, des phénomènes d'anxiété majeurs et une surconsommation de médicaments. On évoque également des troubles de la capacité d'apprentissage des enfants.
Parce qu'il ne s'agit pas d'opposer artificiellement l'emploi et la sécurité sanitaire de nos concitoyens, il nous faut agir pour réduire les nuisances aériennes.
Je regrette que les mesures prises tardivement à la fin de la dernière législature n'aient eu que très peu d'effets. Le renouvellement des flottes aériennes n'est en effet qu'un voeu lointain, le changement des procédures d'approche n'a pas apporté d'amélioration réelle à ce jour, et les modifications des couloirs aériens n'ont fait que déplacer le bruit vers d'autres populations.
S'agissant précisément des vols de nuit en région parisienne, l'aéroport d'Orly bénéficie depuis longtemps d'un couvre-feu total, et de grands aéroports européens comme Francfort, Schipol à Amsterdam ou Heathrow à Londres ont pris des mesures.
Aujourd'hui, Roissy est la plateforme européenne dont la réglementation est la moins restrictive, avec deux fois plus de vols de nuit que ses principaux concurrents, en grande partie liés à des transports de fret.
Le plafond de cinquante-cinq vols entre zéro heure et cinq heures n'est pas une réponse adaptée à la situation sanitaire car il a eu pour conséquence d'accroître le nombre de vols concentrés sur les tranches horaires les plus sensibles pour le sommeil, entre vingt-deux heures et zéro heure et entre cinq heures et sept heures.
M. Jacques Alain Bénisti. C'est vrai !
M. Gérard Sebaoun. Seule l'instauration d'un plafond qui rejoindrait le niveau moyen des principaux aéroports européens concurrents et établi sur la même durée permettra d'améliorer la situation. Cela reviendrait à diviser par deux le nombre actuel de vols de nuit, sans dommage pour la compétitivité de l'aéroport francilien - une étude récente commandée par une association tend à le démontrer.
Cette position unanimement partagée par l'ensemble des associations a curieusement été écartée dans le rapport 2012 de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, qui s'est limitée à préconiser la mise en place d'une plage de repos la nuit du samedi au dimanche de vingt-trois heures à six heures sur l'ensemble des plateformes, dont Roissy. Reconnaissons que ce n'est pas à la hauteur du défi sanitaire qui nous est posé.
M. Jacques Alain Bénisti. Tout à fait !
M. Gérard Sebaoun. Un dernier mot pour souhaiter que l'étude prospective DEBATS, discussion sur les effets du bruit des aéronefs touchant la santé, lancée en 2012 puisse bénéficier des financements nécessaires pour être menée à son terme.
Monsieur le ministre, pouvez-vous m'informer sur les mesures fortes que vous comptez initier afin de mieux concilier la santé des riverains et des Franciliens avec l'activité économique de la plateforme aéroportuaire de Roissy ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, je connais votre attachement à ce dossier. Les difficultés sont majeures. Vous avez d'ailleurs échangé à plusieurs reprises sur cette question avec mes collaborateurs et les fonctionnaires de mon ministère.
Je souscris à vos préoccupations et à votre volonté appuyée de réduire les nuisances sonores générées par les vols. Néanmoins, dans un souci de responsabilité, je ne peux envisager l'interdiction totale des 30 000 mouvements de nuit effectués à Roissy entre vingt-trois heures et six heures, vous en convenez d'ailleurs. Il y a une réalité économique et sociale grave pour le pays, des emplois de proximité étant générés par cette plate-forme.
Les compagnies aériennes effectuent ces vols de nuit parce qu'ils correspondent à un besoin du secteur. Il est d'ailleurs possible qu'il y ait d'autres investissements en raison de ces transports de fret. Dans la très grande majorité des cas, la suppression des vols de nuit conduit à l'arrêt de l'activité en question ou à son transfert vers un autre aéroport. Les zones des aéroports de Francfort ou de Schipol n'ont pas la même dimension que la région Île-de-France. Il serait donc risqué pour l'emploi de vouloir limiter définitivement la capacité aérienne de nuit de la région.
En revanche, je suis comme vous attaché à réduire les nuisances sonores aériennes pour les populations survolées.
M. Jacques Alain Bénisti. Ah !
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. L'amélioration doit passer par des moyens multiples, que ce soit à la source, par le biais d'améliorations techniques, auxquelles travaille d'ailleurs la DGAC, avec les compagnies, comme les exigences accrues en termes de performances acoustiques la nuit, entre vingt-deux heures et six heures, ou par l'accompagnement des riverains par l'aide à l'insonorisation - le Gouvernement est attentif au maintien de ce dispositif.
J'ai ainsi demandé à mes services de mettre en chantier le prolongement de deux ans du taux de remboursement de 100 % à l'intérieur du plan de gêne sonore. J'ai également mis en chantier la révision complète des PGS des aéroports de Charles-de-Gaulle et d'Orly, qui seront achevés à la fin de l'année 2013.
En ce qui concerne l'étude DEBATS, majeure en effet, pilotée par le ministère de la santé, je souscris à votre souhait de la voir pleinement financée, et mes services y contribuent d'ores et déjà. Nous sommes très attentifs à ce que les résultats de cette étude scientifique nous permettent de progresser dans ce domaine.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Sebaoun.
M. Gérard Sebaoun. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.
S'agissant des aéroports comparables, nous avons un peu plus de 500 000 mouvements à Roissy mais il y en a 480 000 à Francfort, où une mobilisation citoyenne a permis d'arrêter les vols de nuit. Nous ne demandons pas évidemment leur interdiction, vous le savez, mais leur réduction progressive à environ la moitié du nombre de vols actuel.
L'inquiétude est tellement réelle après le rapport de l'ACNUSA que le collège des élus et des associations de la CCE de Roissy-Charles-de-Gaulle vient de demander au préfet de la région Île-de-France une réunion d'urgence sur ce grave sujet.

Données clés

Auteur : M. Gérard Sebaoun

Type de question : Question orale

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : Transports, mer et pêche

Ministère répondant : Transports, mer et pêche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 juin 2013

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