activités
Question de :
M. Carlos Da Silva
Essonne (1re circonscription) - Socialiste, républicain et citoyen
M. Carlos Da Silva interroge Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme sur la mono-activité qui touche les territoires. Aujourd'hui, certains quartiers de nos villes sont dénués de toute activité commerciale et de service de proximité. D'autres ont vu la diversité des commerces s'amenuiser et laisser place à une mono-activité qui annihile non seulement la vie et l'attrait d'un quartier, mais ont un effet dévastateur sur tout le territoire communal. Cette raréfaction oblige certains de nos concitoyens à se déplacer, parfois même à quitter purement et simplement la commune pour s'installer là où produits et services dont ils ont besoin sont accessibles. Elle en conduit d'autres à demeurer dans des quartiers économiquement relégués, leur imposant des contraintes de déplacement fortes et essentiellement dirigées vers les grandes enseignes. Il en va de cette tendance à Corbeil-Essonnes, dont le centre-ville, autrefois animé par la vie de ses commerces de proximité, a peu à peu vu disparaître la majeure partie de son artisanat. C'est un cercle vicieux qu'il est indispensable d'enrayer d'urgence. Conscient de l'inscription, dans le projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, d'un volet relatif au renforcement de la diversité des commerces dans les territoires, il souhaiterait que lui soient précisées, pour les communes victimes de la mono-activité, les modalités d'application de la loi de revitalisation du commerce et de l'artisanat dans les territoires.
Réponse en séance, et publiée le 4 décembre 2013
SITUATION DES COMMUNES VICTIMES DE LA MONO-ACTIVITÉ
M. le président. La parole est à M. Carlos Da Silva, pour exposer sa question, n° 427, relative à la situation des communes victimes de la mono-activité.
M. Carlos Da Silva. Madame la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme, nous observons, depuis plusieurs années, une tendance à un certain appauvrissement, au développement d'une forme de mono-activité qui affecte le commerce dans tous nos territoires, du moins dans les zones qualifiées, parfois à tort, de périurbaines. Le développement et la diversification des grandes enseignes, des hypermarchés, favorisées par les économies d'échelle et l'offre qu'elles proposent, ont conduit à une baisse des coûts à la vente qui ont largement entamé l'activité des artisans et petits commerçants, notamment dans le secteur du commerce de bouche et des services.
Aujourd'hui, certains secteurs de nos villes connaissent une forme de désertification de l'activité commerciale et des services de proximité. D'autres ont vu la diversité des commerces s'amenuiser et laisser place à une mono-activité qui entame fortement la vie d'un quartier et influe sur l'attrait même de l'ensemble du territoire communal.
Cette raréfaction est préjudiciable à plus d'un titre pour la vie locale. Elle conduit à une augmentation des déplacements, ciblés sur les zones où produits et services sont accessibles. Elle relègue certains quartiers, voire certaines villes, à un rôle de zone dortoir et sans âme.
Elle inflige, enfin, un coup extrêmement dur à un secteur d'activité, l'artisanat, qui porte en lui une partie des espoirs de la reprise économique à l'échelle du territoire national. Il en est ainsi à Corbeil-Essonnes, dont le centre-ville, autrefois animé par la vie de ses commerces de proximité, a vu peu à peu disparaître la majeure partie de son artisanat. Ne demeurent plus, pour l'essentiel, qu'enseignes de restauration rapide, assurances et banques.
C'est un cercle vicieux qu'il nous faut briser d'urgence. Nous avons connu, pendant dix ans, des choix économiques qui ont malheureusement débouché sur les effets que nous connaissons aujourd'hui en France : un tissu industriel en voie d'extinction, des filières artisanales sous-considérées, une valeur travail de manière générale galvaudée et dévaluée. Au « travailler plus pour gagner plus », il nous faut aujourd'hui opposer le « travailler bien, et différemment ». Nous devons pleinement soutenir un secteur laissé pour compte depuis de trop nombreuses années.
L'artisanat, vous le savez mieux que quiconque, madame la ministre, par l'offre de biens et de services qu'il propose, est un formidable pourvoyeur d'emplois et de formations qu'il nous faut préserver pour préparer la France de demain. Il représente 1 million d'entreprises, plus de 3 millions d'actifs, 300 milliards d'euros de chiffre d'affaires par an et plus de 400 000 emplois créés ces sept dernières années. Il est un secteur stratégique, sur lequel nous devons capitaliser pour sortir de la crise.
Vous allez inscrire dans le projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises un volet relatif au renforcement de la diversité des commerces dans les territoires. Je souhaiterais donc que vous puissiez me préciser les modalités d'application de la loi qui favoriseront, sur le territoire des communes en proie à cette situation, l'émergence d'un processus de revitalisation du commerce et de l'artisanat.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme.
Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme. Monsieur le député, vous évoquez effectivement une question essentielle pour le commerce de proximité dans tous nos territoires. Vous citiez l'exemple de la ville de Corbeil-Essonnes mais beaucoup connaissent la même standardisation, la même désertification commerciale. Nous devons répondre à cette question, répondre à la fois aux attentes de ces petites entreprises, commerciales et artisanales, et à la demande des élus locaux et de nos concitoyens.
Le phénomène, vous avez raison de le rappeler, est ancien. Il est lié, notamment, à une forte augmentation des loyers commerciaux, parfois à des projets d'urbanisme commercial mal appréhendés, aux difficultés qu'éprouvent parfois certains jeunes commerçants à s'installer. C'est la raison pour laquelle j'ai fait de la diversification des centres-villes, du maintien du commerce de proximité une priorité de mon ministère, qui se traduira par le projet de loi que je présenterai à l'Assemblée nationale au début de l'année prochaine pour enrayer le phénomène constaté.
Plusieurs dispositions seront utiles pour les commerçants. D'autres seront des outils mis dans la main des élus locaux. Je pense notamment à la préemption des fonds de commerce vacants par les communes, pour éviter un phénomène de standardisation. Les emplacements laissés libres sont, en effet, souvent captés par certaines agences, certaines activités. Le droit de préemption pourra être délégué à une société d'économie mixte ou à l'intercommunalité. J'ai demandé une évaluation de ce dispositif, qui viendra compléter et enrichir le projet de loi.
Sera également prévu un mécanisme de régulation de l'urbanisme commercial. Vous le savez, les drives ont été soumis, par des dispositions du projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dit ALUR, aux règles de l'urbanisme commercial ; cela a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale et le Sénat.
Je prévois également de mieux maîtriser l'évolution des loyers commerciaux, en les indexant sur l'indice des loyers commerciaux et non plus l'indice du coût de la construction, mais aussi en prévoyant un lissage pour éviter des hausses de loyer brutales et parfois rétroactives. Ainsi, nous donnerons de la visibilité, de la stabilité aux commerçants.
Un autre outil particulièrement important avait été laissé à l'abandon ces dernières années. Je veux parler du FISAC, le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce, avec 1 600 dossiers en stock, qui représentaient un volume de subventions très important. Avec le ministre du budget, nous avons décidé d'abonder ce fonds de 35 millions d'euros en gestion pour 2013. Dans le projet de loi, nous proposerons une refonte de ce dispositif, afin d'être beaucoup plus efficace et profiter d'un effet de levier pour préserver la diversité et la densité de nos commerces, que ce soit dans les zones rurales, dans les quartiers sensibles ou pour les opérations d'animation ou de modernisation collective.
D'autres dispositions sont tout aussi importantes, quoiqu'elles ne soient pas d'ordre législatif. Je pense à l'animation commerciale, à l'incitation des commerçants à se regrouper, à se fédérer pour porter des projets, pour investir, pour se moderniser, pour aller vers l’e-commerce, en lien, bien sûr, avec le réseau des chambres consulaires.
Vous le voyez, le Gouvernement partage votre ambition : que le commerce et l'artisanat soient les plus attractifs possibles dans nos territoires. Oui, nous croyons à ces TPE, qui permettront effectivement la croissance, la création d'emplois dans notre pays et le redressement économique de la France.
Auteur : M. Carlos Da Silva
Type de question : Question orale
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Artisanat, commerce et tourisme
Ministère répondant : Artisanat, commerce et tourisme
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 novembre 2013