protection
Question de :
Mme Chantal Guittet
Finistère (5e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Mme Chantal Guittet interroge M. le Premier ministre sur l'avenir des laboratoires publics chargés de la sécurité sanitaire : santé animale, qualité de l'eau, sécurité alimentaire, environnement, phytopathologie. La confiance des consommateurs a été ébranlée par les crises sanitaires successives, telles que l'affaire récente de la viande de cheval. Les besoins de contrôle ne cessent de s'accroître. L'État a transféré aux collectivités territoriales la responsabilité de ces laboratoires publics territoriaux, présents dans presque tous les départements. Elles ont depuis massivement investi tant dans les locaux, les matériels que les compétences de leurs 4 500 salariés et dans le respect des normes d'accréditation. Or, sous l'effet de la directive services et de la loi LEMA de 2006, des pans entiers de ces activités sont soumis au code des marchés publics, comme des biens et des services quelconques. Cette porte ouverte à la libre concurrence a abouti en quelques années à la disparition de nombreux laboratoires publics. La quasi-totalité des laboratoires municipaux a disparu, de même que certains laboratoires départementaux. Aujourd'hui, seuls deux laboratoires privés effectuent le contrôle sanitaire des eaux pour des régions entières ! Des prélèvements bretons traversent ainsi toute la France, pour être analysés quelquefois en dehors de nos frontières ! Cette concentration autour de véritables oligopoles n'a aucunement profité aux consommateurs. Outre les plans sociaux et la destruction d'emplois dans de nombreuses régions, les délais d'intervention sont totalement inadaptés aux situations de réponses urgentes dans le domaine de l'eau, de la santé animale et plus particulièrement lors de crises sanitaires graves. Doit-on laisser à ces laboratoires privés la seule responsabilité du contrôle public à partir de financement public ? Les risques seraient alors considérables : perte d'indépendance, conflits d'intérêts potentiels liés aux actionnaires, risque que ces oligopoles passent sous pavillon étranger. La France perdrait alors son savoir-faire, son indépendance dans sa capacité d'expertise et de traitement. Dans ce contexte, des collectivités territoriales ont choisi de se regrouper pour conserver leurs laboratoires publics. C'est le cas dans le Finistère, où le premier laboratoire public français sous forme de groupement d'intérêt public a été mis en place, dès 2006, réunissant les laboratoires du conseil général du Finistère et de la communauté urbaine de Brest métropole Océane, puis le 1er janvier 2014 rejoint par le conseil général des Côtes-d'Armor. Pour autant la situation reste très fragile. Dans le contexte de rareté de l'argent public et pour permettre aux collectivités de conserver les moyens d'exercer leurs prérogatives, il est essentiel de renforcer le socle législatif qui définit leur champ d'intervention et de le garantir. Aussi, elle le sollicite afin de connaître les mesures qu'il envisage de prendre, pour encourager et soutenir ces regroupements, pour accompagner sur le plan financier et juridique les efforts déjà accomplis, et inciter les autres collectivités à mutualiser leurs efforts. Elle lui demande de quelle manière il peut faire évoluer la réglementation pour préserver le rôle du réseau public dans le domaine aussi important de la sécurité sanitaire.
Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2014
AVENIR DES LABORATOIRES PUBLICS CHARGÉS DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Guittet, pour exposer sa question, n° 483, relative à l’avenir des laboratoires publics chargés de la sécurité sanitaire.
Mme Chantal Guittet. Madame la ministre déléguée chargée des Français de l'étranger, ma question porte sur l'avenir des laboratoires publics chargés de la sécurité sanitaire : santé animale, qualité de l'eau, sécurité alimentaire, environnement… La confiance des consommateurs a été ébranlée par les crises sanitaires successives, telles que l'affaire récente de la viande de cheval. Les besoins de contrôle ne cessent de s'accroître. L'État a transféré aux collectivités territoriales la responsabilité de ces laboratoires publics territoriaux, présents dans presque tous les départements. Elles ont, depuis, massivement investi tant dans les locaux, les matériels que dans les compétences de leurs salariés, et ce dans le respect des normes d'accréditation.
Or, sous l'effet de la « directive Services » et de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques de 2006, des pans entiers de ces activités sont soumis au code des marchés publics comme des biens et des services quelconques. Cette porte ouverte à la libre concurrence a abouti, en quelques années, à la disparition de nombreux laboratoires publics. La quasi-totalité des laboratoires municipaux a disparu, de même que certains laboratoires départementaux. Aujourd'hui, seuls deux laboratoires privés effectuent le contrôle sanitaire des eaux pour des régions entières ! Des prélèvements bretons traversent ainsi toute la France pour être analysés quelquefois en dehors de nos frontières, ce qui est une aberration !
Cette concentration autour de véritables oligopoles n'a aucunement profité aux consommateurs. Outre les plans sociaux et la destruction d'emplois dans de nombreuses régions, les délais d'intervention sont totalement inadaptés lorsqu'on a besoin d'une réponse urgente dans le domaine de l'eau, de la santé animale et, plus particulièrement, lors de crises sanitaires graves. Doit-on laisser à ces laboratoires privés la seule responsabilité du contrôle à partir de financement public ? Les risques seraient alors considérables : perte d'indépendance, conflits d'intérêts potentiels liés aux actionnaires, risque que ces oligopoles passent sous pavillon étranger. La France perdrait alors son savoir-faire et son indépendance dans sa capacité d'expertise et de traitement.
Dans ce contexte, des collectivités territoriales ont choisi de se regrouper, selon vos vœux, pour conserver leurs laboratoires publics. C'est le cas dans le Finistère, où le premier laboratoire public français sous forme de groupement d'intérêt public a été mis en place dès 2006. Il réunit les laboratoires du conseil général du Finistère et de la communauté urbaine de Brest. Le conseil général des Côtes-d'Armor l'a rejoint en 2014. Pour autant la situation reste très précaire. Dans le contexte de rareté de l'argent public et pour permettre aux collectivités de conserver les moyens d'exercer leurs prérogatives, il est urgent de renforcer et de garantir leur capacité d'intervention.
Quelles mesures est-il envisagé de prendre pour encourager et soutenir ces regroupements, pour les accompagner sur le plan financier et juridique et inciter les autres collectivités à mutualiser leurs efforts ? Comment la réglementation peut-elle évoluer pour préserver le rôle du réseau public dans un domaine aussi important et vital de la sécurité sanitaire ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l'étranger.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger. Madame Guittet, comme je viens de le signaler, le ministre Stéphane Le Foll, en déplacement, m'a chargée de répondre à votre question. Le Gouvernement est très attaché au maintien sur tout le territoire national d'un réseau de laboratoires qui offrent une prestation de qualité en termes de surveillance, d'expertise, de référence analytique et de diagnostic, contribuant ainsi à la pérennité du bon niveau sanitaire national. Le Gouvernement considère que les regroupements de laboratoires constituent une démarche volontaire en phase avec le besoin de rationalisation et de mutualisation des compétences analytiques des laboratoires départementaux.
Une expertise est actuellement menée par le service juridique du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la reconnaissance des prestations d'analyses officielles comme un service d'intérêt économique général. Cette option permettrait, en effet, de déroger aux obligations de mise en concurrence des prestations d'analyses réalisées par les laboratoires départementaux d'analyses dans le respect du droit européen et, notamment, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Le cas de figure des regroupements de laboratoires est intégré à ces réflexions.
L'option d'un service d'intérêt économique général intégrant ces regroupements de laboratoires, si elle peut être retenue, pourrait être intégrée dans un véhicule législatif à venir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Guittet.
Mme Chantal Guittet. Je vous remercie d'avoir apporté ces précisions. Cette demande est très ancienne dans le Finistère. En effet, le regroupement date de 2006. Nous devons nous presser si nous voulons éviter que les laboratoires du conseil général du Finistère, de la communauté de communes très importante de Brest métropole océane et des Côtes-d'Armor, laboratoires, qui ont fait cet effort de mutualisation et de regroupement, ne disparaissent faute de moyens.
Auteur : Mme Chantal Guittet
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 2014