Question orale n° 555 :
médecins

14e Législature

Question de : Mme Isabelle Bruneau
Indre (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Isabelle Bruneau attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la désertification médicale et les inégalités entre les territoires qui en résultent. Les difficultés ne résultent pas du nombre de médecins, mais de leur répartition sur le territoire. Un grand déséquilibre entre les villes et certaines zones rurales ou certaines banlieues défavorisées s'est créé. Or ce déséquilibre pose un véritable problème d'accès aux soins et par conséquent de santé publique. Le Gouvernement a pleinement pris en compte ces difficultés et s'est fortement engagé dans la lutte contre les déserts médicaux grâce, notamment au « pacte territoire santé ». Compte tenu de la situation très préoccupante dans certaine zone, elle souhaiterait connaître les objectifs chiffrés de ce pacte et surtout si elle envisage de prendre des mesures d'urgence afin d'enrayer ces inégalités.

Réponse en séance, et publiée le 26 février 2014

LUTTE CONTRE LA DÉSERTIFICATION MÉDICALE
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Bruneau, pour exposer sa question, n°  555, relative à la lutte contre la désertification médicale.

Mme Isabelle Bruneau. Madame la présidente, ma question, qui s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, concerne la désertification médicale et les inégalités entre les territoires qui en résultent.

Les difficultés ne résultent pas du nombre de médecins, mais de leur répartition sur le territoire. Un grand déséquilibre s'est créé entre les villes et certaines zones rurales ou certaines banlieues défavorisées. Or ce déséquilibre pose un véritable problème d'accès aux soins et par conséquent de santé publique.

La région Centre est fortement touchée par ce phénomène. En 2013, 2 200 médecins généralistes libéraux exerçaient dans cette région. Cela correspond à une densité standardisée de quatre-vingt-un médecins généralistes pour 100 000 habitants. Ces résultats sont très nettement en deçà de la moyenne nationale qui est de quatre-vingt-seize.

Le manque de médecin est encore plus préoccupant dans l'Indre puisque la densité standardisée est de soixante et onze à Issoudun et de soixante-huit sur le secteur de La Châtre et d'Argenton-sur-Creuse. Le canton d'Ardentes connaît actuellement une pénurie et n'aura pratiquement plus de médecin d'ici à 2015. La situation est donc urgente. Je suis fréquemment interpellée sur cette question des déserts médicaux. La moyenne d'âge des médecins étant de cinquante-cinq ans et un quart ayant plus de soixante ans et partiront à la retraite dans les deux ans qui viennent, le besoin en 2020 est estimé à quatre-vingt-onze nouveaux médecins pour ces secteurs.

Le Gouvernement a pris pleinement en compte ces difficultés et s'est fortement engagé dans la lutte contre les déserts médicaux, grâce notamment au Pacte territoire santé. Compte tenu de la situation très préoccupante dans certaines zones de l'Indre, je souhaiterais connaître les objectifs chiffrés de ce pacte, et surtout si la ministre envisage de prendre des mesures d'urgence afin d'enrayer ces inégalités et d'endiguer le sentiment d'isolement qui en résulte très fortement à l'heure actuelle.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Madame la députée, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de ma collègue Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, mais j'ai plaisir à vous répondre en son nom.

Comme vous l'expliquez fort justement dans votre question, ceux qui connaissent les territoires ruraux savent que l'enjeu n'est pas le nombre de médecins, mais le lieu de leur installation et donc leur répartition sur le territoire. Contrairement à ce que l'on entend souvent, ce n'est pas, en effet, le nombre de médecins qui est important, car notre pays se situe à cet égard dans la moyenne très haute de l'OCDE. Surtout, on en compte près de 1,5 fois plus par habitant qu'il y a vingt ans. Au 1er janvier 2013, la densité médicale métropolitaine en activité régulière était de près de 300 médecins pour 100 000 habitants. Ce chiffre est éloquent quand on le compare à celui que vous avez donné.

Il est nécessaire d'intervenir fortement afin de rééquilibrer cette inégalité territoriale qui conduit, avec en outre le vieillissement dont vous avez parlé, à des situations d'alerte pour les années à venir. C'est pourquoi le Pacte territoire santé, lancé par Mme Marisol Touraine il y a plus d'un an, est un des socles de la stratégie nationale de santé. De ce point de vue, les premiers résultats peuvent nous rendre plus ou moins optimistes, dans la mesure où déjà 180 praticiens territoriaux de médecine générale ont franchi le pas en 2013 en venant s'installer dans des territoires ruraux. Devant le succès du dispositif – c'est la première fois qu'un dispositif donne de tels résultats – 200 nouvelles installations sont prévues pour l'année 2014.

Dans le même temps, vous le savez, nous favorisons l'installation de futurs professionnels par le versement, pendant les études, d'une bourse en contrepartie de l'engagement à exercer son activité future dans un territoire manquant de professionnels de santé. Aujourd'hui, 591 étudiants ou internes en médecine ont signé ces contrats d'engagement de service public à destination des territoires dont la démographie médicale est faible. J'ajoute que le dispositif vient d'être élargi aux futurs chirurgiens-dentistes.

D'autre part les structures d'exercices coordonnés maillent le territoire et la dynamique engagée montre bien que ce cadre d'exercice répond bien aux attentes de la profession, puisqu'entre 2012 et 2013 le nombre de maisons de santé a plus que doublé, passant de 174 à 370. En 2014, il y en aura plus de 600. En tant qu'ancien élu d'une circonscription rurale, je sais que c'est l'une des pistes qui permettent de répondre à cette situation.

Enfin, l'accès aux soins urgents en moins de trente minutes sera une réalité en 2014 pour un million de personnes supplémentaires, ce qui entraîne une évolution considérable du nombre de médecins correspondants du Samu, puisque nous passons de 150 en 2012, à 650 en 2014.

Ces premiers résultats sont le fruit de la mobilisation des professionnels de santé, des universités, des élus et des agences régionales de santé. Sans leur implication totale, on ne pourrait atteindre les objectifs fixés. Les résultats que je viens d'égrainer peuvent nous rendre raisonnablement optimistes, et à terme, si nous allons dans cette direction, nous apporterons une solution à ce déséquilibre territorial.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Bruneau.

Mme Isabelle Bruneau. Je remercie M. le ministre pour ces précisions. J'insiste sur le sentiment d'urgence qui règne dans l'Indre, notamment avec le vieillissement démographique. Les habitants connaissent un véritable sentiment d'isolement.

Données clés

Auteur : Mme Isabelle Bruneau

Type de question : Question orale

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Affaires sociales et santé

Ministère répondant : Affaires sociales et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 février 2014

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