PLU
Question de :
M. Stéphane Travert
Manche (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Stéphane Travert interroge Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur l'article 157 de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové définitivement adoptée le 20 février 2014 et qui modifie l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme. Lors de l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, il était indiqué que "dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, le règlement peut délimiter des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées (Stecal)". Cette possibilité permettait, lors de l'élaboration d'un PLU, d'identifier les constructions existantes en zone A et N, non liées à l'activité d'une exploitation agricole (pour les zones A) et d'autoriser leur évolution, notamment des extensions. La nouvelle rédaction de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme modifié à l'article 157 de la loi ALUR dispose à l'alinéa 6 que le règlement peut « à titre exceptionnel délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des Stecal ». Il est également précisé que les constructions existantes situées en dehors de ces secteurs et dans les zones naturelles, agricoles ou forestières ne peuvent faire l'objet que d'une adaptation ou d'une réfection, à l'exclusion de tout changement de destination. Cela revient à dire que, dans les territoires ruraux comme la Manche, à l'urbanisation dispersée, aucune extension des habitations existantes situées dans les zones naturelles ou agricoles ne pourra être autorisée. Il en est de même pour les annexes. La situation de ces habitations restera donc figée à ce qu'elle est à la date d'approbation du PLU. Dans le cadre de l'élaboration d'un PLU et notamment d'un PLU intercommunal, il va de soi que le terme « exceptionnel » ne permettra pas d'identifier toutes les habitations isolées et pourra conduire à une véritable mise sous cloche de celles qui n'auront pas été recensées. La situation est la même pour les constructions non habitables. Celles-ci ne pourront pas bénéficier d'un changement de destination quand bien même leurs caractéristiques architecturales justifieraient qu'elles soient confortées. Cela interroge sur l'intérêt qu'il y a à réaliser de tels documents dans ces conditions. En définitive, il semble que la loi littoral va donc s'appliquer à l'ensemble du territoire de la Manche. C'est pourquoi il l'interroge sur la forme que prendra le décret d'application de la loi ALUR et plus particulièrement de l'article 157.
Réponse en séance, et publiée le 16 avril 2014
DÉLIMITATION DES SECTEURS DE TAILLE ET DE CAPACITÉ D'ACCUEIL LIMITÉES DANS LES ZONES NATURELLES, AGRICOLES OU FORESTIÈRES DES PLANS LOCAUX D'URBANISME
M. le président. La parole est à M. Stéphane Travert, pour exposer sa question, n° 591, relative à la délimitation des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées – STECAL – dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des plans locaux d'urbanisme.
M. Stéphane Travert. Madame la ministre du logement et de l'égalité des territoires, je tiens à vous faire part de l'inquiétude d'un grand nombre d'élus ruraux de mon département, la Manche, quant à la rédaction de l'article 157 de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, définitivement adoptée le 20 février 2014 et qui modifie l'article L.123-1-5 du code de l'urbanisme. Ces élus m'ont interpellé sur la rédaction précédente de l'article, qui indiquait que, lors de l'élaboration d'un PLU « dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, le règlement peut délimiter des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) ». Cette possibilité permettait, lors de l'élaboration d'un PLU, d'identifier les constructions existantes en zone A et N, non liées à l'activité d'une exploitation agricole – pour les zones A – et d'autoriser leur évolution, notamment les extensions.
La nouvelle rédaction de l'article L.123-1-5 du code de l'urbanisme modifié à l'article 157 de la loi ALUR dispose, à l'alinéa 6°, que le règlement peut « à titre exceptionnel » – c'est sur ce terme que la question se pose – délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des STECAL ». Il est également précisé que les constructions existantes situées en dehors de ces secteurs et dans les zones naturelles, agricoles ou forestières ne peuvent faire l'objet que d'une adaptation ou d'une réfection, à l'exclusion de tout changement de destination.
Cela revient à dire que dans les territoires ruraux telle la Manche – en particulier la côte ouest du Cotentin – à l'urbanisation dispersée et qu'il convient, nous en sommes bien conscients, de ne pas étendre par de nouvelles habitations, aucune extension des habitations existantes situées dans les zones naturelles ou agricoles ne pourra être autorisée. Il en est de même pour les annexes. La situation de ces habitations restera donc figée à ce qu'elle est à la date d'approbation du PLU. Dans le cadre de l'élaboration d'un PLU, notamment d'un PLU intercommunal, il va de soi que le terme « exceptionnel » ne permettra pas d'identifier toutes les habitations isolées de notre territoire. Cela revient donc à mettre sous cloche celles qui ne seront pas recensées. La situation est la même pour les bâtiments dont l'usage n'est pas celui réservé à une construction habitable. Ceux-ci ne pourront pas bénéficier d'un changement de destination, quand bien même leurs caractéristiques architecturales justifieraient qu'ils soient confortés.
Je vous laisse imaginer les difficultés que nous aurons à faire entendre un tel message aux représentants des communes membres de l'EPCI lors des travaux relatifs au PLUI, et je ne parle même pas ici de la réaction des propriétaires concernés. Cela suscite des interrogations sur l'intérêt qu'il y a à réaliser de tels documents dans ces conditions. En définitive, la loi littoral va donc s'appliquer à l'ensemble du territoire du département de la Manche. Quelle perspective offririons-nous aux habitants actuels, mais aussi aux potentiels acquéreurs, si aucune évolution des maisons qui seraient situées en zone naturelle ou agricole n'était envisageable ? Bien peu, et je crains que cela ne participe à vider nos territoires. Madame la ministre, pouvez-vous nous informer de la forme que prendra le décret d'application de la loi ALUR, en particulier de son article 157 ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires. Monsieur le député, l'objectif du Gouvernement est de marquer avec la loi ALUR un tournant en matière de protection des zones agricoles et naturelles. Des choix ont donc été faits et des mesures fortes prises en ce qui concerne la constructibilité dans ces zones. C'est notamment le cas de la mesure portant sur les secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées – les STECAL, ou « pastillage ». Les zones agricoles et naturelles sont en effet des zones en principe inconstructibles. Or, le recours au pastillage s'est révélé être source de dérives et d'abus dans certains territoires, notamment en ce qui concerne le nombre et la taille des pastilles, souvent coûteuses en termes d'équipements, de services publics et de réseaux, consommatrices de terres cultivables et préjudiciables à la qualité des paysages.
Par ailleurs, dans près de la moitié des départements où les communes ont eu recours à cette technique, il a été constaté un pastillage sur des parcelles non bâties, facteur supplémentaire de mitage des terres agricoles ou naturelles. C'est pour cette raison que la loi prévoit désormais que le recours aux STECAL doit rester exceptionnel, conformément au principe d'inconstructibilité des zones agricoles et naturelles.
Pour autant, et comme vous le faites remarquer à juste titre, il est évident qu'il est nécessaire de pouvoir continuer à entretenir le bâti existant situé dans ces zones. C'est pourquoi, parallèlement aux restrictions en matière de pastillage, les possibilités d'évolution du bâti situé en zones agricoles et naturelles ont été précisées, voire étendues lorsque cela était nécessaire. L'objectif est d'inciter les collectivités territoriales à utiliser ces mécanismes. Ainsi, il est dorénavant clairement écrit que toutes les constructions situées dans ces zones peuvent faire l'objet d'adaptations et de réfections. C'est une avancée par rapport au droit actuel, qui n'autorise que les bâtiments agricoles. Les changements de destination et les extensions limitées restent impossibles, s'agissant de zones à protéger.
Les dispositions concernant le traitement du bâti remarquable ont, elles aussi, été améliorées : elles ne sont plus réservées aux zones et aux bâtiments agricoles comme auparavant. Elles s'appliquent maintenant à tous les bâtiments remarquables situés en zone agricole comme en zone naturelle. Il est donc possible de prévoir le changement de destination de ces bâtiments, et leur extension limitée est même devenue possible en zone agricole. Ces évolutions devront être soumises à l'avis conforme des commissions compétentes. Comme vous pouvez le constater, monsieur le député, les nouvelles dispositions étaient donc nécessaires, mais elles apparaissent également parfaitement équilibrées, et nous aurons un travail à mener ensemble sur les décrets d'application de ce texte.
Auteur : M. Stéphane Travert
Type de question : Question orale
Rubrique : Urbanisme
Ministère interrogé : Égalité des territoires et logement
Ministère répondant : Logement et égalité des territoires
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er avril 2014