Question orale n° 680 :
chômage partiel

14e Législature

Question de : Mme Isabelle Attard
Calvados (5e circonscription) - Écologiste

Mme Isabelle Attard interroge M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur la simplification du chômage partiel en France. Aujourd'hui, 2 788 000 Français sont au chômage. Il faut y ajouter 1 318 000 Français qui souhaitent un emploi, sans être officiellement chômeurs. Depuis les années 70, jusqu'à la récente loi sur la sécurisation de l'emploi, on entend répéter que faciliter les licenciements, c'est faciliter les embauches. Le compte n'y est pas. Elle souhaite attirer son attention sur une des causes du chômage : les licenciements économiques dans les entreprises qui traversent des difficultés passagères. Pour diminuer de manière importante leurs coûts salariaux, ces entreprises doivent licencier une partie de leurs salariés. Les dirigeants sont perdants : en licenciant, ils se privent de l'expérience de leurs salariés. Et, en cas de reprise de l'activité, cette perte est difficilement réparable. Les salariés licenciés sont évidemment perdants. Les salariés maintenus sont perdants : les licenciements augmentent la pénibilité du travail. Il y a pourtant une solution efficace à ce problème, le chômage partiel. C'est une solution lourde à appliquer en France. Le Canada sait le faire simplement. Après une procédure rapide, le temps de travail des salariés est réduit. La réduction maximum est de 40 %. Les salaires sont baissés en proportion. Mais les salariés reçoivent un deuxième chèque, de la part de l'assurance chômage. Ce chèque vient compenser la perte de salaire, pour les maintenir à 95 % de leur salaire habituel. Les dirigeants sont gagnants : leurs dépenses salariales sont diminuées pendant la durée de leurs difficultés. Si leur carnet de commande se remplit, ils peuvent remonter le temps de travail. L'assurance chômage est gagnante. L'indemnisation de quelques salariés à temps partiel coûte bien moins que l'accompagnement et l'indemnisation de vrais chômeurs. Enfin, les salariés sont gagnants. Ils ne sont pas licenciés, et leurs revenus diminuent peu. Il faut s'assurer qu'en cas de licenciement à terme leur indemnisation chômage soit calculée sur leurs revenus complets, et pas sur le montant partiel. Ce système de chômage partiel facile à mettre en place serait une solution utile aux difficultés que rencontrent certaines de nos entreprises. Elle pense notamment aux TPE et aux PME qui sont plus fragiles. Elle demande s'il pense simplifier le chômage partiel français pour mieux protéger nos entreprises et nos salariés.

Réponse en séance, et publiée le 11 juin 2014

SIMPLIFICATION DU RÉGIME DU CHÔMAGE PARTIEL
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour exposer sa question, n°  680, relative à la simplification du régime du chômage partiel.

Mme Isabelle Attard. Ma question s'adresse au ministre du travail et porte sur la simplification du chômage partiel en France. Aujourd'hui, 5 662 800 Français sont au chômage. Il faut y ajouter 1 318 000 Français qui souhaitent un emploi sans être officiellement chômeurs. Depuis les années 70, jusqu'à la récente loi sur la sécurisation de l'emploi, on a entendu répéter que faciliter les licenciements, c'est faciliter les embauches… Le compte n'y est pas.

J'appelle l'attention du Gouvernement sur une des causes du chômage : les licenciements économiques dans les entreprises qui traversent des difficultés passagères. Pour diminuer de manière importante leurs coûts salariaux, ces entreprises doivent licencier une partie de leurs salariés. Mais les dirigeants sont perdants car, en licenciant, ils se privent de l'expérience de leurs salariés, et, en cas de reprise de l'activité, ces départs sont difficilement remplaçables. Les salariés licenciés sont évidemment perdants, mais les salariés maintenus le sont aussi car les licenciements augmentent la pénibilité du travail.

Il y a pourtant une solution efficace à ce problème : le chômage partiel. C'est une solution visiblement difficile à appliquer en France. Le Canada sait pourtant le faire simplement : après une procédure rapide, le temps de travail des salariés est réduit au maximum de 40 % et les salaires sont baissés en proportion. Mais les salariés reçoivent un second chèque, de la part de l'assurance chômage. Ce chèque vient compenser la perte de salaire pour le maintenir à 95 % du salaire habituel. Les dirigeants sont gagnants : leurs dépenses salariales sont diminuées pendant la durée de leurs difficultés, et si leur carnet de commandes se remplit, ils peuvent remonter le temps de travail. L'assurance chômage est, elle aussi, gagnante : l'indemnisation de quelques salariés à temps partiel coûte bien moins que l'accompagnement et l'indemnisation de vrais chômeurs. Enfin, les salariés sont, eux aussi, gagnants : ils ne sont pas licenciés et leurs revenus diminuent peu. Il faut s'assurer qu'en cas de licenciement à terme, leur indemnisation chômage soit calculée sur leurs revenus complets, et pas sur le montant partiel. Ce système de chômage partiel, facile à mettre en place, serait une solution utile aux difficultés que rencontrent certaines de nos entreprises ; je pense notamment aux TPE et aux PME, plus fragiles que les autres.

Le Gouvernement envisage-t-il de simplifier le chômage partiel français pour mieux protéger nos entreprises et nos salariés ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la Secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Madame la députée, sachez que le Gouvernement partage votre préoccupation de simplification et d'accessibilité du recours à l'activité partielle pour les entreprises confrontées à des difficultés. Comme vous le savez, le dispositif a déjà connu plusieurs réformes au cours des dernières années en vue d'une plus grande mobilisation des entreprises s'agissant de ce dispositif, dans un contexte de ralentissement économique.

Reprenant les principes énoncés dans l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, la réforme intervenue dans le cadre de la loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 pose le cadre d'une simplification profonde, et surtout pérenne, du dispositif, notamment via la création d'un dispositif unique d'allocation d'activité partielle.

Cette réforme, mise en œuvre depuis le 1er juillet 2013, poursuit un triple objectif : favoriser le recours à l'activité partielle comme alternative au licenciement ; viser davantage les petites et moyennes entreprises, les très petites entreprises et les secteurs d'activité qui recourent peu à cette forme de travail ; simplifier le dispositif et le rendre plus attractif pour les entreprises et les salariés.

Elle a ainsi entraîné l'instauration d'un dispositif unique d'allocation d'activité partielle, des démarches allégées pour les entreprises et une meilleure attractivité du dispositif, notamment d'un point de vue financier, puisque le niveau d'indemnisation des heures chômées a été amélioré aussi bien pour les employeurs que pour les salariés.

Le bilan, neuf mois après la mise en œuvre de la réforme, est positif. On observe en effet une forte augmentation du recours à l'activité partielle, qu'il s'agisse du volume d'heures autorisées à être chômées – plus de 105 millions –, du nombre d'autorisations – plus de 26 000 – ou de la durée moyenne autorisée – 120 jours. On assiste également à une diversification des secteurs concernés, avec notamment une hausse de la part représentée par le secteur des services. Enfin, les entreprises de moins de cinquante salariés représentent désormais 80% des autorisations de recours.

L'ouverture, à compter du 1er octobre, d'un service entièrement dématérialisé de recours à l'activité partielle permettra de franchir une nouvelle étape dans la simplification, en facilitant l'accès du dispositif aux entreprises, en simplifiant la démarche et en accélérant les délais de traitement des demandes.

L'ensemble de ces mesures devrait permettre aux entreprises de mieux gérer ces périodes de difficultés économiques et d'accompagner les salariés, notamment grâce à des actions de formation.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie pour cette réponse. J'espère sincèrement que ces mesures auront des effets rapides, car entre mars et avril, nous avons enregistré 14 800 inscriptions supplémentaires de demandeurs d'emploi – 114 200 en un an. Il est donc grand temps de prendre des mesures efficaces en s'inspirant des pays où elles fonctionnent déjà.

Données clés

Auteur : Mme Isabelle Attard

Type de question : Question orale

Rubrique : Chômage : indemnisation

Ministère interrogé : Travail, emploi et dialogue social

Ministère répondant : Travail, emploi et dialogue social

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juin 2014

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