Question orale n° 751 :
électricité

14e Législature

Question de : M. Yves Blein
Rhône (14e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Yves Blein attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la situation des industriels électro-intensifs. Récemment, le ministre a annoncé qu'il s'engageait à aider les industriels électro-intensifs, considérant que, pour agir sur la compétitivité-coût, la question de l'énergie était centrale. Cette perspective est d'autant plus nécessaire que l'impact de l'exploitation des gaz de schiste continue à modifier en profondeur les grands équilibres énergétiques mondiaux, avec des conséquences considérables sur l'industrie chimique en particulier. Les conditions d'accès à l'énergie sont donc, pour nos entreprises, plus que jamais essentielles. Aussi, il souhaiterait connaître les mesures concrètes qui sont envisagées pour permettre à nos entreprises électro-intensives de bénéficier d'un accès à l'énergie à des coûts compétitifs.

Réponse en séance, et publiée le 26 novembre 2014

SITUATION DES INDUSTRIELS ÉLECTRO-INTENSIFS
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Blein, pour exposer sa question, n°  751, relative à la situation des industriels électro-intensifs.

M. Yves Blein. Madame la secrétaire d’État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire, le ministre de l'économie a récemment annoncé qu'il s'engageait à aider les industriels électro-intensifs.

Il a en effet considéré que, pour agir sur la compétitivité-coût, la question de l'énergie était centrale, celle-ci constituant un élément essentiel des prix de revient.

Cette perspective est d'autant plus nécessaire que l'impact de l'exploitation des gaz de schiste aux États-Unis – et, demain, ailleurs – continue à modifier en profondeur les grands équilibres énergétiques mondiaux, avec des incidences considérables sur l'industrie chimique en particulier.

Hie encore, le quotidien Les Échos annonçait que le groupe INEOS, un grand acteur de ce secteur, envisageait d'investir un milliard d'euros au Royaume-Uni dans l'exploitation des gaz de schiste, crédibilisant ainsi encore davantage les perspectives et les ambitions de nos voisins anglais en la matière et montrant, à l'évidence, que nous ne sommes plus face à une bulle spéculative mais devant un bouleversement fondamental du paysage énergétique mondial.

Loin de moi l'idée de rouvrir le débat sur l'exploitation des gaz de schiste en France, même si les évolutions technologiques pourraient à nouveau nous amener, demain, à poser la question, mais il n'en reste pas moins que cette nouvelle ressource modifie considérablement, en aval, les coûts de revient de nombreux acteurs industriels européens et français.

Ce sont 123 milliards de dollars qui sont actuellement investis aux États-Unis dans la réalisation de complexes industriels chimiques, lesquels rendront l'industrie américaine extrêmement performante dans la fabrication d'éthylène, de polyéthylène, d'ammoniaque et de l'ensemble de leurs dérivés.

Ce ne sont pas moins de 194 projets industriels qui, demain, pourraient avoir des impacts violents sur l'industrie chimique française, aujourd'hui encore exportatrice.

Les conditions d'accès à l'énergie sont donc plus que jamais essentielles pour nos entreprises.

Compte tenu des déclarations de votre collègue M. Macron, pouvez-vous nous dire, madame la secrétaire d’État, quelles mesures concrètes sont envisagées pour faciliter l'accès à l'énergie, à des coûts compétitifs, de nos entreprises électro-intensives ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Carole Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le député, l'énergie est en effet un facteur essentiel de compétitivité pour de nombreuses entreprises industrielles : la chimie, vous l'avez rappelé, mais aussi l'acier, l'aluminium, l'agroalimentaire et bien d'autres.

Sans volontarisme politique de la part du Gouvernement, nous serions face à un risque important de délocalisations progressives ; c'est particulièrement vrai pour les secteurs exposés à la concurrence internationale.

Depuis deux ans, le Gouvernement a agi. Il a ainsi créé le statut d'entreprise gazo-intensive, il s'est battu sur le plan européen pour maintenir les exonérations dont bénéficient les entreprises électro-intensives, et il a renforcé l'exonération sur le coût du transport dans le projet de loi sur la transition énergétique.

Ces actions permettent de maintenir la compétitivité de la plupart des entreprises, mais un problème particulier demeure pour une trentaine de grands sites industriels électro-intensifs, ce qui représente près de 10 000 emplois directs.

Les contrats de fourniture d'électricité de ces sites arriveront bientôt à échéance. Il convient donc de trouver des substituts car, pour eux, l'électricité représente plus de 30 % de leur valeur ajoutée : une hausse du prix de l'électricité ne serait donc pas supportable.

J'ajoute que ces sites ont déjà réalisé les efforts nécessaires afin d'être plus efficaces sur le plan énergétique – ce qui est logique, compte tenu de l'importance de l'électricité dans leurs coûts.

J'ajoute, également, que le marché de l'électricité n'apporte pas de solutions à ces sites car le prix de marché est deux fois supérieur aux prix en vigueur dans des pays comme l'Islande, le Canada ou les États-Unis. Nous sommes donc confrontés à un problème industriel majeur.

C'est pourquoi le ministre de l'économie a fait part de sa volonté de créer un nouveau mécanisme ciblé afin de permettre à ces sites de continuer à bénéficier des mêmes prix qu'aujourd'hui : il ne s'agit donc pas de leur donner un nouvel avantage mais de leur permettre de préserver la situation actuelle.

Plus globalement, le Gouvernement souhaite que l’Union européenne permette aux États membres qui le veulent de mettre en place les dispositifs similaires à ceux du Canada, de la Russie ou des États-Unis afin d'établir un niveau égal de concurrence pour leurs industriels électro-intensifs.

Le travail est en cours pour créer ce dispositif et, si possible, l'insérer dans le projet de loi pour l'activité qui sera présenté au mois de janvier. Nous souhaitons qu'un dialogue, le plus transparent possible, soit instauré avec la Commission européenne sur son acceptabilité communautaire.

Il est encore trop tôt pour entrer dans les détails techniques du mécanisme, mais je peux préciser qu'il fera appel à l'hydroélectricité car c'est la seule source d'électricité dont le coût de production est comparable à ce que les autres pays peuvent offrir.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Blein.

M. Yves Blein. Je vous remercie de ces propos rassurants, madame la secrétaire d’État, puisque la prochaine loi pour l'activité inscrit donc le traitement d'un tel dossier dans une perspective européenne.

La situation est telle, en effet, qu'il n'est sans doute pas possible d'attendre la conclusion de grands accords internationaux, voire européens, pour que nos industriels soient soutenus en matière de coût énergétique, problème crucial pour eux.

Si la loi pour l'activité présente des avancées, elles seront vraiment les bienvenues et j'y serai personnellement très attentif.

Données clés

Auteur : M. Yves Blein

Type de question : Question orale

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique

Ministère répondant : Économie, industrie et numérique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 novembre 2014

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