eau
Question de :
M. Alain Fauré
Ariège (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Alain Fauré attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les difficultés que traverse le secteur agricole. Au vu du nombre d'exploitations disparues - près de 25 % - les hommes et les femmes de ce secteur, qui travaillent sans relâche, doutent parfois de l'avenir de leur métier et de la préservation de leur exploitation. La confiance des agriculteurs ne peut revenir qu'à travers un cadre législatif assaini et simplifié. Ces derniers se sentent menacés par la multiplication des réglementations qu'ils doivent satisfaire et par le nombre de contrôles auxquels ils sont soumis. Il semble pertinent de rouvrir un débat de fond sur la mise en valeur des bonnes pratiques et des innovations dans les programmes d'action de la directive nitrate. Il apparaît en effet nécessaire d'appliquer correctement cette directive en y associant l'objectif écologique et la pérennisation du monde agricole. Bien que la France ait déjà été condamnée deux fois par la CJUE, une fois en juin 2013 pour désignation incomplète des zones vulnérables et une deuxième fois le 4 septembre 2014 pour insuffisance des programmes d'actions applicables dans ces zones, l'État ne doit pas pour autant dans la précipitation fragiliser son agriculture dans le but d'éviter de lourdes sanctions financières. Aujourd'hui la nécessité d'améliorer la qualité de l'eau est admise, même par les agriculteurs qui adoptent des comportements raisonnés, mais ont besoin de réponses à court et moyen termes sur la cohérence et la pertinence des programmes d'actions. Dans le département de l'Ariège, il serait souhaitable de proposer une contractualisation qui permettrait de déterminer les zones, mais aussi les pratiques à adopter, afin de poursuivre l'amélioration de la qualité des eaux. La France n'a pas une seule agriculture et chaque département devrait être autorisé à mettre en place une contractualisation qui permettrait d'exploiter correctement les terres tout en préservant la qualité des eaux. Le Premier ministre a déclaré que « nous travaillerions à une adaptation de cette directive nitrates dont l'approche normative a clairement montré ses limites ». Il souhaiterait donc connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour simplifier et moderniser les réglementations en vigueur, en particulier dans le domaine de la gestion des nitrates, afin que celles-ci puissent s'adapter aux particularismes locaux.
Réponse en séance, et publiée le 3 décembre 2014
AMÉLIORATION DE LA MISE EN ŒUVRE DE LA DIRECTIVE « NITRATES »
M. le président. La parole est à M. Alain Fauré, pour exposer sa question, n° 788, relative à l'amélioration de la mise en œuvre de la directive « Nitrates ».
M. Alain Fauré. Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et concerne les difficultés que traverse le secteur agricole. Au vu du nombre d'exploitations disparues – près de 25 % –, les hommes et les femmes de ce secteur, qui travaillent sans relâche, doutent parfois de l'avenir de leur métier et de la pérennité de leur exploitation. La confiance des agriculteurs ne peut revenir qu'au travers d'un cadre législatif assaini et simplifié. Ces derniers se sentent menacés par la multiplication des réglementations auxquelles ils doivent satisfaire et par le nombre de contrôles auxquels ils sont soumis. Il semble pertinent de rouvrir un débat de fond sur la mise en valeur des bonnes pratiques et des innovations dans les programmes d'actions de la directive « Nitrates », afin d'appliquer correctement cette directive, en y associant l'objectif écologique et la pérennisation du monde agricole. C'est une nécessité.
Bien que la France ait été condamnée deux fois par la Cour de justice de l'Union européenne, une première fois en juin 2013 pour désignation incomplète des zones vulnérables et une seconde fois le 4 septembre 2014 pour insuffisance des programmes d'actions applicables dans ces zones, l'État ne doit pas pour autant, en se précipitant, fragiliser son agriculture dans le but d'éviter de lourdes sanctions financières. Aujourd'hui, la nécessité d'améliorer la qualité de l'eau est admise même par les agriculteurs, lesquels adoptent des comportements raisonnés, mais ont besoin de réponses à court et moyen termes sur la cohérence et la pertinence des programmes d'actions.
Dans mon département de l'Ariège, nous souhaitons proposer une contractualisation qui permettrait de déterminer les zones, mais aussi les pratiques à suivre afin de poursuivre l'amélioration de la qualité des eaux. La France n'a pas une seule agriculture et chaque département devrait être autorisé à instaurer une contractualisation qui permettrait d'exploiter correctement les terres, tout en préservant la qualité des eaux. Le Premier ministre a déclaré qu'il travaillerait « à une adaptation de cette directive « Nitrates » dont l'approche normative a clairement montré les limites. » Je souhaiterais connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour simplifier et moderniser les réglementations en vigueur, en particulier dans le domaine de la gestion des nitrates, afin que celles-ci puissent tenir compte des particularismes locaux. Je tiens à ajouter que les agriculteurs ne sont pas les seuls pollueurs et qu'ils ne doivent pas être stigmatisés.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le député Alain Fauré, je connais bien votre engagement pour défendre les agriculteurs de votre beau territoire, l'Ariège, qui jouxte le mien. Vous avez interrogé Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Celle-ci ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.
La mise en œuvre de la directive « Nitrates », qui vise à préserver les ressources en eau contre les pollutions liées aux nitrates d'origine agricole, implique la désignation de zones vulnérables à la pollution azotée et aux phénomènes d'eutrophisation, dans lesquelles doit être défini un programme d'actions mis en œuvre par les agriculteurs pour limiter les risques de pollution. Comme vous l'avez rappelé, deux contentieux ont été engagés contre la France pour mauvaise application de cette directive, du fait d'une désignation insuffisante des zones vulnérables et de programmes d'actions également insuffisants. La Cour de justice de l'Union Européenne nous a condamnés sur ces deux sujets respectivement en juin 2013 et en septembre 2014.
Ces contentieux nous ont conduits à revoir en profondeur les modalités d'application en France de la directive « Nitrates », avec notamment une réforme des programmes d'actions sur laquelle les discussions avec les parties prenantes agricoles ont commencé dès 2010. Elles ont conduit à un programme d'actions national « nitrates » adopté en 2011 et complété en 2013 – ce socle commun s'applique à toutes les zones vulnérables – et à des programmes d'actions régionaux adoptés courant 2014. Les mesures correspondantes n'ont donc pas été prises dans la précipitation ; elles ont été, au contraire, longuement mûries et concertées.
Il n'y a d'ailleurs pas un seul programme d'actions « nitrates » uniforme sur tout le territoire, mais bien des programmes régionaux distincts. Le socle commun national tient compte de la diversité des types d'exploitations. De même, les déclinaisons régionales sont, quant à elles, adaptées aux contextes locaux et renforcées là où les enjeux « eau » le nécessitent. Le Gouvernement s'est ainsi attaché à développer une approche agronomique pour décliner les mesures obligatoires de la directive et à choisir des mesures soutenables pour les exploitations agricoles, en particulier pour les élevages.
Pour autant, certains points des programmes d'actions soulèvent encore des difficultés, en particulier les mesures d'encadrement des épandages sur les sols en forte pente, qui visent à limiter les ruissellements de composés azotés vers les eaux. Des discussions sont en cours avec la Commission européenne afin de déterminer les évolutions nécessaires pour répondre à l'arrêt de la Cour de justice de septembre 2014. Nous examinerons avec l'ensemble de nos partenaires les choix possibles et leurs impacts avant de faire nos propositions début 2015 à la Commission.
Il serait intéressant de proposer à la Commission européenne toutes les expériences probantes, avec des résultats effectifs scientifiquement étayés sur la qualité des eaux, pour contribuer à une application plus efficace de la directive et à son éventuelle évolution. C'est dans ce cadre que Mme Ségolène Royal soutient votre démarche qui repose sur la mobilisation collective volontaire des agriculteurs à l'échelle de territoires bien identifiés.
Enfin, je tiens à préciser comme vous, monsieur le député, que le secteur agricole n'est pas le seul sur lequel portent les efforts d'amélioration de la qualité de l'eau : les collectivités et les industries sont elles aussi engagées dans des démarches significatives de réduction de leurs pollutions. C'est le cas notamment des collectivités qui doivent mettre en place pour leurs stations d'épuration des eaux usées un traitement plus poussé de l'azote dans les zones sensibles à l'eutrophisation, dont la dernière délimitation date de 2010.
M. le président. La parole est à M. Alain Fauré.
M. Alain Fauré. J'apprécie fortement que la ministre offre, notamment aux départements, la possibilité de réaliser des tests dans un cadre scientifique. Les mesures prises devront en effet être très précises afin de pouvoir étendre le principe. Je suis également heureux d'entendre dans la réponse que vous a préparée Mme la ministre de l'écologie que celle-ci reconnaît que les agriculteurs ne sont pas les seuls acteurs en matière de pollution. Cela est important. En effet, on pouvait comprendre autre chose dans la communication de ces derniers mois, et cela n'était ni particulièrement gai ni valorisant pour une profession confrontée à d'importantes difficultés.
Auteur : M. Alain Fauré
Type de question : Question orale
Rubrique : Déchets, pollution et nuisances
Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie
Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 2014