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Question de :
Mme Florence Delaunay
Landes (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Mme Florence Delaunay appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la relance du gemmage en Aquitaine. L'Europe consomme chaque année 308 000 tonnes de colophane, résidu solide obtenu après distillation de la térébenthine et utilisée en parfumerie, papeterie, cosmétiques, adhésifs, peintures, laques, vernis, marquage routier et même chewing-gum. La récolte de la gemme a été définitivement arrêtée en France depuis 1990 pour cause de rentabilité, au profit d'importation principalement venues de Chine, leader mondial de produits à base de résine de pins, mais qui réduit sa production. Or la résine de pin peut remplacer les produits dérivés du pétrole, et la demande mondiale s'accroit à tel point que le prix de la tonne de colophane atteint aujourd'hui près de 3000 dollars. 2015 sera l'année de la mise en œuvre du plan national de relance de la filière bois-forêt, prévu dans la loi d'avenir. Dans ce cadre, Mme la députée s'est associée au courrier signé par ses collègues Serge Bardy et Guillaume Bachelay, demandant au Premier ministre la tenue des premières assises de l'industrie papetière et de la filière cellulose pour permettre à l'État d'indiquer clairement l'accompagnement qu'il souhaite porter à cette filière. Elle lui demande comment il sera possible d'envisager l'industrialisation du gemmage et son insertion dans la filière bois-forêt.
Réponse en séance, et publiée le 28 janvier 2015
RELANCE DU GEMMAGE EN AQUITAINE
M. le président. La parole est à Mme Florence Delaunay, pour exposer sa question, n° 816, relative à la relance du gemmage en Aquitaine.
Mme Florence Delaunay. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. L'Europe consomme chaque année 308 000 tonnes de colophane, résidu solide obtenu après distillation de la térébenthine et utilisé dans la parfumerie, la papeterie, les cosmétiques, les adhésifs, les peintures, les laques, les vernis, le marquage routier et même les chewing-gums.
La récolte de la gemme a été définitivement arrêtée en France en 1990, pour cause de rentabilité insuffisante, au profit d'importations principalement venues de Chine, leader mondial de produits à base de résine de pins mais qui réduit sa production. Or, la demande mondiale s'accroît, à tel point que le prix de la tonne de colophane atteint aujourd'hui près de 3 000 dollars.
Les partisans de la relance de la récolte de la gemme en Aquitaine ont des arguments solides : la création d'emplois en nombre sur le massif des Landes de Gascogne, tant directs qu'indirects ; la sécurisation des approvisionnements des industries de la filière, actuellement dépendantes des pays émergents ; la réduction du déficit de la balance commerciale ; la garantie d'une présence en forêt, synonyme de prévention des incendies et des vols ou dégradations ; l'éventuelle rémunération des sylviculteurs pendant la période de culture des pins.
Néanmoins, et pour vaincre le problème de la rentabilité auquel les acteurs sont très attentifs, il convient d'étudier les conditions de l'industrialisation du gemmage. Concernant les conditions de travail tout d'abord, la récolte de la gemme est un travail pénible, dans un milieu souvent difficile. C'est un métier qui doit être appris, au moyen d'un apprentissage. La récolte étant limitée dans l'année, les gemmeurs doivent pouvoir trouver une activité au sein de la filière en dehors de la récolte en forêt.
Ensuite, s'agissant de la qualité de la récolte, des expériences sont menées en Aquitaine pour tester de nouveaux outils permettant de récolter sans nuire aux arbres et en privilégiant la qualité de la résine. Enfin, concernant la recherche et développement, le changement climatique provoque des effets sur la culture des pins ainsi que sur la qualité du bois. Les techniques de gemmage doivent faire l'objet d'études pour en continuer l'amélioration : la gemme récoltée actuellement en expérimentation ne contient aucun déchet, ce qui pose la question d'une certification de qualité de la résine.
Le massif des Landes de Gascogne est dynamique. Des chercheurs sont présents en Aquitaine, au sein du pôle de compétitivité Xylofutur, de l'INRA, présent à Cestas, ou encore de l'ONF, gestionnaire de la forêt. L'association « Gemme la forêt d'Aquitaine », créée pour la relance de la récolte de la gemme et présidée par M. Alain Delmas, vice-président du Conseil économique social et environnemental, regroupe une diversité d'acteurs de la filière bois : entreprises, associations, industriels, sylviculteurs, syndicalistes, représentants de l'État et des collectivités territoriales, anciens gemmeurs résolument tournés vers l'avenir.
Pouvez-vous m'indiquer, monsieur le secrétaire d'État, comment l'on peut envisager l'industrialisation du gemmage et son insertion dans la filière bois-forêt ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée Florence Delaunay, vous avez souhaité interroger le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, M. Stéphane Le Foll. Retenu à Bruxelles pour le Conseil agricole, il m'a demandé de bien vouloir vous répondre, ce que je fais avec un intérêt particulier compte tenu du sujet.
Les potentialités de création de valeur et d'emplois liées à la relance de l'activité de gemmage dans les forêts de pin maritime d'Aquitaine apparaissent importantes, tout en répondant au regain d'intérêt pour les produits bio-sourcés et sans effets négatifs sur l'environnement.
Il est exact que la Chine consacre une part de plus en plus significative de sa production de résine à son marché local et à la transformation en produits à haute valeur ajoutée. Cette évolution crée aujourd'hui une forte tension sur ce produit. Un récent symposium international sur les résines naturelles a permis d'établir que la production européenne potentielle, concentrée pour l'essentiel dans les forêts résineuses du Portugal, de l'Espagne et de la France, pourrait répondre à un tiers de la demande européenne, au lieu de 1 % aujourd'hui. La gemme européenne dispose donc d'un marché porteur puisque la consommation européenne est bien supérieure à sa production.
La première transformation de la gemme par distillation donne naissance à l'essence de térébenthine et à la colophane. Divers procédés de seconde transformation permettent de passer de ces deux produits à une large gamme de produits industriels. La gemme européenne dispose de caractéristiques potentiellement intéressantes compte tenu de la grande facilité de fractionnement des résines en raison de leur forte composition en térébenthine et en colophane.
Un nouveau procédé de récolte de la résine en vase clos a été breveté et a fait l'objet d'une première récolte expérimentale en 2012. Une nouvelle récolte à l'aide de ce procédé a été menée en juin 2013. Une première unité de distillation, attestant du redémarrage de la filière de gemmage en Aquitaine, doit être installée prochainement.
Les services du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt suivent ces travaux avec une grande attention et étudieront, en liaison avec les acteurs locaux, dont le pôle de compétitivité aquitain Xylofutur, toute possibilité d'aider à leur développement en fonction des résultats obtenus au cours des prochains mois. Le pôle a pour mission de favoriser l'émergence de projets de recherche et développement, y compris dans le domaine du gemmage.
La relance du gemmage en France pourrait constituer, si les potentialités sont avérées, une voie de diversification importante pour la forêt aquitaine, dans un contexte de changement climatique auquel elle est particulièrement exposée.
M. le président. La parole est à Mme Florence Delaunay.
Mme Florence Delaunay. Je vous remercie pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État : je sais que vous partagez mon intérêt pour ce sujet, qui puise dans notre histoire la dynamique de l'avenir. Nous continuerons donc nos recherches avec confiance.
Auteur : Mme Florence Delaunay
Type de question : Question orale
Rubrique : Bois et forêts
Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 janvier 2015